16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Egypte : le sectarisme n’est pas la solution

jeudi 27 octobre 2011 - 06h:08

Samir Sobhi - Al Ahram

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


Au lieu de former leurs propres partis, et pour mieux protéger leurs intérêts dans une société multiculturelle, les Coptes ont besoin de s’intégrer dans la politique égyptienne à tous les niveaux, écrit Samir Sobhi.

JPEG - 3.8 ko
Samir Sobhi

Lorsque l’on exige la démocratie après des années de répression, on demande qu’une boîte de Pandore soit ouverte. Tout ce que nous avons gardé caché pendant des années va apparaître, toutes nos défaillances vont être mises au grand jour et tous nos préjugés mis à l’épreuve.

Il n’y a rien de mal à cela, car c’est la seule voie possible.

Pour que la cicatrisation puisse commencer, nous devons regarder profondément dans nos âmes, nous devons examiner nos blessures et si nécessaire utiliser le scalpel pour procéder à une opération.

L’uteur et chercheur Ammar Ali Hassan affirme que les citoyens et les autorités ont besoin de changer la façon dont ils interagissent. Les autorités ne peuvent pas utiliser la tyrannie comme mode de fonctionnement par défaut, et le public ne peut renoncer à son droit à la transparence et à la responsabilité.

Pour rendre les choses meilleures, nous avons tous besoin de changer. Nous devons nous considérer comme responsables de tout ce qui arrive autour de nous. Nous devons exiger d’être consultés. Nous devons faire entendre nos voix, car le silence est tout aussi accablant que les pires actes de transgression.

Dans les temps pharaoniques, le Pharaon était considéré comme un demi-dieu. Dans un monde agricole au régime centralisé dans l’antiquité, cela pouvait avoir été acceptable. Cela a pu faciliter le fonctionnement des services communaux, tels que l’irrigation et la construction. Mais dans une société de plus en plus numérisée, imprégnée de mondialisme et où les modes de vie convergent, le despotisme est de plus en plus anachronique et c’est ce que considère le public.

Cela impose une nouvelle façon d’aborder la question du bien-être des Coptes et de l’égalité des droits dans ce pays. Pour ma part, je souhaite voir une situation où les Coptes s’impliquent activement dans les affaires publiques, et pas nécessairement par des rassemblements coptes ou sous l’impulsion de l’église. Lorsque les Coptes se tourner vers l’église pour intercéder auprès de l’État en leur nom, j’ai l’impression que quelque chose a dû très mal aller.

Certains disent que les Coptes, certes une minorité dans ce pays, ont besoin de former un parti pour défendre leurs droits. D’autres disent que toutes les partis sont ouverts aux Coptes, qui ne doivent pas se mettre à côté du reste de la nation.

Magdi Khalil, chercheur aux États-Unis, s’est penché sur les problèmes de la communauté copte d’Égypte. Il estimé que l’idée d’un parti copte est lourde de risques. Au lieu de promouvoir les droits des Coptes, elle peut enflammer les sentiments sectaires d’une façon préjudiciable aux Coptes et au reste de la nation.

Selon Khalil, l’intégration dans l’activité politique est la clé de la solution. Il rappelle que les Coptes ont toujours intégré les partis de l’ensemble du spectre politique. En début du 20ème siècle, les écrivains coptes écrivaient régulièrement pour les journaux Al-Liwaa de Mustafa Kamel, Al-Garida de Lotfi El-Sayed, et Al-Moayyed d’Ali Youssef.

En 1908, Akhnoukh Fanous Rophael qui avait suivi des études à Beyrouth a formé un parti copte. Le Parti égyptien, comme il l’appelait, n’a pas réussi à survivre, car les Coptes ont estimé que leur cause était mieux servie par leur activité dans les partis non sectaires. Des années plus tard, Ester et Gamil Rophael, les enfants Akhnoukh, sont devenu des membres actifs du parti multi-confessionnel et anti-britannique, le Wafd.

En Egypte comme ailleurs, les partis minoritaires finissent échoués à la périphérie de la politique. Ces partis peuvent survivre dans des systèmes qui donnent des quotas à des minorités, mais ils ne deviennent jamais des acteurs majeurs sur la scène politique. IJ’ai donc la conviction que les Coptes, pour leur propre bénéfice, devrait s’impliquer dans les parties multi-confessionnels de leur choix, plutôt que d’essayer d’avoir leur propre parti.

Pensez à la scène politique américaine. L’Amérique est la terre de nombreuses minorités, et les minorités jouent un rôle actif dans l’élaboration de sa politique. Les Juifs, qui représentent au plus 2% de la population, contrôlent près de 13% du Sénat. Les Noirs et les Latino-américains, chacune représentant 15% de la population, n’ont pas leurs propres partis mais sont actifs dans tout le spectre politique.

Pour qu’une minorité prospère, elle doit rester liée à la cause nationale, être généralement éclairée et tolérante dans ses vues. Ce n’est pas les messages qui se voit sur ​​les chaînes satellitaires coptes, car beaucoup sont dogmatiques et franchement mauvais dans l’accent et le style. Ces chaînes, tout en prétendant parler au nom des Coptes, nuisent souvent à leur cause.

Nous avons besoin que les Coptes fassent partie intégrante de la vie de ce pays. Nous avons besoin qu’ils inspirent et enrichissent notre société multiculturelle, et qu’ils ne s’enferment pas dans leur coquille et souffrent alors des conséquences de l’isolement. C’est le message que les médias coptes doivent envoyer à la population, s’il y a effectivement une nécessité de médias spécifiquement coptes.

Franchement, nous avons besoin de mieux connaître les Coptes, à commencer par leur nombre. Sous l’ancien régime, personne n’a été autorisé à publier des statistiques exactes sur la population copte. Par conséquent, nous ne savons pas si les Coptes sont 10 % de la population comme il est communément affirmé, ou 20%, comme Mohamed Hassanein Heykal [très ancien et très respecté journaliste égyptien - N.d.T] l’a récemment suggéré.

Depuis Wisa Wassef, qui était un ami proche de Mustafa Kamel, les Coptes ont fait partie de la scène publique. Il serait bon de voir à nouveau les coptes affluer pour rejoindre les partis politiques, tels que le parti des Egyptiens libres de Naguib Sawiris et celui des sociaux-démocrates de Mohamed Aboul-Ghar.

Durant ces 30 dernières années, et même auparavant, l’Etat a choisi de parler à l’Eglise au lieu d’aborder la communauté copte. Cela a été un moyen de réduire les préoccupations coptes à des questions purement religieuses. Maintenant, les choses changent, et les Coptes doivent commencer à se faire entendre, et pas seulement à travers l’Eglise et ses dirigeants.

L’urgence d’une réaction copte est clair dans le fait que près de 1500 cas d’agressions contre des Coptes ont été enregistrées au cours des 40 dernières années. Magdi Khalil suggère même que les coptes demandent aux Nations Unies la mise en place d’un comité d’enquête sur ces attentats. Il ne fait aucun doute que dans presque tous les cas, les auteurs ont été relâchés.

Au sein de l’Eglise, une réforme est nécessaire. les évêques qui suivre la ligne officielle sans aucun recul doivent être changés, et un état d’esprit solidaire doit dominer dans les rangs du clergé.

L’historien Hussein Fawzi a un jour déclaré que le plus notable au sujet du peuple égyptien est que, même quand ils ont été envahis et sous occupation, ils ont réussi à conserver leur esprit et leur identité, obligeant les occupants à s’adapter à leur façon d’être. « Refusant de se fondre avec leurs envahisseurs et exploiteurs, les agriculteurs et les artisans [égyptiens] sont restés responsables de la civilisation, amateurs d’art et mécènes de la science. »

L’analyse de Fawzi est vrai pour tout le monde dans ce pays, en particulier les Coptes.

* Samir Sobhi est un des plus anciens journalistes du journal Al Ahram

20 octobre 2011 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2011/106...
Traduction : Naguib


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.