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Un Palestinien privé de carte d’identité a tenté de s’immoler par le feu

dimanche 21 octobre 2007 - 07h:41

Mayan Al-Helou - Mahsom

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Un Palestinien privé de carte d’identité a tenté de s’immoler par le feu
au cours d’une manifestation

Des centaines de Palestiniens privés de carte d’identité ont manifesté dans la ville de Gaza. L’un d’entre eux, un jeune homme de vingt ans, s’est répandu de l’essence sur le corps et a raconté n’avoir pas vu sa famille depuis dix ans. Les manifestants l’ont empêché de s’immoler. Les manifestants : nous continuerons le combat.

Des centaines de Palestiniens privés de carte d’identité ont manifesté au début de la semaine [dimanche 14 octobre 07] face aux bureaux du Conseil législatif, dans la ville de Gaza, pour protester contre le fait qu’ils n’ont pas été repris sur les listes d’unification familiale annoncées récemment par l’Autorité palestinienne. Un des manifestants, Mohamed Junaid, 20 ans, s’est versé de l’essence sur le corps et a tenté de s’immoler par le feu mais la foule des manifestants l’en a empêché. Mohamed Junaid a expliqué n’avoir pas vu les membres de sa famille depuis dix ans.

Le secrétaire du Comité national pour la défense des droits du citoyen, Raja Abou Daka, a appelé le Président de l’Autorité Palestinienne, Mahmoud Abbas, à inscrire les personnes privées de carte d’identité sur les listes d’unification familiale et à leur octroyer des cartes d’identités et des passeports afin qu’elles puissent rendre visite à leurs proches vivant hors de la patrie. « Des dizaines de milliers de Palestiniens sont privés de leur droit élémentaire à la citoyenneté », a dit Abou Daka dans une conversation avec un journaliste de « Mahsom ». « Je demande à toutes les personnes en charge de cette question d’y consacrer toute leur attention. Israël punit ces gens-là alors que ce sont les premiers à avoir cru dans la paix après les accords d’Oslo et à avoir laissé derrière eux des maisons où ils avaient vécu de longues années - pour la paix et pour encourager le processus diplomatique. Au lieu de nous récompenser, Israël nous punit. Nous ne sommes pas des criminels et nous n’avons rien fait qui porte atteinte à aucun des côtés. Nous sommes arrivés dans la patrie pour aider à la construire. L’Autorité Palestinienne, elle aussi, nous abandonne et ne prend pas notre problème en considération. C’est pourquoi nous avons pris nos responsabilités et nous continuerons à manifester et à protester chaque dimanche jusqu’à ce que nous atteignions notre objectif et recevions une carte d’identité et un passeport comme nos autres compatriotes. »

Abou Daka a indiqué que, dans les Territoires occupés, vivent des centaines de femmes ayant épousé un Palestinien, qui ont quitté leur patrie et sont venues dans les Territoires avec leur mari et leurs enfants. « Ces femmes n’ont rien à voir avec le conflit. Israël doit prendre cela en compte et leur accorder un traitement humain. Israël traite humainement les prisonniers et leur permet même parfois d’avoir des visites familiales. Pourquoi ne pas nous définir comme prisonniers, nous et nos épouses, et autoriser celles-ci à rendre visite à leur famille qu’elles n’ont pas vue depuis des années ? Il y a quelques jours, l’information a été diffusée qu’Israël approuverait environ 5.000 unifications familiales. Nous nous félicitons de cette démarche mais elle nous a déçus aussi. A ce rythme-là, il faudra 25 ans pour résoudre notre problème, si pas davantage. »

Khalil Abou Shmala, qui dirige l’organisation Al-Damir pour les droits de l’homme, et qui a participé à la manifestation, en a appelé à Mahmoud Abbas en disant : « Il y a quelques jours, vous avez, Monsieur le Président, annoncé que les passages étaient ouverts et je vous dis que ce n’est pas vrai. Tous les passages sont fermés et plus de 600 étudiants ont raté l’occasion d’aller étudier à l’étranger. Des milliers d’autres ont perdu leur emploi dans les pays du Golfe et ailleurs. Vous devriez, Monsieur le Président, réexaminer la question et tenir vos promesses. » Abou Shmala a vivement critiqué les factions palestiniennes. « Le rôle des factions est de servir la population et pas de se montrer arrogantes à son égard. Cette illusion qu’on appelle Autorité Palestinienne occupe encore les esprits des politiciens palestiniens. Alors que même un Ministre palestinien ne peut se déplacer sans l’accord d’Israël ». A la fin de son discours, Abou Shmala a déclaré « le citoyen qui a tenté, aujourd’hui, de s’immoler par le feu, s’était adressé dans un message au Président Abbas et aux responsables pour les presser d’ ?uvrer sur cette question. Le peuple palestinien a atteint une situation de désespoir et nous en sommes tous responsables ».

Parmi les manifestants se trouvait Ibrahim Abou Matar, qui avait été arrêté par Israël en 1969 et condamné à la détention à perpétuité, mais qui a été libéré après 16 ans. En 1985, Abou Matar est parti en Jordanie, comme de nombreux Palestiniens, et il s’y est marié. « Je me suis abstenu d’entrer à Gaza parce que j’avais payé le prix de mon combat », dit-il. « J’ai été arrêté alors que j’avais vingt ans. J’avais 36 ans quand je suis arrivé en Jordanie. Les Jordaniens m’ont procuré un document inutilisable, sans mention nationale ni de patrie. C’est comme ça que nous avons été opprimés en Jordanie aussi. Je me trouve à Gaza depuis 2005. J’ai sauté par-dessus le mur séparant Gaza de l’Egypte. Je suis arrivé à Gaza avec mon fils aîné, de vingt ans. Je suis actuellement emprisonné dans la grande prison de Gaza, et ma famille est dispersée dans les pays arabes. Ma mère et mon frère sont morts. J’ai un frère en Libye et une s ?ur en Grande-Bretagne qui, elle non plus, ne peut pas venir à Gaza, pour la même raison. »

La question des personnes déracinées, privées de documents d’identité est récemment devenue une question humanitaire de premier degré. Beaucoup parmi ces personnes déplacées sont malades et nécessitent des soins médicaux à l’étranger mais se voient empêcher de quitter Gaza en raison de cette absence de documents.

Ashraf Al-Shenati est ingénieur. Les membres de sa famille n’ont pas de cartes d’identité. Deux de mes fils souffrent d’une maladie grave et il n’y a pas à Gaza de possibilité de les soigner », dit-il. Leur traitement nécessiterait un séjour en Allemagne. J’ai fait tous les efforts possibles pour les faire sortir de Gaza mais en vain. Finalement, on a été d’accord de les faire entrer à l’intérieur de la Ligne Verte, mais du côté israélien, on fait traîner la coordination de la sécurité et l’affaire s’éternise. La situation de mes fils se détériore. »

Le jeune Sami Hadjaoui est arrivé à Gaza il y a 11 ans. Il lui est interdit d’achever ses études et aussi de voir ses parents qui vivent en Egypte, mais jamais il n’a reçu la citoyenneté dans sa patrie. « Quand je suis arrivé au pays, j’ai compris que ma patrie ne m’acceptait pas puisque je n’ai pas de carte d’identité. Je vis actuellement seul à Gaza et ma famille est en Egypte. Nous sommes coupés les uns des autres. »

Une autre manifestante, Saida D, une citoyenne marocaine mariée à un Palestinien : « Visiter mon pays et ma famille au Maroc est devenu un rêve inaccessible. Mon père est décédé avant que j’aie pu le voir, parce que je n’ai pas de citoyenneté et que les responsables lancent des promesses qu’ils ne tiennent pas. J’ai très peur que si je pars, je ne puisse pas revenir auprès de mon mari et de mes enfants. »

Un enquêteur du Centre palestinien pour les droits de l’homme, Khalil Shahin, insiste sur le fait que la question des personnes déplacées et sans carte d’identité dépend, en fait, des forces d’occupations israéliennes qui ont arrêté de s’occuper de l’unification des familles ou même de leur fournir un numéro provisoire, depuis 1994. En attendant, le nombre de personnes déplacées ne cesse de croître. « Notre Centre suit la question aux côtés d’autres organismes », dit Shahin. « Tous les Centres pour les droits de l’homme établissent fiévreusement des contacts avec Ramallah, mais la question est entre les mains des Israéliens. La solution de ce problème ne sera obtenue que par une pression internationale accompagnée d’une pression de l’Autorité Palestinienne lors des rencontres qui ont lieu avec les Israéliens. »


Sur le site de Mahsom :

- Ne signez pas !
- La ?Patrouille Verte’ harcèle les bergers arabes du Néguev
- Ils tirent sur des enfants

Mayan Al-Helou - Mahsom, le 17 octobre 2007
Traduit de l’hébreu par Michel Ghys


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