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La séparation des familles : "Une question humanitaire prioritaire"

mercredi 24 octobre 2007 - 13h:12

IRIN - The Electronic Intifada

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Deux femmes d’un certain âge, qui n’ont pas revu leurs familles depuis plusieurs décennies, font le trajet en bus depuis le Golan jusqu’à Jérusalem. Avec une quarantaine d’autres femmes, elles ont voyagé plus de trois heures pour protester et faire prendre conscience de cette situation insoutenable. (Shabtai Gold/IRIN)

Environ 580 femmes vivant dans la région occupée du Golan sont totalement coupées de leurs familles qui demeurent en Syrie. En effet, la traversée depuis la zone occupée pour retourner vers leur pays natal leur est interdite. Propos recueillis auprès d’une association de femmes nouvellement créée.

"Tous les Arabes du Golan ont une famille en Syrie. Mais ces femmes sont coupées des contacts avec leur père, leur mère, et leurs frères et soeurs," nous dit Souha Munder, avocat qui agit avec le nouveau collectif des Femmes du Golan Syrien-Arabe Occupé.

Le Ministère israélien de l’Intérieur a fait savoir que ces femmes sont " citoyens d’Israël" ; par conséquent elles ne peuvent être autorisées à voyager en Syrie qui est un "pays ennemi". Cependant, selon un porte-parole, les femmes pourraient faire une demande individuelle d’autorisation pour voyager en Syrie, quoique ce processus puisse prendre des mois.

Suite à la guerre arabo-israélienne de 1967, les unités du Golan ont été capturées par Israël. Alors que la plupart des villages se sont dépeuplés, quatre villages Druzes et un village Alawi sont restés habités.

De nombreuses femmes qui avaient épousé des résidents du Golan avant 1967 se sont trouvées ainsi coupées de leurs familles du Jabal al- ?Arab ou d’autres parties de la Syrie.

"La séparation des familles est une des conséquences les plus graves de l’occupation du Golan, et se doit d’être abordée. C’est une question humanitaire prioritaire. Nous l’avons fait remonter aux plus hautes autorités israéliennes. Le problème persiste depuis trop longtemps," Paul Conneally, député à la tête du Comité international de la Croix-Rouge (ICRC) en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, s’est adressé à l’IRIN en ces termes.

Je vis dans le Golan depuis 40 ans. Je n’ai vu ma famille qu’une seule fois, en 1988," dit Farida Jarera . "Toute ma famille est morte : mes parents, mes frères, mes cousins. Je n’ai pu me rendre à aucune des funérailles," dit cette femme déjà plus très jeune. "J’espère que quelqu’un m’aidera. Je veux qu’on me laisse voir le reste de ma famille."

Cassettes Video des funérailles

La séparation a créé une pratique assez morbide. Quand un membre de la famille décède, les funérailles sont enregistrées sur une cassette vidéo pour ceux qui vivent de l’autre côté de la frontière. L’enregistrement finit par arriver dans la famille, qui le regarde et commence son deuil avec le son et à la vue du chagrin des autres parents.

"Être coupés des liens familiaux est une souffrance quotidienne," dit Souha.

D’autres femmes, avec l’aide spéciale du CICR (Comité International de la Croix Rouge- NdT) ont pu sortir du Golan occupé pour se marier en Syrie. Le programme fonctionne également en sens inverse, mais une fois que la femme est venue, elle lui est difficile de retourner dans sa terre natale.

"Je vis dans le Golan depuis quatre ans," dit Nour Tawfiq née au sud de la Syrie. Elle et son mari, originaire du Golan, ont maintenant une fille de deux ans, Katya.
"Elle n’a jamais vu sa grand-mère. Cela va devenir difficile. Ses amis auront des grand-parents, et elle n’aura jamais rencontré sa grand-mère," dit Nour.

En mars, Arwad Abu Shaheen est passé du Golan en Syrie pour se marier avec Muhanned Harb. Leur mariage a eu lieu à l’intérieur de la zone démilitarisée entre le Golan et la Syrie. Ce fut la dernière fois qu’Arwad vit sa mère.

A cette époque Arwad avait dit, "S’il y a la paix [entre la Syrie et Israël] je reverrai mes parents. Sinon, je ne les verrai plus."

Sa mère a rejoint le nouveau collectif de femmes, espérant obtenir le droit de voir sa fille. La belle-soeur d’Arwad, Souha, née au Jabal al- ?Arab et qui vit maintenant dans le Golan, s’y est aussi engagée car elle n’a pas vu sa famille depuis plusieurs années.

Les deux femmes ont pris part à une manifestation devant le siège du CICR à Jérusalem le 9 octobre, une première tentative pour dénoncer leur situation.

Traversée de Quneitra

Un document de prise de position émis par le nouveau collectif demande au gouvernement israélien de mettre fin à sa politique de séparation et de permettre aux femmes de passer du Golan en Syrie, dans les deux sens, par le passage de Quneitra. Il s’appuie sur la Quatrième Convention de Genève qui concerne tous les individus "qui n’appartiennent pas aux forces armées, ne prennent aucune part aux hostilités et se trouvent aux mains de l’Ennemi ou d’un Pouvoir Occupant."

Actuellement, le passage est utilisée par les étudiants, les pèlerins et les forces de maintien de la paix de l’ONU.

"Si on permet aux étudiants de voyager en Syrie pour faire des études et si les pèlerins peuvent y aller pour les raisons religieuses, pourquoi ces femmes ne peuvent-elles pas visiter leurs familles ?" a demandé Souha Munder, leur avocate.

Souha dit que la plupart des demandes qu’elle a adressées au Ministère de l’Intérieur israëlien sont restées sans réponse. "Ils se contentent de ne pas répondre, ce qui ne signifie pas, refusé. En de très, très rares occasions on permet à une femme de traverser" a-t-elle dit.

Au cours des années 1980, le gouvernement israélien a annexé le Golan occupé et a forcé les ressortissants syriens à devenir résidents Israëliens, malgré des grèves prolongées durant lesquelles les Druzes se sont barricadés dans leurs villages pendant des mois.

"La Syrie n’est pas mon ennemi, pourquoi ne puis-je y aller en visite ?" a demandé une femme.

De 1988 à 1992, le CICR a facilité un système de visite familial, qui s’est effondré suite aux désaccords entre Israël et la Syrie à propos de questions techniques. Aucun programme ne l’a remplacé et les observateurs doutent qu’il soit bientôt relancé.

Pour la plupart des familles aller en Jordanie pour les réunions familiales est tout simplement trop cher et pas réalisable, dit Souha.

Cet article à pour origine l’IRIN, Integrated Regional Information Networks, rattaché au Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires (OCHA) de l’ONU. L’IRIN met des informations brutes et des analyses à la disposition des acteurs engagés dans l’action humanitaire ou le développement économique et humain. Bien que l’IRIN soit rattachée à l’OCHA, sa ligne rédactionnelle est indépendante et ne reflète donc pas toujours la position officielle des Nations Unies ou de ses agences.

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14 octobre 2007 - Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction : Brigitte Cope


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