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Israël : les effets négatifs de l’urbanisation forcée des Bédouins

jeudi 19 juillet 2007 - 06h:39

IRIN

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Beersheba - Désert du Néguev. Les Bédouins du désert sud du Néguev sont depuis toujours opposés au gouvernement central et depuis des centaines d’années ils ont essayé de maintenir un mode de vie d’auto-gouvernance basé sur des traditions tribales.

Mais, pendant les 60 années depuis la fondation de l’état d’Israël, ils ont subi un processus rapide d’urbanisation mené par l’état et leur mode de vie a changé dramatiquement : certains disent que c’est pour le pire.

« Dans beaucoup de cas, le cadre social a été détruit par l’urbanisation » dit Kher al-Baz, un travailleur social bédouin et un expert en planning social.

« Ce processus a produit des phénomènes négatifs tels que la criminalité, le vandalisme, les drogues et un taux de chômage élevé ».

Historique

Les Bédouins du sud peuvent se diviser en deux groupes. Environ 120.000 (60%) d’entre eux vivent dans des townships érigés par l’état entre 1968 et les années 80. Les autres 80.00 vivent dans 45 villages que l’état ne reconnaît pas et qui s’étendent dans tout le nord du désert du Néguev.

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Kher al-Baz est travailleur social et expert en planification : Photo : Shabtai Gold/IRIN

Ces villages « illégaux » selon Israël, se situent sur « des terres de l’état » et ce, malgré le fait que selon les Bédouins la plupart de ces villages existent depuis des siècles et que certains ont même été fondés par l’état naissant en 1950.

Israël dit qu’elle veut urbaniser les Bédouins ou du moins les concentrer et les « établir ». Le premier township bédouin de Tel Sheva a été construit en 1968, deux ans après la révocation de la loi martiale sur les Arabes israéliens.

« Le processus involontaire et contre nature n’a pas été planifié avec les Bédouins » dit Al-Baz, un habitant de Tel Sheva. Il a donné comme exemple l’habitation pour laquelle l’état n’a pas pris en compte l’accent que les Bédouins mettent sur l’unité familiale.

« Les premières maisons de Tel Sheva étaient trop petites pour les Bédouins dont les familles se composaient peut-être jusqu’à 14 membres. Elles sont restées vides pendant 15 ans. Après que l’état ait rajouté quelques 200 m2 aux maisons, les gens ont emménagé ».

Les villages non-reconnus n’ont ni accès aux permis de construire, ni à l’électricité ni aux autres services. L’état dit qu’il peut résoudre les problèmes par la concertation. Mais entre temps, l’état continue à démolir les maisons.

Des gens comme Hussein al-Rafay’a, président du Conseil Régional des Villages Non-reconnus (une organisation non gouvernementale) dit qu’en plus de leur lien avec les terres historiques, la situation dans les townships est la raison principale pour laquelle les Bédouins sont réticents à y emménager.

Hussein allègue que le taux de criminalité est parmi le pire du pays et un pourcentage bien trop élevé d’habitants se retrouve en prison.

« De plus, la police entre rarement [dans les townships]. Ils ne font pas de patrouilles. Quand ils détruisent des maisons, ils disent qu’ils font respecter la loi, mais ils ne font rien à l’intérieur des townships pour prévenir la criminalité ».

Un porte-parole de la police dit que les forces ont travaillé avec les Bédouins comme avec tous les autres secteurs en Israël. Il dit que la police a dirigé divers programmes dans les townships y compris des groupes communautaires.

Chômage

Les observateurs et les habitants disent que le problème du chômage est directement lié à la façon avec laquelle l’état a construit les townships étant donné que ceux-ci n’ont pour ainsi dire pas de zones commerciales ou industrielles.

« J’ai une zone industrielle sans électricité, sans réseau téléphonique » dit Said al-Khroumi, le dirigeant du conseil de Segev Shalom, un des townships.

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"La police entre rarement. Il n’y a pas de patrouille. quand ils détruisent les maisons, ils disent que c’est pour appliquer la loi, mais ils n’interviennent pas dans les quartiers pour prévenir les crimes." - Hussein al-Rafay’a - Photo : Shabtai Gold/IRIN

Une porte-parole du « Israel Lands Administration » (ILA) dit que l’état était en train de construire des zones commerciales et industrielles. Mais Erez Tzfadia du Collège Académique Sapir raconte que cela fait 40 ans qu’Israël est en train de construire ces zones.

Tzfadia dit aussi que les Bédouins ont perdu leurs sources de revenus agricoles en emménageant dans les townships.

« Les townships ne sont pas une réussite » conclut Al-Khroumi, en blâmant l’état pour ne pas avoir investi dans l’éducation et les infrastructures.

En ce qui concerne l’éducation, raconte-t-il, la preuve se trouve juste à l’extérieur de son bureau où des caravanes sont utilisées comme salles de classe étant donné que suite à la croissance naturelle, les écoles construites par l’état sont trop petites. Le surpeuplement est déjà endémique et affecte les études et les possibilités d’emplois futurs.

« Prenez n’importe quel jeune couple ici. Au moins l’un des deux est au chômage » dit-il.

Les femmes sont les plus touchées

Le manque d’emplois dans les townships touche principalement les femmes étant donné qu’elles ne peuvent pas voyager en dehors des townships pour travailler et ce, principalement à cause des contraintes sociales et entre autre le manque de transport en commun.

Environ 87% des femmes bédouines du Néguev sont au chômage selon les organisations des droits humains, et la plupart des femmes ne terminent pas l’école.

« L’état ne renforce pas la loi sur l’éducation afin de s’assurer que les filles restent à l’école » dit Amal A-Sana d’AJEEC, une ONG qui s’occupe de la justice sociale. « De la même façon que l’état ne prend aucune mesure contre la polygamie » ajoute-t-elle.

A-Sana raconte aussi que le processus d’urbanisation a particulièrement touché les femmes étant donné qu’elles ont perdu leurs responsabilités et leur liberté de mouvement établies de longue date au sein de la communauté tribale.

« Les femmes avaient la responsabilité de l’eau, de la tente. Elles avaient un rôle social et politique. Tout cela a été perdu avec l’urbanisation. Ma mère est passée d’une vie dans l’espace à celle de se retrouver enfermée entre quatre murs. »

Elle dit que des conflits inter familiaux surviennent dans beaucoup de cas à la suite du fossé crée entre générations.

Les plans du gouvernement

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Lycée à Segev Shalom. Les enfants étudient dans des caravanes car les écoles construites par l’état sont trop petites - Photo : Shabtai Gold/IRIN

Le 15 juillet, le cabinet israélien a fondé le « Beduin Negev Settlement Authority » pour résoudre les revendications territoriales et améliorer les conditions de vie des Bédouins - du moins dans les townships.

Le gouvernement a promis de l’aide dans le domaine de l’intégration du travail, une coordination des services éducatifs et sociaux et a dit qu’il allait améliorer les bâtiments et les infrastructures.

« Alors qu’il y a encore du travail à faire, il y a quelques progrès et le gouvernement va continuer à prendre les mesures nécessaires afin de rectifier la situation » a déclaré le bureau du premier ministre Ehud Olmert à IRIN.



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17 juillet 2007 - IRIN - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.irinnews.org/Report.aspx...
Traduction : Ana Cléja


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