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Gaza risque de devenir totalement dépendante de l’aide : 80% de son industrie a dû fermer ses portes

mardi 31 juillet 2007 - 07h:33

Ma’an News Agency

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La Bande de Gaza a été rayée économiquement de la carte et de l’agenda d’Israël.

Gaza, Ma’an - Selon un cri d’alarme lancé ce dimanche par l’ONG internationale humanitaire Oxfam, par l’organisation israélienne de défense des droits de l’homme Gisha et par des hommes d’affaires palestiniens locaux, la population (estimée à 1,5 million d’habitants) d’une Gaza surpeuplée et soumise à embargo est en passe de devenir à brève échéance totalement dépendante de l’aide.

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Passage d’Erez, ouvert le 30 juillet pour permettre le retour d’une partie des Palestiniens bloqués depuis plusieurs semaines au passage de Rafah bouclé par Israël et l’Union Européenne - Photo : AP

Pour éviter l’effondrement total de l’économie de Gaza et une existence indigne à sa population assiégée, selon l’avertissement de ces trois organismes, il est vital d’ouvrir les points de passage, et principalement la plate-forme commerciale de Karni, pour les importations et les exportations, entre Gaza et Israël.

Près de 87% des habitants vivent en dessous du seuil de pauvreté (statistiques des Nations Unies), ce qui signifie que, pour beaucoup déjà, les besoins alimentaires de base sont dépendants des distributions de nourriture.

Lors d’une conférence de presse à Jérusalem, Michael Bailey, le représentant local d’Oxfam, expliquait que la prévention d’une crise humanitaire implique bien plus que la distribution de nourriture et de médicaments pour la survie. L’aide humanitaire signifie aussi s’assurer que la population peut vivre dans la sécurité et la dignité.

« Karni Crossing » est fermé depuis le 12 juin. A cause du manque de sécurité consécutif à la prise de pouvoir par le Hamas, affirment les Israéliens, particulièrement aux points de passage. Les participants à la conférence de presse répondirent, au contraire, qu’Israël est délibérément en train d’étouffer la Bande de Gaza, en violation du droit international. Sari Bashi, directeur du groupe israélien de défense des droits de l’homme Gisha , accusa Israël de mener une politique de « punition collective ».

Ils pointaient surtout le fait qu’Israël avait rapidement réouvert les points de passage de Kerem Shalom et de Sufa Crossings, au sud de la Bande, pour prévenir la disette et permettre l’entrée des produits alimentaires et médicaux essentiels. Si une solution avait été trouvée dans ces cas-là, malgré des problèmes de sécurité persistants, alors une solution pouvait être adoptée pour Karni : il y a urgence, pour les participants à la conférence de presse, qui en appellent au Premier ministre israélien Ehud Olmert et au Président palestinien Mahmoud Abbas pour qu’ils en fassent un point prioritaire de leurs discussions de lundi.

Bassim Khoury, patron de la Fédération palestinienne des Industries, a révélé que le secteur privé palestinien avait pris contact avec la Turquie en suggérant que des forces turques pourraient garantir la sécurité du côté palestinien des points de passage. Soulignant que cette idée en est encore au stade de la suggestion, Khoury expliqua que la Turquie pourrait être acceptable - en tant que médiateur armé - à la fois pour les Palestiniens et les Israéliens, s’agissant d’une nation musulmane qui a conclu des accords de défense avec Israël.

Madame Bashi mit l’accent sur le fait qu’Israël endosse la responsabilité majeure. Elle reste la puissance occupante, malgré ses affirmations concernant son « désengagement » de Gaza, puissance qui garde un contrôle étroit des frontières et des points de passage.

« Israël contrôle l’espace aérien de Gaza et ses eaux territoriales, et exerce une étroite surveillance des frontières avec l’Egypte, où le transit de marchandises est interdit. » ajouta-t-elle. « Passer la frontière avec Israël est le seul moyen pour les habitants de Gaza d’envoyer et de recevoir des marchandises. Israël a l’obligation impérative de réouvrir les points de transit commerciaux - et les leaders palestiniens doivent y coopérer. »

Jusqu’à ce qu’une solution émerge, les Gazaouis continueront de souffrir. Khoury insista sur le fait que c’est le secteur entrepreneurial privé qui encaisse le plus gros du choc. L’industrie de Gaza est en train de mourir : Israël interdit toutes les exportations courantes et seuls les biens de première nécessité peuvent entrer. Privées de matières premières, 80% des entreprises du territoire ont dû fermer à partir de début juillet.

Il ajouta que, maintenant, au bout de dix jours, seules 40% des 20% d’entreprises restées ouvertes continuaient à tourner, mais avec une capacité limitée.Entre la victoire électorale du Hamas du début 2006 et le début juin 2007, il précisa que seules 200 à 250 entreprises industrielles avaient fermé : plus de 1200 pour le seul mois dernier !

En conséquence, au moins 65800 salariés - soutien de centaines de milliers de personnes dépendantes - ont été licenciés. Le taux de chômage à Gaza s’élève couramment à 30-35% mais, si la situation actuelle s’éternise, il va flamber à 70%.

Le propriétaire de la biscuiterie Al-auda, Muhammad Al-Talabani, parla avec émotion de la honte qu’il ressentait de ne pouvoir confier de tâche à ses ouvriers, prêts à travailler à n’importe quel prix, parce qu’il ne disposait pas des matériaux nécessaires.

« Mon avenir en tant qu’entrepreneur est désolant » dit-il. « J’ai déjà perdu mes clients de Cisjordanie, 50% de mon activité. A Gaza, les gens mendient du travail à 10 shekels (2 dollars) la journée, mais je ne peux les embaucher car je n’ai rien à leur faire faire. C’est une erreur de penser que l’étranglement économique de Gaza jouera contre le Hamas. Bien au contraire - le blocus économique incite les gens à l’extrémisme. Ici, les gens reçoivent une aide alimentaire du Hamas, et ils reprochent à Israël sa politique d’enfermement. »

Madame Bashi émit aussi cette mise en garde : tuer l’économie de Gaza représente une menace sévère pour Israël, à la fois sur le plan économique et sur le plan politique. « Chercher à affaiblir le Hamas en punissant 1,5 millions de femmes, d’hommes et d’enfants est illégal et contre-productif » avertit-elle, ajoutant que de telles restrictions sont de nature à pousser la population à se radicaliser.

Dans le rapport de l’organisation Gisha (« Blocus commercial : rayer l’économie gazaouie de la carte ») sont rapportées les paroles du dirigeant de l’Association des Industriels d’Israël, Shraga Brosh, selon lequel « du boycott économique de la Bande de Gaza...résultera un désastre humanitaire, jetant de l’huile sur le feu et menant à une détérioration de la situation sur le plan de la sécurité - une situation qui sera délétère pour l’économie israélienne. »

Suite à la prise de contrôle de la Bande de Gaza par le Hamas, Israël a effacé de ses ordinateurs le code douanier utilisé pour identifier les marchandises entrant à Gaza. « Aucun chargement destiné à Gaza ne sera livré jusqu’à nouvel ordre », selon une lettre du directeur adjoint de l’administration israélienne des Douanes, Reuven Meltzer, citée par Gisha. « Toute demande d’expédition de marchandises pour Gaza sera bloquée par le système informatique » ajoutait Meltzer.

« La Bande de Gaza a été rayée économiquement de la carte et de l’agenda d’Israël » selon le directeur général du Conseil palestinien des Affréteurs, Majdi Khalil, cité dans le rapport de Gisha.

De ce fait, les compagnies gazaouies subissent 3 millions de dollars de coûts pour des marchandises en souffrance - chose que peu, et encore, sont susceptibles de supporter - pour des marchandises bloquées dans des ports israéliens, dont on interdit l’entrée à Gaza, toujours selon le même organisme palestinien. Les dons exempts de taxes, comprenant les « secours humanitaires » vitaux peuvent apparemment toujours entrer.

Khoury - de la Fédération palestinienne des Industries - précisa que, le 4 juillet, il y avait déjà 850 conteneurs de marchandises en attente de transit dans les ports israéliens - d’une valeur de 65 millions de dollars - tandis que 450 autres conteneurs - correspondant à une valeur de 35 millions de dollars - étaient en route vers Israël.

Dès à présent le secteur privé gazaoui enregistre des pertes estimées à 20,6 millions de dollars. Chiffre qui n’inclut pas les 160 millions de dollars correspondant aux projets de l’UNRWA qu’il a fallu stopper depuis une semaine, faute de matériel de construction, à cause de la fermeture des points de passage.

L’avertissement de Khoury et du PalTrade est clair : si les exportations continuent à être bloquées jusqu’à l’automne, le secteur des cultures commerciales - y compris ?illets, fraises et tomates cerise destinées aux marchés extérieurs - va subir 100% de pertes. Ces récoltes sont aussi à 100% dépendantes des engrais importés et d’autres produits chimiques, semences et emballages, ce qui les rend très vulnérables à l’effondrement de l’économie.

Le secteur du vêtement, qui a employé jusqu’à 16000 personnes en 2005 mais dont la force de travail actuelle représente à peine 5% de ce nombre, selon la Fédération des Industries, devrait aussi encaisser des pertes sévères. 90% de la production du secteur de l’habillement gazaoui est destinée au marché israélien, et, qui plus est, ces vêtements de mode sont très dépendants du temps qui passe !

Le temps presse pour éviter un effondrement total de l’économie de Gaza. Khoury avertit Israël que, si aucune action préventive n’est entreprise rapidement - ouvrir le terminal de Karni, par exemple - Israël se retrouvera avec un « Mogadiscio » au pas de sa porte.

Pour plus de détails sur l’effondrement de l’économie gazaouie, y compris la relation de l’affaire du côté de l’armée israélienne, vous reporter SVP au reportage du 6 juillet : « The Gaza Strip : subsisting but hardly thriving. »

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16 juillet 2007 - Ma’an News Agency - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.maannews.net/en/index.ph...
Traduction : Michel Zurbach


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