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Retour à des priorités plus brutales dans les Etats arabes

dimanche 22 juillet 2007 - 06h:31

Moataz El-Fegiery - Miftah

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Ne voulant pas rester sur la touche dans le débat sur les réformes au Moyen-Orient dans les deux dernières années, les gouvernements arabes se sont affirmés contre les militants et les réformistes de la société civile, entraînant une augmentation significative du nombre des prisonniers d’opinion arabes. Le retour du recours aux solutions de force dans les pratiques politiques de la région et la mise en sourdine des appels de la communauté internationale en faveur de la liberté et des réformes ont aggravé ce mouvement.

Les régimes arabes usent de méthodes identiques pour réprimer l’expression critique. Il s’agit par exemple de la promulgation de lois suffisamment vagues et générales pour que leur interprétation et leur application soient laissées à l’arbitrage de l’autorité exécutive.

Ce type de textes se retrouvent dans la plupart des nations arabes où l’expression pacifique d’opinions est criminalisée comme « atteinte à l’ordre public », « menée anticonstitutionnelle » « insulte au président (ou à la famille royale) », « offense à la religion », « propagation de fausses nouvelles pouvant porter atteinte à l’image de la nation », « diffamation du pays aux yeux de l’étranger » et d’autres formulations du même genre. Un ensemble caractérisé par l’absence d’indépendance de la justice, la soumission du ministère public à l’Executif, l’extension du domaine de la sécurité nationale et de l’autorité des tribunaux militaires contrôlés par le pouvoir exécutif, concourt à faciliter la répression d’actes souvent classés dans les atteintes à la sécurité de l’Etat.

S’ajoutant aux lois déjà écrites, la situation sécuritaire de l’après 11 Septembre 2001 a facilité l’adoption de lois anti-terroristes où la définition du concept de terrorisme est suffisamment large pour criminaliser toute action politique ou civile pacifiques. Bahrein, le Maroc, Qatar et la Tunisie ont déjà pris de nouvelles lois.

D’autres pays comme l’Egypte et la Syrie ont déjà utilisé des lois d’exception valables pour des décades, qui donnent le feu vert et un domaine d’intervention quasi illimité à l’appareil sécuritaire pour ce qui relève de la détention administrative et la violation des droits constitutionnels. Le gouvernement égyptien ne s’est pas contenté de ces lois d’exception, mais il est allé jusqu’à intégrer des articles anti-terroristes - justifiant ainsi les restrictions aux droits humains et civiques - dans la Constitution, précédent unique dans les traditions constitutionnelles universelles.

Ce durcissement sélectif des lois anciennes et récentes qui criminalisent les critiques envers le gouvernement a conduit à une explosion des arrestations, des procès, et des condamnations à l’emprisonnement pour des délits d’opinions.

La situation la plus sérieuse est sans doute celle de la Syrie où une série d’incarcérations ont été prononcées dans les derniers mois à l’encontre de militants pour les droits humains et civiques. Parmi les plus connus se trouve Kamal al-Labwani condamné à 12 ans de prison pour « complicité dans la préparation de complots menés de l’ étranger visant à attaquer la Syrie » après une rencontre avec des militants des droits de l’homme, des journalistes et des parlementaires en Europe aux Etats- Unis.

La Syrie a également pris des mesures répressives à l’encontre des signataires de la déclaration de Beyrouth et Damas qui appelle à la fin de l’ingérence syrienne au Liban. Les plus notables de ces mesures incluent une condamnation à 5 ans prononcée contre un avocat, Anwar al-Bunni, et à 3 ans infligée à deux militants, Michel Kilo et Mahmoud Issa, pour « tentative de saper le sentiment national » et « incitation à l’arrogance et au sectarisme idéologique ».

Mais la Syrie est loin d’être le seul pays à persécuter ceux qui expriment des vues qui irritent le gouvernement. En Tunisie, le journaliste Muhammad Abdo a été condamné à 3 ans de prison pour avoir « publié des écrits susceptibles de troubler l’ordre public » et « diffamé les autorités judiciaires » parce qu’il avait écrit un article sur la torture dans les prisons tunisiennes.

L’Egypte a fait subir le même traitement à Huweida Taha, une journaliste, pour avoir « publié de fausses informations salissant l’image du pays », à cause de son travail sur la torture ; de même que le bloger Karim Amer et l’éditeur de journaux Ibrahim Issa pour « insultes au président ».

A Barhein, des militants pour les droits de l’homme ont été harcelés sur le plan de la sécurité et du droit, pour avoir « diffamé » la famille royale et le journaliste Osman Mirghani emprisonné pour avoir critiqué le ministre de la justice, grâce à un article du code pénal qui permet au ministère public d’agir et prendre toute les mesures de protection de l’ordre public, article également utilisé pour suspendre une publication ou un journal indépendant.

Les prisonniers d’opinion et les défenseurs des droits humains et civiques dans le monde arabe ont un besoin brûlant de la solidarité et de l’appui de la société civile dans son ensemble.

Les gouvernements engagés par des accords de coopération dans leurs relations avec les gouvernements de la région, l’Union Européenne et les Etats-Unis en particulier, devraient placer la question des prisonniers d’opinion en tête de la liste de leurs priorités.

Ces violations continueront à se multiplier aussi longtemps que les gouvernements de la région manqueront de la volonté politique d’élargir les espaces nécessaires à l’expression de la liberté d’opinion et d’expression, sans laquelle n’existera pas la possibilité d’un développement vraiment démocratique.

14 juillet 2007 - Miftah - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.miftah.org/Display.cfm?D...
Traduction : Anne Ramaré


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