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Le raid israélien en Syrie du 6 septembre 2007

vendredi 26 octobre 2007 - 06h:40

Thierry Allemand - Cirpes

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Il faut revenir à l’été 2006 pour saisir les éléments du puzzle. La "Seconde guerre du Liban" a révélé un ’gap’ technologique entre les adversaires : classiquement, Israël surclassait ses adversaire dans ce compartiment de l’affrontement.

Pendant les six semaines que durèrent les affrontements, les missiles sol-sol du Hezbollah détruisirent les chars israéliens et d’autres s’abattirent sur les villes du nord d’Israël sans que rien ne vienne s’y opposer , les communications opérationnelles israéliennes furent pénétrées et brouillées, une unité navales fut atteinte par un missile sol-mer ...

Le constat était grave, puisque menaçant la suprématie technologico-militaire du couple américano-israélien, dont on connaît l’imbrication entre les entreprises industrielles de ce secteur.

La suprématie technologique

Dès lors, on assiste à une course rythmée des deux côtés par le pôle irano-syrien et le pôle israélo-américain. Du coté du pôle irano-syrien, on note la fourniture de systèmes russes Tor-M1 de défense sol-air, puis, l’introduction de misisles Pantsyr en Iran et l’arrivée de ces derniers en Syrie durant l’été, ces systèmes étant en coordination pour leurs missions. A ces systèmes de défense, s’ajoutent les développements des missiles Shébah 2 et 3 concrétisant la capacité offensive de première ou deuxième frappe, même si des doutes s’élèvent sur la réalité des performances et du nombre des Shebah 3. Du coté du pôle israélo-américain, c’est la fourniture par les Etats-Unis à Israël des très grosses bombes conçues pour pénétrer profondément dans le sol (permettant ainsi d’attaquer des installations enterrées) : Massive Ordnance Penetrator Bombs et de 600 systèmes antimissiles Patriot, puis l’annonce de la mise en oeuvre d’un réseau d’alerte et de réaction intégrés entre partenaires autour des missiles Arrow et David ainsi que du système THAAD de défense antimissile’ de théâtre.

L’enjeu est de montrer que l’on dispose à la fois des moyens d’attaquer en passant au travers de la défense adverse et des dispositifs permettant de se protéger d’une semblable action.

Le message du raid

C’est là qu’il est important de décrypter le sens du raid du 6 septembre en Syrie, notamment à travers les présentations de la presse.

Le Monde (14/09/07) cite la réaction syrienne auprès du Conseil de Sécurité de l’ONU - 12/09 - indiquant que des chasseurs israéliens ont pénétré dans le nord-est syrien en provenance de la méditerranée, ont eu à subir le feu des défenses syriennes et qu’ils ont eux-mêmes bombardé des objectifs, puis sont rentré à leurs) base(s) via la Turquie.

CNN indique qu’un convoi de missiles pour le Hezbollah était visé. Le New York Times penche pour une reconnaissance d’installations nucléaires. As-Sennara, journal arabe israélien, penche pour une destruction d’une base de missiles. Des questions closent l’article : Pourquoi des avions là où les satellites feraient l’affaire ? Pourquoi un vol armé ? S’agissait-il d’une préparation à une intervention sur un site nucléaire iranien ?

Libération (18/09/07) revient sur cette question et s’il décrit le même mode d’opération, il semble plus affirmatif sur les objectifs : il ne peut s’agir ni du bombardement d’un convoi du Hezbollah ni d’une opération de restauration de capacité de dissuasion ; il faudrait plutôt y voir le bombardement d’une base de missiles iraniens en territoire syrien, cela servant de message : "Ne faites pas (vous syriens) le jeu des iraniens ou vous en payerez le prix" !

Le message à l’Iran

Le monde du 25/07/07 reprenant les commentaires de Mr Ali Larijani (ex-responsable au sein des Pasdarans et actuel négociateur iranien pour les questions nucléaires) montrait bien que pour ce dernier, les erreurs commises par les Etats-Unis et Israël tant en Irak qu’au cours de la seconde guerre du Liban mettaient l’Iran à l’abri de frappes militaires. Ces mêmes conclusions apparaissaient dès août 2006 (Debka le 23) : les capacités des système ’iraniens’ avaient été gravement mésestimées, leurs niveaux rendant impossible toute intervention contre ceux qui disposeraient de ces moyens.

Les forces américano-israéliennes étaient donc depuis une année électroniquement incapables (sauf pertes importantes) de mener une action aérienne en force contre l’Iran et la Syrie.

Pour retrouver ses capacités et rétablir la crédibilité de sa menace, le pôle américano-israélien a donc entrepris de démontrer qu’il est de nouveau capable de réaliser une pénétration de la défense adverse ; Ceci se renforçant de la demande des militaires israéliens de renforcer leurs capacités de dissuasion (DS 09/07).

Entre temps l’Iran et la Syrie se sont de nouveau renforcés par l’arrivée de moyens russes très sophistiqués. Ces derniers se doivent de montrer leurs capacités technologiques pour espérer se vendre sur des marchés potentiel d’exportations, l’Inde par exemple, marché traditionnellment russe mais qui diversifie ses sources depuis quelques années. Conclusion : une démonstration grandeur nature devait être faite !

Une démonstration de force

Le raid se doit d’être offensif et brutal afin d’obliger l’adversaire à démasquer ses moyens en radars et batteries afin de les leurrer puis de les neutraliser ; un simple survol au loin ne donnerait lieu qu’à un suivi normal sans dévoilement des moyens réels. Le choix se porte donc sur un objectif aux confins de la Turquie de la Syrie et de l’Irak - missiles (Shébah 2 ou 3 ?) ou centre nucléaire (Monde 20/07) - devant être protégé par les Pantsyr et autres moyens sophistiqués. Le vol part d’Israël en direction de la Turquie par la mer (du fait des accords de Défense entre les deux pays) puis bifurque plein est, survol la Turquie (qui retrouve les réservoirs supplémentaires largués avant l’attaque pour rendre plus agiles les chasseurs bombardiers) mettant en oeuvre leurs moyens électroniques de leurre et de déception. L’assaut est donné dès lors dans une direction d’attaque quasi improbable, par le Nord et le retour de fait sur tout le long du territoire syrien pour bien montrer les capacités de protection.

Le discours technologique est clair : "Nous sommes de nouveau capables de frapper sans que vous en puissiez, mais !". Les Russes sont assez marris et contestent rapidement la présence de telles armes en Syrie, ne pouvant admettre la faillite de leurs nouveaux matériels.

Dès lors que des avions de combat puissent ouvrir un couloir et/ou détruire des missiles, le bras de fer entre Américains et Iraniens et entre Israéliens et Syriens est relancé... rendant plus probable les menaces d’actions.

Sur le même thème :

- Qu’est ce qui se mijote contre la Syrie ?
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Thierry Allemand - Cirpes, le 12 octobre 2007


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