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Annapolis : la paix sinon rien

jeudi 29 novembre 2007 - 14h:44

Zbigniew Brzezinski - The New York Review of Books

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Palestine : Sommet d’Annapolis, la paix sinon rien.
Non à l’échec !

Zbigniew Brzezinski, ancien conseiller de Jimmy Carter, et d’autres responsables américains, démocrates comme républicains, demandent à Bush de tout faire pour réussir.


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Zbigniew Brzezinski

La conférence de paix israélo-palestinienne offre une occasion unique de progresser vers une solution à deux Etats. Le Moyen-Orient est embourbé dans la pire crise qu’il ait connue depuis des années, et cette conférence, si elle avait une issue positive, pourrait être déterminante pour mettre un frein aux vagues actuelles d’instabilité et de violence. Son échec, en revanche, risque d’avoir des conséquences dévastatrices dans la région et ailleurs. Gardant à l’esprit les leçons de Camp David il y a sept ans, où l’on avait déjà tenté de résoudre les problèmes qui divisent les deux parties, nous estimons que, pour être couronnée de succès, la conférence doit : 1. porter sur le fond ; 2. être fédératrice ; 3. avoir des répercussions concrètes sur le quotidien des Israéliens et des Palestiniens.

La conférence internationale doit porter sur les éléments de fond d’une paix permanente. Un accord de paix global étant impossible à atteindre, Annapolis doit se concentrer sur l’objectif final et définir les contours d’une paix durable, qui devront par la suite être ratifiés par une résolution du Conseil de sécurité. Les dirigeants israéliens et palestiniens devraient tout faire pour arriver à un tel accord. Dans le cas contraire, le Quartette (Etats-Unis, Union européenne, Russie et Nations unies), sous l’égide duquel il est préférable qu’ait lieu cette conférence, devra proposer son propre projet, fondé sur les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité, sur les “paramètres Clinton” de 2000, sur l’initiative arabe pour la paix de 2002 et sur la feuille de route de 2003.

Ce projet devrait reprendre les points suivants :

— deux Etats dans les frontières du 4 juin 1967, avec des modifications mineures, réciproques et définies d’un accord entre les parties, sur la base d’un échange équitable de territoires ;

— deux capitales à Jérusalem, les quartiers juifs étant placés sous souveraineté israélienne et les quartiers arabes sous souveraineté palestinienne ;

— des accords spécifiques pour la Vieille ville de Jérusalem, donnant à chacune des parties le contrôle de ses lieux saints et assurant un accès sans entrave de chaque communauté à ces sites ;

— une solution au problème des réfugiés qui soit adaptée à la solution à deux Etats, qui remédie au profond sentiment d’injustice des réfugiés palestiniens et leur offre une compensation financière significative et une aide à la réinstallation ;

— des mécanismes de sécurité qui tiennent compte des inquiétudes israéliennes tout en respectant la souveraineté palestinienne.

Par ailleurs, la conférence ne doit pas être une initiative ponctuelle : elle doit mettre en marche des négociations crédibles, soutenues et permanentes placées sous le contrôle de la communauté internationale et rythmées par un calendrier par étapes, afin de concrétiser tant la solution des deux Etats que l’intégralité de l’initiative arabe de paix (pour l’instauration de relations normales entre Israël et les pays arabes).

La conférence doit être fédératrice :

— afin d’améliorer la confiance d’Israël dans le processus, les pays arabes qui n’ont pas à l’heure actuelle de relations diplomatiques avec Israël doivent être présents à Annapolis ;

— nous approuvons la décision du gouvernement [américain] d’inviter la Syrie à la conférence : elle doit être suivie d’un engagement authentique . Une avancée en la matière pourrait bouleverser le paysage régional. La conférence devrait lancer des pourparlers israélo-syriens sous l’égide de la communauté internationale ;

— quant au Hamas, nous estimons qu’un dialogue authentique avec le mouvement est de très loin préférable à son isolement. Ce dialogue pourrait par exemple être mené par les Nations unies et les envoyés du Quartette au Moyen-Orient. La promotion d’un cessez-le-feu entre Israël et Gaza serait un bon point de départ. La conférence doit aboutir à des résultats ayant des répercussions concrètes.

Trop souvent par le passé, les progrès ont été sapés par le fossé existant entre d’ambitieuses déclarations et les réalités du terrain. La conférence d’Annapolis doit donc déboucher sur un accord définissant des étapes concrètes pour l’amélioration des conditions de vie et de sécurité, avec notamment un cessez-le-feu réciproque et total en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, l’échange de prisonniers, la lutte contre le trafic d’armes, la répression des milices, la liberté de circulation des Palestiniens, le retrait des postes de contrôle injustifiés, le démantèlement des implantations sauvages israéliennes et d’autres mesures tangibles visant à mettre plus rapidement un terme à l’occupation.

Il est de la plus haute importance, pour que la conférence soit un tant soit peu crédible, qu’elle s’accompagne d’un gel de l’expansion des colonies israéliennes. Il est impossible de mener des discussions sérieuses sur la fin de l’occupation si l’expansion des colonies se poursuit à un rythme soutenu. Par ailleurs, tout doit être mis en ?uvre pour améliorer la situation à Gaza et permettre à la vie économique de reprendre.

Les trois volets sont liés. Si la conférence ne débouche pas sur des résultats de fond sur un statut permanent, aucune des parties en présence n’aura la motivation ni le soutien de l’opinion nécessaires pour prendre des mesures difficiles sur le terrain. Une attitude d’ostracisme à l’égard de la Syrie ou du Hamas augmenterait le risque de voir ces deux acteurs jouer les trouble-fête : cela pourrait se traduire par une escalade des violences venues de Cisjordanie ou de Gaza, ce qui, dans les deux cas, anéantirait toute réalisation politique, augmenterait le coût politique des compromis pour les deux camps et réduirait à néant la volonté ou la capacité des Israéliens d’atténuer leurs mesures de sécurité restrictives.

De la même façon, un cessez-le-feu total ou un échange de prisonniers est impossible sans la coopération du Hamas. Et si les deux populations ne voient aucune amélioration concrète de leur vie, les accords politiques risquent d’être qualifiés de pure rhétorique, ce qui limitera d’autant plus le soutien à la solution des deux Etats.
Que les parties en présence et la communauté internationale, après une interruption de sept longues et coûteuses années, semblent envisager la résolution du conflit est une bonne nouvelle. Les enjeux sont d’une telle importance qu’il est indispensable d’obtenir des résultats. Cela suppose d’avoir le courage de sortir des sentiers battus.


Cette lettre a été adressée le 10 octobre au président George W. Bush et à la secrétaire d’Etat Condoleezza Rice. Elle a été signée par :

Zbigniew Brzezinski (ancien conseiller à la Sécurité nationale du président Jimmy Carter),
Lee H. Hamilton (ancien parlementaire américain, coprésident avec James Baker du Groupe d’étude sur l’Irak),
Carla Hills (ancienne représentante américaine au Commerce de George H.W. Bush),
Nancy Kassebaum-Baker (an­cienne sénatrice),
Thomas R. Pickering (ancien sous-secrétaire d’Etat de Bill Clinton),
Brent Scowcroft (ancien conseiller à la Sécurité nationale des présidents Gerald Ford et George H.W. Bush),
Theodore C. Sorensen (ancien conseiller spécial de John F. Kennedy),
Paul Volcker (ancien président du bureau des gouverneurs de la Réserve fédérale des Etats-Unis).

D’un sommet à l’autre

Quelle sera la contribution du sommet d’Annapolis à un processus diplomatique qui est dans une impasse sanglante depuis sept ans ? Entre juillet 2000 à Camp David et janvier 2001 à Taba (Egypte), Israéliens et Palestiniens étaient péniblement tombés d’accord sur le retrait d’Israël de la plupart des Territoires occupés, la création d’un Etat palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale (sauf le quartier juif de la Vieille Ville et la ceinture des nouveaux quartiers juifs) et la résolution financière du problème des réfugiés.

Mais ces accords n’ont jamais été ratifiés. En décembre 2003, des négociateurs israéliens et palestiniens ont rendu public un accord de Genève plus précis que les plans de l’année 2000, mais sans davantage d’effets, sur le terrain. De quoi discutera-t-on à Annapolis ? D’une version actualisée de l’accord de Genève, assurent les optimistes, convaincus duvolontarisme de l’administration Bush. Des promesses sans lendemain, pronostiquent les pessimites.

S’étant engagé auprès de l’aile ultra de son gouvernement à ne pas fixer par écrit le sort des colonies, Ehoud Olmert vient ainsi de promettre - oralement - de ne plus construire de nouvelles colonies et de démanteler les noyaux “illégaux” d’implantation, une promesse maintes fois répétée depuis deux ans.

Le Courrier international



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Zbigniew Brzezinski - The New York Review of Books via le Courrier international, le 22 novembre 2007


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