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Liban : « Nous avons ramené le Hezbollah dans la famille »

mercredi 8 août 2007 - 07h:18

Edgar Maalouf - Le Temps

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Un député libano-suisse défend l’entente du mouvement de Michel Aoun avec le « parti de Dieu ».

Comme Michel Aoun, il est général et député. Comme le chef de Courant patriotique libre, il avait dû se réfugier sous pression syrienne, en 1990, à l’ambassade de France à Beyrouth, puis en Europe jusqu’en 2005. Mais, alors que Michel Aoun résidait à Paris, Edgar Maalouf vivait en Suisse, dont il a pris la nationalité, avant de rentrer au Liban et d’être élu à l’Assemblée.


Dans l’élection du Metn, vous avez gagné contre Amine Gemayel, mais vous avez perdu des plumes par rapport à 2005...

C’est vrai, mais nous avions en face de nous tous les ténors des partis au pouvoir, regroupés autour de l’ancien président qui pleurait son fils assassiné et voulait récupérer son siège de député. Et ils n’ont cessé de nous dénigrer. Ce n’était pas facile.

Ne payez-vous pas surtout l’alliance que vous avez conclue avec le Hezbollah ?

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Hassan Nasrallah lors de son discours du 3 août sur la chaîne de télévision du Hezbollah - Photo : AFP

Le texte d’entente que nous avons signé avec le Hezbollah, nous l’avions aussi proposé à tous les autres partis. Ceux qui nous le reprochent l’ont refusé. A nos yeux, le seul moyen d’obtenir du parti chiite qu’il renonce à ses armes, dont on connaît la puissance depuis l’an passé, c’est le dialogue et des moyens pacifiques.

La résolution 1701 du Conseil de sécurité l’admet, d’ailleurs. Hassan Nasrallah, le secrétaire général du Hezbollah, vient encore de répéter qu’il est prêt à parler de ce désarmement. Et son parti - qui est composé, ne l’oublions pas, de Libanais - ne parle plus d’établir dans ce pays une république islamique. Je pense que, en nouant avec lui un rapport de confiance, nous contribuons à faire rentrer le Hezbollah dans la famille du Liban.

Mais le Hezbollah est l’allié de l’Iran et de la Syrie, et vos adversaires vous rangent dans le camp pro-syrien. Un parti favorable à la Grande Syrie appelait d’ailleurs à voter pour votre candidat dans le Metn...

Nous ne lui avions rien demandé, et pourquoi refuserions-nous des voix ? Amine Gemayel a fait autrefois alliance avec ce parti ! Mais comment peut-on nous accuser d’être pro-syriens, alors que nous avons été exilés pour avoir résisté aux troupes d’occupation de Damas ! Cela dit, les Syriens sont partis, et il faudra bien que nous établissions des relations de bon voisinage, sans ingérence, avec ce grand voisin.

La cassure dans le camp chrétien est-elle destinée à durer ?

Pour le moment, les chrétiens sont tenus à l’écart du pouvoir réel. Ceux qui font partie de la majorité et nous critiquent n’ont pas leur mot à dire sur les questions importantes. Nous sommes prêts à discuter avec eux afin que les chrétiens retrouvent une présence effective dans le gouvernement de ce pays. C’est pour cela que Michel Aoun est candidat à la présidence de la République, qui doit récupérer toutes ses prérogatives.

Que dites-vous des médiations - arabe, française, suisse - qui sont tentées pour aider le Liban à surmonter sa crise ?

Tous les concours sont bienvenus. Mais je trouve que la Suisse a un comportement idéal, sans tapage, sans ingérence, et elle fait de nos problèmes une bonne analyse.

Propos recueillis par Alain Campiotti

Voir l’excellent reportage vidéo de Jean-François Boyer et Alain Gresh : « Le mystère Hezbollah »

Il n’y a pas que le Hezbollah...

Entre le camp du 8 mars et celui du 14 mars, la différence ne semble être que sémantique. Elle reflète pourtant une vision fondamentalement différente du Liban. Celle d’un général Michel Aoun, ex-exilé, prêt à intégrer le Hezbollah dans la marche de l’Etat et celle d’un Amine Gemayel, ex-président, dont le parti des Phalanges se présente comme le rempart occidentalisé au « parti de Dieu ».

L’élection partielle de dimanche provoquée par l’assassinat de deux députés, dont le fils d’Amine, a donné lieu à des affrontements verbaux qui ne font qu’ajouter des étincelles dans la poudrière libanaise. Michel Aoun, « le traître » et Amine Gemayel, « l’inféodé aux Occidentaux » montrent à eux deux à quel point le Liban est malade de ses clans, de la tradition, de son passé. Par leur combat fratricide, ils mettent à mal jusqu’à l’identité chrétienne, l’un des piliers du Pays du Cèdre. C’est d’autant plus douloureux que les chrétiens libanais souffrent d’un déficit démographique inquiétant par rapport à une population chiite en pleine croissance.

Le scrutin, en apparence secondaire, était un rendez-vous électoral signifiant. Mais au lieu de clarifier la situation, il n’a fait qu’amplifier la crise qui sape depuis plus de huit mois l’assise du faible Etat libanais. Il a surtout rendu moins probable la tenue d’une élection présidentielle dans moins de deux mois. Dans le camp maronite à qui revient, selon la Constitution, la présidence de la République, on est incapable de s’entendre sur un candidat (Aoun, Gemayel, Geagea, Harb). En Occident, on a souvent cru que le problème libanais se résumait au seul Hezbollah. On constate désormais que les chrétiens font partie intégrante du problème.

L’ex-ministre des Finances, Georges Corm, pense qu’une telle élection n’aurait aucun sens tant qu’il n’y a pas de nouveau gouvernement au sein duquel toutes les principales communautés sont représentées (les chiites ont claqué la porte l’an dernier). Au Liban, où toute tension est susceptible de dégénérer, l’absence de présidentielle cet automne risque de cimenter le blocage complet des institutions. Avec l’effet collatéral de continuer à attirer les mouvements djihadistes qui s’implantent peu à peu au nord et au sud du pays.

Stéphane Bussard

Liban : la répartition confessionnelle

Le Liban est composé d’au moins 17 communautés pour une population qui avoisine aujourd’hui les 4 millions d’habitants. Selon les derniers chiffres disponibles, les sunnites représentent la principale communauté (25,4%), devant les chiites (24,1%), les maronites (22,9%), les Grecs orthodoxes (8,5%) et les druzes (5,7%).

Ensemble, les chrétiens constituent environ 40% de la population totale. On les trouve surtout dans le Mont-Liban, au nord de Beyrouth. C’est là, à Bikfaya, que la dynastie des Gemayel est installée.

Stéphane Bussard

Le Temps, le 7 août 2007


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