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Confessions d’un ?Provocateur’

samedi 22 mars 2008 - 06h:40

Rabbis for Human Rights

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Le Rabbin Arik Ascherman a été arrêté jeudi 14 mars soir parce pour avoir refusé de signer un ordre lui interdisant de se rendre à Silwan...

L’état d’Israël a donné à Elad* une totale responsabilité et contrôle sur les sites archéologiques de Silwan. Elad est une association consacrée à la judaïsation de Silwan. Les actions menées par des membres de cette association provoquent et éveillent l’hostilité des Palestiniens. Non seulement ils violent l’éthique du judaïsme, mais ils mènent à la haine et la violence ...

RHR-NA : http://www.rhr-na.org
Et aussi l’article du Ha’aretz : http://www.haaretz.com/hasen/spages...

* A la tête de cette double entreprise, l’association Elad, un groupe de colons radicaux à qui le service des Antiquités israéliennes a concédé le terrain et qui, depuis, est passée maître dans l’art d’instrumentaliser le sous-sol de Jérusalem à des fins politiques. En l’espace d’une vingtaine d’années, moyennant harcèlement juridique, falsification de documents et recrutement de collaborateurs, Elad a réussi à s’emparer de plus de cinquante habitations en plein coeur de Silwan...

Extrait de l’article paru Sur France-Palestine. Pour plus de renseignements sur les fouilles archéologiques de Silwan, voir : http://www.france-palestine.org/art...


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Photo : RHR

Je suis très gêné d’avoir attiré une telle attention autour de mon arrestation. Ce sont les habitants de Silwan qui mènent le combat pour sauver leur quartier. Beaucoup d’entre eux ont été arrêtés et je ne suis même pas le premier israélien à avoir été arrêté ici. Je suis néanmoins reconnaissant pour tout votre soutien et si le fait d’être connu aide à mettre en lumière l’injustice et la discrimination qui prend place à Silwan, alors tant mieux. Comme l’a dit l’avocat Gabi Laski aujourd’hui au tribunal : « deux poids, deux mesures ».

La raison pour laquelle j’ai choisi de passer une nuit en prison et que j’ai refusé un ordre restrictif m’empêchant d’aller à Silwan n’est pas seulement parce que je n’ai pas fait ce dont on m’accuse (la version de la police change de minute en minute mais ils disent qu’apparemment j’avais saisi une personne du groupe d’Elad pour l’empêcher d’évacuer un chauffeur blessé (alors que je n’étais même pas sur le lieu) et parce que j’aurais dit aux habitants de Silwan de ne pas écouter la police (ce qui est juste le contraire).

La raison pour laquelle j’ai choisi de passer une nuit en prison est parce que nous lisons dans « Pirke Avot » (Maximes des pères, recueil des sentences des sages d’Israël) : « Quand personne ne se comporte comme un être humain décent, essaye d’être toi-même un être humain digne de ce nom » (2.6) Quand les systèmes juridiques et d’application de la loi ne remplissent pas leur devoir afin de protéger les habitants de Silwan qui, avec beaucoup de courage, mènent un combat pour défendre leur quartier, il faut qu’il y ait des êtres humains décents qui le fassent.

Elad est une organisation d’extrême droite qui est engagée ouvertement à « judaïser » Jérusalem Est et surtout Silwan parce que c’est « Ir David », la vieille Cité de David. L’état leur a cédé l’administration des parcs et des fouilles archéologiques et ils essayent d’acheter ou d’expulser les habitants palestiniens de Silwan. Parfois les ventes sont légales parfois non et dans d’autres cas elles peuvent être du point de vue technique légales mais être obtenues par des méthodes toute à fait abjectes.

Les résidents de Silwan ont fait appel auprès de la Haute Cour pour que les fouilles archéologiques soient partiellement arrêtées à cause des excavations menées par Elad qui sont faites de façon totalement irresponsable et peu professionnel et qui ont déjà provoqué plusieurs fois des affaissements de la rue principale et des fissures dans les maisons. Mais la Haute Cour n’ordonne pas l’arrêt des fouilles tant qu’elle ne se sera pas penchée sur le cas.

La police a fait éruption dans les maisons et a arrêté à 4 heures du matin 5 personnes qui étaient membres de familles qui avaient fait appel la veille à la Haute Cour.

Deux habitants et 1 activiste israélien qui étaient venus porter plainte au poste de police au sujet de l’attaque ont été eux-mêmes arrêtés.

(Ce n’était pas la première fois à Silwan. Il y a quelques mois, la police était entrée dans une maison, brisant les portes et mis toute la maison sens dessus-dessous pour chercher de la « drogue » et comme par hasard, cela s’est passé dans une maison que convoitait Elad.)

Le jour des événements en question, les habitants de Silwan avaient demandé à plusieurs activistes et à moi-même de venir car la police leur avait dit que le lendemain ils pourraient visiter les fouilles mais qu’ils ne devaient pas tenir le concert d’enfants prévu le soir même dans la tente de protestation. Les habitants étaient inquiets et désiraient une présence israélienne sur place.

Quand je suis arrivé il y avait déjà eu un incident. Le chauffeur d’un camion qui évacuait les gravats des fouilles bloquait la rue principale et l’entrée à la tente de protestation. Je n’étais pas là et je ne sais pas qui a fait quoi mais les habitants de Silwan disent que le chauffeur est sorti du camion et a commencé à arroser les gens avec son extincteur. A mon arrivée, le chauffeur était déjà blessé et avait été emmené sur le site archéologique. Les gens d’Elad ont appelé une ambulance qui est arrivée quelques minutes après moi ainsi que d’autres activistes des droits humains.

Alors qu’ils enlevaient l’homme blessé sur un brancard, j’ai entendu du bruit et ai vu une des personnes d’Elad saisir un Palestinien et l’étrangler. Puis plusieurs personnes d’Elad ont voulu entrer dans une maison. Les habitants, certains Israéliens et peut-être certains policiers ont essayé de les arrêter mais bizarrement ce ne sont que les Palestiniens et les activistes des droits humains qui ont été aspergés de poivre. (Jeudi, dans la station de police, un des officiers était très fier de lui d’avoir aspergé de poivre les gens).

J’ai remarqué que l’homme d’Elad qui avait saisi le Palestinien et avait essayé de l’étrangler parlait aux policiers en donnant sa version des événements. Quand j’ai raconté aux policiers que j’avais vu les hommes d’Elad attaquer, l’homme d’Elad a menacé de me poursuivre et a sorti un magnétophone et a commencé a me poser des questions aux quelles j’ai refusé de répondre. Pendant tout ce temps j’ai essayé de venir en aide au résident blessé de Silwan ; j’ai demandé aux policiers de faire leur travail et qu’ils séparent les deux côtés et de demander aux hommes d’Elad de rester à distance et aux habitants de Silwan de ne pas envenimer la situation. La seule réponse des policiers et des hommes d’Elad a été de proférer des invectives.

La police a réclamé les cartes d’identité et lorsqu’un des résidents a dû retourner dans sa maison pour la chercher, le policier a envoyé un policier des frontières avec lui. Je l’ai supplié de ne pas le faire car cela ne ferait qu’envenimer la situation. Le résident et le policier des frontières ont commencé à se disputer devant l’entrée de la maison. Le soldat s’est mis tout à coup à le pousser puis l’a appréhendé. La police était si tendue qu’elle avait perdue toute sa capacité de penser clairement. M’ayant demandé de venir à la station de police, l’officier s’est mis à hurler alors que je lui demandais simplement si je devais m’y rendre dans une voiture de police ou avec ma propre voiture. Il criait tellement qu’il n’entendait même pas ma question. Un officier supérieur est arrivé sur la scène et bien sûr, il n’a parlé qu’aux gens d’Elad.

Comme cela nous avait été demandé je me suis rendu avec trois autres activistes à la station de police. Au bout de plusieurs heures les enquêteurs nous ont dit qu’ils attendaient deux autres témoins. Il semble bien que la police voulait entendre les gens d’Elad avant de nous parler et ce afin de nous piéger. Nous sommes finalement partis et y sommes revenus le lendemain. L’enquêteur avait excusé les 3 autres ne demandant à voir que « le barbu plus âgé ». Il semble que les hommes d’Elad me visaient étant donné que j’avais dit les avoir vu attaquer. En arrivant, j’ai vu 3 hommes d’Elad qui attendaient et parlaient à l’enquêteur.

Après avoir donné ma version des faits, on m’a informé que je devais donner mon accord à un ordre d’interdiction qui m’obligeait à rester pendant 15 jours à distance de Silwan si je voulais être relâché. J’ai refusé. J’ai considéré que je ne pouvais pas donner mon accord à cette restriction, ni professionnellement, ni en tant que rabbin, ni en tant qu’être humain, étant donné les menaces que subissaient les habitants de Silwan.

J’ai demandé pourquoi les hommes d’Elad n’avaient pas reçu un ordre d’interdiction. L’enquêteur principal a répliqué que c’était son problème en ajoutant « Il y a ceux qui viennent travailler et ceux qui ne viennent que pour causer des problèmes. Tu es un provocateur » A travers toute l’histoire, ceux qui se battent pour leurs droits et ceux qui les soutiennent sont appelés des provocateurs.

Les officiers qui m’ont emmené de la station de police à la prison ont dit des choses terribles au sujet des musulmans en ajoutant « les pauvres de votre propre cité ont la priorité ». J’ai demandé qui étaient les pauvres de notre cité et leur ai parlé du travail que nous faisions aussi avec les juifs.

Aujourd’hui au tribunal, l’avocat Gabi Lasky a démontré le modèle de discrimination de la police : la façon dont ils traitent les membres d’Elad en comparaison de la manière dont ils traitent les habitants de Silwan (deux poids, deux mesures). L’enquêteur en chef a dit qu’il n’avait pas reçu de plaintes des habitants de Silwan mais Lasky a rappelé à la cour que la dernière fois que les résidents de Silwan s’étaient plaints d’avoir été attaqués, ce sont eux qui ont été arrêtés (ceci a été omis dans le rapport de la Cour).

Le juge, pas du tout intéressé d’entendre les problèmes, a confirmé l’ordre d’interdiction. J’ai donné mon accord (puisque de toute façon je ne vais pas à Silwan le shabbat) mais nous allons faire appel lundi. Si nous perdons cet appel, il me sera plus facile de prendre une décision si 100 Israéliens y compris des rabbins, prennent ma place à Silwan.
Shabbat Shalom,
Arik

* Arik Ascherman est le Directeur de “Rabbis for Human Rights - Israel” (RHR-Israel). Sa femme Einat Ramon est la première femme née en Israël à avoir été ordonnée Rabbin.
Le RHR-Israel est engagé dans la défense de la cause des pauvres, des droits des minorités en Israël et des Palestiniens, et il travaille pour empêcher les abus à l’encontre des travailleurs émigrés, etc.

Le RHR mobilise des milliers de volontaires qui se battent à son côté dans les domaines suivants : Justice économique et sociale ; le droit des minorités ; « l’engagisme » (contrat) des travailleurs émigrés, (pour leur assurer les soins de santé, éducation pour eux et leurs familles) ; les doits des femmes ; le dialogue interconfessionnel ; la défense des droits humains des Palestiniens ; la prévention des démolitions de maisons ; les accès aux terres agricoles et aux vergers (aide aux récoltes , défense des paysans palestiniens) ;opposition à la Barrière de Séparation, à l’expropriation des terres, à la division des villages.

Pour plus de renseignements sur les fouilles archéologiques de Silwan, voir : http://www.france-palestine.org/art... ainsi que le site du Comité pour la Protection de Silwan (en anglais) : http://savesilwan.org/index.htm

14 mars 2008 - Lettre reçue du Rabbi Arik Ascherman* directeur des « Rabbis for Human Rights-Israel »
- Vous pouvez consulter cet article à : http://www.rhr-na.org/news/rabbi-as...
Traduction de l’anglais : Ana Cléja


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