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Comment vais-je pouvoir m’occuper de mes enfants ?

mercredi 5 septembre 2007 - 06h:53

Rami Almeghari - The Electronic Intifada

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« Puisse Dieu fermer les yeux à quiconque interdira l’association caritative al-Salah qui nous permet de vivre. »

Ainsi s’exprime Halima Abu ?Isa, une femme de 45 ans, veuve et mère de deux enfants, en réaction à la décision de l’Autorité palestinienne de Ramallah, de dissoudre 103 associations de bienfaisance palestiniennes.

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Halima Abu ‘Isa, veuve et mère de deux enfants, montre l’argent qu’elle - et beaucoup d’autres - ne recevra plus à cause de la fermeture des 103 ONG dans la Bande de Gaza - août 2007 (Iyad Albaba)




L’allocation mensuelle de 900 shekels (160 ?) que perçoit Abu ?Isa de l’association al-Salah, une association caritative rattachée au Hamas, est la dernière barrière avant le dénuement. Abu ?Isa vit dans une maison qu’elle loue à Deir al-Balah, une ville dans le centre de la bande de Gaza et elle est seule pour s’occuper de ses deux enfants depuis que son époux est décédé, il y a onze ans, dans un accident de la route.

« Pourquoi veulent-ils fermer ces associations de bienfaisance qui m’ont permis de vivre, ainsi que d’autres, avec dignité et nous ont épargné la mendicité ? » demande Abu ?Isa. « Comment vais-je pouvoir m’occuper de mes enfants et rembourser mes dettes si, oh mon Dieu, non !, s’ils nous coupent l’allocation ? ». Elle condamne durement ceux qui ont pris cette décision.

Le gouvernement palestinien de Ramallah désigné par le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, en juin a, sans l’aval du Conseil législatif palestinien, publié un décret le mois dernier ordonnant la fermeture de 103 associations caritatives, alléguant des irrégularités financières. Dans une déclaration du 29 août, le Centre palestinien pour les Droits humains (PCHR) a condamné la décision car illégale et il a fait appel « au gouvernement de Ramallah pour qu’il annule cette décision qui revient à couper l’aide humanitaire et les secours d’urgence à des milliers de familles palestiniennes ».

Le gouvernement élu dirigé par le Premier ministre, Ismail Haniyeh, du Hamas, qui opère toujours dans la bande de Gaza, a également rejeté la décision soulignant qu’elle avait une motivation politique et qu’elle visait à affaiblir le Hamas. Son porte-parole, Sami Abu Zuhri, déclare que « l’allégation selon laquelle ces associations seraient impliquées dans des actes de fraude et de corruption financière est sans fondement » ; il ajoute que « beaucoup d’entre elles dépendent du ministère de l’Intérieur et qu’elles ont un contrôle permanent sur leurs budgets. »

Pour Abu Zuhri, le gouvernement de Ramallah va essayer de se « servir de ses contacts internationaux » pour « faire pression sur les banques afin d’affaiblir l’efficacité de telles organisations. » Abbas et son Premier ministre désigné, Salam Fayyad, ont reçu le soutien d’Israël, des Etats-Unis et de l’Union européenne, alors qu’ils ont isolé le Hamas.

Dans Gaza, la consternation est générale, Mohammed Shahin, un orphelin âgé de 15 ans, de Deir al-Balah, qui étudie à l’école primaire privée des orphelins d’al-Salah, exprime son indignation dans la crainte de la fermeture de son école.
« Cette école m’a permis d’apprendre beaucoup de choses utiles et m’a enseigné comment on se comporte civilement » dit Mohammad. « Je détesterai ceux qui la fermeraient, aussi longtemps que je vivrai ».

Selon Um Umar qui dirige le département Orphelins de l’association al-Salah, celle-ci apporte de l’aide à 12 000 orphelins palestiniens et verse des allocations mensuelles à 700 familles dans toute la bande de Gaza.

Cette dernière décision du gouvernement de Ramallah fait suite à toute une série d’autres mesures prises par Abbas, également chef du mouvement du Fatah qui a perdu les élections législatives de janvier 2006 au profit du Hamas, mesures qui visent à imposer sa volonté.

Le gouvernement de Ramallah d’Abbas a publié des décrets prétendant abroger toutes les décisions prises par le gouvernement d’Haniyeh et a refusé de payer les salaires à des milliers de fonctionnaires civils palestiniens de la bande de Gaza avec les revenus fiscaux palestiniens débloqués par Israël. Abbas et ses conseillers ont accusé le Hamas d’avoir combiné un « coup militaire ».

Ces mesures font suite à l’action du Hamas qui lui a permis de prendre le contrôle total des institutions de l’Autorité palestinienne dans la bande de Gaza début juin, expulsant les forces fidèles à Abbas et au Fatah. Le Hamas a justifié son action en mettant en avant que certaines milices du Fatah, spécialement celles commandées par le conseiller d’Abbas, Muhammad Dahlan, avaient reçu des fonds et des armes de l’étranger et tentaient de miner et de renverser le gouvernement élu, cela depuis les élections.

Après la prise de contrôle par le Hamas, le Fatah s’est retiré du « gouvernement d’union nationale » institué en mars dans le cadre de l’accord impulsé par les Saoudiens et a travaillé à renforcer le siège contre Gaza.

Un dirigeant de premier plan du Fatah en Cisjordanie, Mohammed al-Hourani, a essayé de justifier la fermeture de ces associations en déclarant que « cette décision s’accompagnait d’un projet de développement prévu pour améliorer les conditions de vie des classes moyennes et défavorisées de la société palestinienne et, pour y parvenir, l’Autorité devait opérer une centralisation en gérant elle-même les organisations de service. »

Bien que les Etats-Unis aient voté des dizaines de millions de dollars pour soutenir le gouvernement de Ramallah, on ne voit pas clairement comment ils vont s’y prendre pour mettre en oeuvre un tel projet sur le terrain - s’il existe -, étant donné qu’ils ne décident de rien dans la bande de Gaza. En attendant, les dirigeants du Hamas jurent qu’ils continueront à résister à un boycott écrasant qui leur est imposé depuis leur victoire aux élections législatives.

Rami Almeghari écrit actuellement pour plusieurs media, dont The Palestine Chronicle, aljazeerah.info, IMEMC, The Electronic Intifada et Free Speech Radio News. Rami a aussi été un traducteur chevronné de l’anglais et rédaceur en chef du centre international de la presse du Service palestinien d’information basé à Gaza. Il peut être contacté à l’adresse : rami_almeghari@hotmail.com

Du même auteur :

- Gaza : des combats fratricides à la pauvreté, le peuple est toujours la victime, du 17 août 2007 (Imemc).
- Une deuxième Naqba à Gaza, du 17 mai 2007 (The Electronic Intifada).

Deir al-Balah, Bande de Gaza occupée - Live from Palestine - 3 septembre 2007
The Electronic Intifada - traduction : JPP


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