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Israël et l’ami américain

mercredi 9 janvier 2008 - 06h:26

Michel Bôle-Richard - Le Monde

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Jamais les relations entre les Etats-Unis et Israël n’ont été aussi bonnes. George Bush, au cours de ses sept années d’exercice du pouvoir, a toujours soutenu, sans sourciller, la politique de l’Etat juif. L’administration américaine l’a même souvent déterminée. Aucune décision importante n’a été prise, que ce soit par le gouvernement d’Ariel Sharon ou par celui d’Ehoud Olmert, sans que Washington n’ait été informé, sondé et qu’une ligne d’action soit choisie en commun.

Les proches conseillers des deux premiers ministres israéliens ont effectué, au cours de ces sept années, d’innombrables allées et venues à la Maison Blanche. Les chefs de gouvernement aussi. De hauts responsables américains comme Anthony Zinni, George Mitchell, George Tenet ont fait de longs séjours à Jérusalem pour se pencher sur le conflit israélo-palestinien. La concertation a été permanente, complète. Le fidèle allié de Washington n’a jamais outrepassé les lignes rouges fixées par l’administration Bush à tel point que certains analystes ont parlé d’Israël comme du 51e Etat de l’Union.

En dépit de cet accord parfait, le président Bush ne s’est jamais rendu en Israël dans l’exercice de ses fonctions. Il était encore gouverneur du Texas lorsque, en 1998, Ariel Sharon, qui n’était pas premier ministre, lui a fait faire un tour en hélicoptère au-dessus de la Cisjordanie. Il en garde un souvenir ému, et ce n’est pas sans une certaine nostalgie, comme il l’a confié la semaine dernière au quotidien Yedioth Aharonot, qu’il doit se retrouver pour trois jours, du 9 au 11 janvier, dans la ville sainte.

George Bush s’est fixé trois objectifs pour cette visite qui va se poursuivre au Koweït, à Bahrein, aux Emirats arabes unis, en Arabie saoudite et en Egypte : tout d’abord, a-t-il dit, "convaincre les Etats arabes qu’Israël est un partenaire pour la paix et que c’est dans l’intérêt des Palestiniens et du monde arabe" ; ensuite "faire avancer le processus de paix en rappelant aux alliés de l’Amérique au Moyen-Orient l’importance de la solution de deux Etats (Israël , Palestine) et voir ce qui peut être fait pour la mettre en place" ; enfin, "comment renforcer les régimes de ces pays pour qu’ils servent de barrière à l’agression iranienne".

La première étape de cette tournée va être la plus facile. George Bush a qualifié Ehoud Olmert de "visionnaire", car "il a compris l’importance de créer un espoir pour les Palestiniens dans l’Etat qu’ils veulent créer". De son côté, le premier ministre israélien, dans un entretien au Jerusalem Post, a estimé que le président Bush était "un homme avisé", "c’est l’homme qui a été le plus proche d’Israël depuis Gerald Ford", avant d’ajouter : "Il ne fait rien avec quoi je ne suis pas d’accord. Il ne soutient rien auquel je suis opposé. Il fait attention à ne rien dire qui pourrait causer du tort à Israël." Dans ces conditions, la visite de George Bush à Jérusalem ne peut être que la consécration de cette bonne entente. Une véritable osmose !

L’aboutissement d’une politique de proximité et de connivence depuis l’accession au pouvoir de George Bush, qui a coïncidé avec celle d’Ariel Sharon en février 2001. Les deux hommes ont pratiquement toujours été sur la même longueur d’onde. Ils ont décidé en commun de mettre "hors-jeu" Yasser Arafat. Ils se sont retrouvés en phase pour déclarer la guerre à l’Irak. Ils se sont mis d’accord pour décider du retrait unilatéral de la bande de Gaza pendant l’été 2005. Ce partenariat s’est poursuivi sans nuage avec Ehoud Olmert. L’appui a été total lors de la deuxième guerre du Liban pendant l’été 2006. Les Etats-Unis ont fourni à l’une de leurs principales têtes de pont au Proche-Orient toute l’assistance militaire et diplomatique dont Israël avait besoin.

Il y a eu quelques crispations du côté israélien lors de la publication du rapport Baker-Hamilton en décembre 2006 (qui appelait Washington à un effort sérieux et urgent sur le conflit israélo-palestinien). Finalement, les choses sont rentrées dans l’ordre lorsque l’administration Bush a jeté par-dessus bord les suggestions du rapport qui ne lui convenaient pas. Le président Bush n’a guère montré que le conflit israélo-palestinien était l’une de ses préoccupations. Il a laissé carte blanche à son allié. Il y a bien eu le fameux discours du 24 juin 2002, au cours duquel, pour la première fois, George Bush a exprimé la volonté de créer un Etat palestinien "viable, continu, souverain et indépendant".

Cette intention n’a guère été suivie d’effet en dépit du lancement de la feuille de route, le plan de paix international, le 4 juin 2003 à Akaba, en Jordanie, lors d’un sommet entre MM. Bush, Sharon et Mahmoud Abbas, alors premier ministre. Par la suite, le Quartet (entité composée des Etats-Unis, de l’ONU, de la Russie et de l’Union européenne) sera incapable d’imposer une solution car, comme l’a dénoncé Alvaro de Soto, ancien envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU, il est totalement soumis au bon vouloir des autorités américaines qui, sur le conflit israélo-palestinien, ont toujours imposé leur loi, édictée en étroite collaboration avec Israël.

Pas d’avancée

La victoire du Hamas aux élections de janvier 2006 et la prise du pouvoir par la force dans la bande de Gaza par cette organisation islamiste ont soudain réveillé l’administration Bush. Jusqu’à présent, cette dernière se contentait de gérer de façon lointaine une crise considérée comme subalterne par rapport aux menaces surgies dans des contrées orientales plus éloignées. Et ce d’autant qu’Israël était jugé suffisamment solide pour y faire face.

Réalisant soudain que la menace islamiste pouvait également saper la sécurité d’Israël, George Bush a eu l’idée, au mois de juillet, de lancer une conférence internationale. Cette initiative n’a pas réjoui le gouvernement israélien, qui se méfie comme d’une peste des grandes messes internationales destinées à trouver une solution à un conflit dont il veut être le seul maître. Mais, comme il s’agissait de l’ami américain, le gouvernement s’est plié de bonne grâce aux volontés du grand frère. C’est ainsi, que le 27 novembre 2007 à Annapolis, dans le Maryland, la mise en orbite d’un nouveau processus de paix a été effectuée.

Depuis, en dépit de deux réunions entre les délégations palestinienne et israélienne, et de deux rencontres entre MM. Olmert et Abbas, le processus de paix n’a pas avancé d’un iota. La venue de George Bush ne devrait rien changer à l’affaire. Le président américain est dans un rôle de bons offices. C’est aux Israéliens et aux Palestiniens de s’entendre, dit-il. Un nouvel émissaire américain va veiller au bon déroulement des négociations. Il s’agit du général James Jones, un marine qui fut secrétaire général de l’OTAN. Espérons qu’il aura plus de chance que ses prédécesseurs.


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Michel Bôle-Richard - Le Monde, le 8 janvier 2008


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