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Entretiens avec le Hamas : le Fatah fait machine arrière

jeudi 27 mars 2008 - 00h:12

Raphael Anderson - Ma’an News

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Le reniement officiel par le Fatah ce lundi de l’accord pour la réconciliation négocié asous les auspices du Yemen était une variation sur les thèmes qui ont dominé la politique palestinienne depuis la prise de contrôle par le Hamas de la bande de Gaza en juin passé.

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Moussa Abou Marzouk, du Hamas (à gauche) et Azzam al Ahmed du Fatah, signataires de l’accord les deux mouvements palestiniens.

Les détails en étaient différents mais la trame fondamentale demeure la même : une Autorité palestinienne (AP) dominée par le Fatah et pro-américaine, peu disposée à s’engager sérieusement dans un dialogue avec le Hamas.

Le Fatah a immédiatement commencé à se distancer de l’accord qui formalisait la reprise d’entretiens directs entre les mouvements palestiniens rivaux.

Tout d’abord, Nimir Hammad, un conseiller du président palestinien Mahmoud Abbas, a accusé le représentant du Fatah aux entretiens au Yémen, Azzam Al-Ahmad, de ne pas avoir consulté les dirigeants du Fatah à Ramallah avant de signer la version définitive du document. Le Fatah a également accusé le Hamas de mal interpréter la nature de l’accord.

Dans un deuxième reculade, le négociateur en chef de l’AP pour les entretiens actuels avec Israël, l’ancien premier ministre Ahmad Qureia, a encore mis bien plus de distance entre l’AP et le document signé, qualifiant de malentendu la signature de cet accord qui devrait être historique. Selon Qureia, Al-Ahmad a appelé de Sanaa alors qu’Abbas rencontrait le vice-président américain Dick Cheney.

Le désaveu par Ramallah des actes de son propre représentant a probablement à voir avec la visite de Dick Cheney, mais ce ne sont pas les raisons invoquées par Qureia. En effet, Abbas et les courants dominants dans le Fatah ne sont pas intéressés par un dialogue sérieux avec le Hamas parce qu’ils accordent dans une certaine mesure toute leur attention aux Etats-Unis.

Abbas ne montre aucun signe d’évolution dans la ligne de conduite qu’il a choisie pour l’AP après le changement de pouvoir au profit du Hamas dans Gaza en juin dernier : rechercher le soutien politique des Etats-Unis et l’aide financière de la communauté internationale.

En installant l’économiste Salam Fayyad formé aux Etats-Unis et à la banque mondiale, au poste de premier ministre, et en cédant devant toutes les demandes du Quartet international, Abbas a réussi à transformer Ramallah en une sorte de capitale arabe « modérée » (ceci voulant dire « amie des Etats-Unis »), une ville où le président américain, son secrétaire d’état, et le vice-président peuvent se sentir aussi bien qu’au Caire ou à Amman.

Afin de maintenir de bonnes relations avec le Quartet et avec les Etats-Unis qui lui disent ce qu’il a à faire, Abbas ne peut pas sérieusement envisager de former un nouveau gouvernement d’unité avec le Hamas. Abbas a bien compris que, jusqu’à ce que les Etats-Unis estiment nécessaire de diminuer la pression qu’il exerce sur le Hamas, il doit continuer à marginaliser celui-ci pour conserver un appui politique international.

Le rédacteur en chef de l’agence de presse de Ma’an, Nasser Lahham, a considéré que le désaccord entre Ahmad et le reste du Fatah montrait une diversité de vues dont il faut se féliciter, dans un Fatah démocratique. Bien que ceci puisse être vrai, nous devons également prendre en compte les réalités du pouvoir, à l’intérieur du Fatah et sur une scène géopolitique plus étendue. Indépendamment de savoir si le Fatah a une culture politique démocratique ou non, les propos de certains comptent davantage que d’autres. Nous pouvons beaucoup apprendre en étant attentifs à qui prend la parole et à quel moment.

En premier, l’absence de représentants de niveau plus élevé aux entretiens au Yémen est significative du niveau de l’engagement, de la part du Fatah comme du Hamas, à cette initiative pour la réconciliation. En février 2007, aux négociations de la Mecque qui ont eu comme conclusion le dernier gouvernement palestinien d’unité, le Hamas était représenté par le premier ministre Ismail Haniyeh et Khalid Mesh’al, responsable du bureau politique, et le Fatah par le Président Abbas lui-même. En revanche, les officiels aux entretiens du Yémen étaient à moitié inconnus.

Ce dont nous étions témoins dimanche soir et lundi, c’était d’un échec prévisible. Le Fatah (et le Hamas) ont limité les risques en envoyant des représentants de faible niveau, ce qui leur permettait de rejeter un accord tout en restant crédible, au moment où ces entretiens réalisaient une percée inattendue. La direction dans Ramallah, toute craintive d’offenser son invité américain, n’a pas pu se permettre d’endosser cet accord. Dans le chaos télévisé des déclarations officielles qui ont suivi le pacte, le retour en arrière du Fatah s’est retrouvé noyé dans la querelle opposant le Fatah et le Hamas [...].

Le fait le plus important demeure : une Autorité palestinienne dont l’existence dépend des Etats-Unis, d’Israël, et des pouvoirs occidentaux plutôt que de son propre peuple, ne s’engagera pas sérieusement dans des pourparlers avec le Hamas. Les Etats-Unis, en dépit de leur discours semblant favoriser la démocratie dans le Moyen-Orient, ne voient aucune contradiction dans leurs efforts pour isoler le gouvernement élu par le peuple palestinien : le « Bloc pour le changement et la Réforme ».

Interrogés sur cette apparente contradiction, les officiels américains ne font pas dans la dentelle en matière de théorie politique. Comme un responsable américain de haut rang dans la région me l’a dit en janvier : « je pense que ce qui est important ici est de rappeler que le Hamas a pris le contrôle de Gaza d’une manière illégale et qu’il défie le gouvernement légitime de l’Autorité palestinienne. La chose importante est que l’Autorité palestinienne reprenne le contrôle de la Cisjordanie et de Gaza. Si le dialogue n’aboutit pas à cela, alors il ne sert à rien. »

L’incohérence fondamentale de ces négociations se situe dans le fait brutal que le régime palestinien est divisé, et n’est pas du tout en condition résoudre le conflit par la voie palestino-israélienne. La vraie paix viendra seulement de l’engagement de ceux qui sont en mesure de la réaliser. Jusqu’à ce que l’AP et la communauté internationale comprennent que la liste de contractants potentiels inclut le Hamas, le désordre et les tueries se poursuivront.

25 mars 2008 - Ma’an News Agency - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.maannews.net/en/index.ph...
[Traduction de l’anglais : AIO - Info-Palestine.net]


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