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Irak : d’échec en échec

mercredi 25 avril 2007 - 05h:16

Abir Taleb - Al Ahram

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La violence redouble de plus belle à quelques jours de la conférence internationale prévue les 3 et 4 mai à Charm Al-Cheikh.

Le 14 février dernier, le gouvernement irakien lançait un nouveau plan de sécurité à Bagdad. Depuis, pratiquement pas un jour n’est passé sans attentats, violences et tueries. Cette semaine, la violence a frappé fort dans différentes régions du pays, où 21 personnes, dont 4 policiers, ont été tuées lundi, 45 la veille, sans oublier la vague d’attentats qui a fait 190 morts mercredi dernier à Bagdad. En fait, le nombre moyen de morts par jour n’a pas baissé. Selon l’Onu, il est de l’ordre de 120. Un chiffre effrayant qui témoigne d’une réalité complexe. Guerre civile ? Violences confessionnelles ? Résistance contre l’occupation ?

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Deux nouvelles bombes ont explosé mardi 2’ avril sur un parking en face de l’ambassade d’Iran au centre de Bagdad, près de la zone verte ultraprotégée - Photo : AFP/Joseph Eid

Chaque partie se plaît à décrire la situation actuelle selon les vues de son propre camp. A l’exemple du premier ministre irakien, Nouri Al-Maliki, qui en visite au Caire dans le cadre d’une tournée régionale pour des pourparlers préparatoires à la conférence internationale sur l’Irak prévue les 3 et 4 mai à Charm Al-Cheikh, a affirmé dimanche : « L’Irak n’est pas le théâtre d’une guerre confessionnelle. Ce qui arrive est (dû) aux activités d’Al-Qaëda ».

Des déclarations peu ou pas du tout convaincantes. M. Al-Maliki a aussi estimé que grâce au plan de sécurité mis en place à Bagdad, la violence était largement maîtrisée.

D’après lui, les rebelles sont contraints de recourir aux voitures piégées car ils n’osent plus affronter les forces de sécurité. Cependant, quand bien même les affirmations d’Al-Maliki seront justes, le recours aux voitures piégées est loin d’assurer la sécurité et ne signifie en aucun cas que le plan a réussi.

Polémique autour du mur d’Al-Adhamiyah

Autre faille dans les déclarations du premier ministre irakien, ce dernier a réaffirmé qu’il n’y avait pas en Irak une guerre confessionnelle. Or, la construction par les forces américaines d’un mur dans un quartier sunnite de Bagdad, censé protéger sa population contre les violences communautaires, est le témoin flagrant de l’existence d’un réel problème entre sunnites et chiites. Certes, le premier ministre irakien s’est fortement opposé à la construction du mur d’Al-Adhamiyah, l’une des dernières enclaves sunnites dans l’est chiite de Bagdad, il a même annoncé que sa construction allait s’arrêter.

Mais pour l’heure, aucune décision n’a été prise à ce propos et la polémique sur la construction du mur continue. Au lendemain des déclarations d’Al-Maliki, les militaires américains se sont montrés prudents, annonçant, lundi, la poursuite du « dialogue » avec le gouvernement irakien « en vue d’établir des mesures de sécurité efficaces et appropriées ». « Le gouvernement irakien et les forces multinationales sont tout à fait d’accord sur la nécessité de protéger la population irakienne. La manière d’y parvenir est toujours discutée et nous allons poursuivre le dialogue », a dit le lieutenant-colonel américain Christopher Garver. Ce qui laisse entendre que les forces américaines ne sont pas prêtes de revenir sur leur décision.

Auparavant, M. Al-Maliki avait mis un peu d’eau dans son vin en disant que le but de la construction du mur d’Adhamiyah n’est pas d’isoler le quartier mais de le sécuriser, ajoutant avoir demandé que d’autres moyens de protection d’Adhamiyah soient trouvés. Le 10 avril, les forces américaines ont commencé à ériger ce mur de 5 km. Selon l’armée américaine, il est destiné à empêcher d’éventuels escadrons de la mort chiites de commettre des attentats pour faire fuir les sunnites du quartier, mais aussi les insurgés sunnites d’utiliser cette poche comme base pour commettre des attaques dans les quartiers chiites. Pour tenter de lutter contre la violence, l’armée américaine avait fait savoir dimanche qu’elle multipliait la construction, dans plusieurs zones de la capitale, de murs de protection dont le but n’est « pas de diviser la ville entre les différentes communautés ».

Un argument rejeté par la population irakienne, mais aussi par de nombreux députés. Certains ont même comparé ce mur à l’ancien Mur de Berlin. « Eriger un mur autour d’Adhamiyah est le summum de l’échec et un pas erroné qui viole des droits de l’homme », a critiqué le député kurde Mahmoud Osmane. Tout en ajoutant que « c’est un signe évident que la politique des Etats-Unis et de notre gouvernement a échoué à assurer la sécurité ». Pour sa part, le chef du groupe parlementaire du leader radical chiite Moqtada Sadr, Nassar Al-Roubaïe, a accusé les forces américaines de construire en Irak un « Mur de Berlin », estimant que le « problème de sécurité n’est pas le résultat de tensions communautaires entre Irakiens, mais la conséquence de l’influence étrangère ».

Al-Adhamiyah n’est pas le seul quartier à être entouré de murs, dont l’efficacité contre les attaques n’a pas pu être démontrée jusqu’à présent. Ainsi, la zone verte ultra protégée du centre de Bagdad, qui abrite notamment l’ambassade américaine et de nombreux ministères irakiens, délimitée par des murs en béton et surveillée par des gardes armés, est la cible quotidienne d’attaques au mortier. Et, le 12 avril, un kamikaze s’est fait exploser dans la cafétéria du Parlement, au c ?ur même de cette zone.

Quoi qu’il en soit, la construction de ce mur est tout simplement la preuve de l’échec cuisant des politiques des Etats-Unis et du gouvernement iraqien. Et, plutôt que de sécuriser Al-Adhamiyah, il risque d’attiser les luttes confessionnelles en imposant de facto une séparation entre les quartiers chiites et sunnites.

24 avril 2007 - Al Ahram hebdo - Vous pouvez consulter cet article à :
http://hebdo.ahram.org.eg/arab/ahra...


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