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NGOsisation

dimanche 23 janvier 2011 - 05h:30

Raed

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Comment ils veulent tuer la classe révolutionnaire ?
Depuis l’arrivée de l’autorité, la société palestinienne se divise en plusieurs classes sociales.

- La classe de grands fonctionnaires " ou bien les mercenaires" de l’autorité très riche, cette richesse vient normalement à cause d’une longue histoire de corruption. Ces fonctionnaires possèdent maintenant des fortunes et des entreprises dans les pays étrangers, car pour eux la situation n’est pas stable en Palestine et c’est risqué . L’autorité nous parle des fois d’une campagne anti-corruption mais ce n’est toujours qu’une histoire de collision d’intérêts entre les différents corrompus.

- La classe de fonctionnaires normaux. Avant l’arrivée de Fayad, "premier ministre depuis 2008", ces fonctionnaires touchaient de très mauvais salaires et ils protestaient des fois, mais aujourd’hui les salaires sont relativement meilleurs, sauf que ces gens se trouvent obligés d’emprunter de l’argent aux banquiers, car il faut acheter sa belle voiture et construire sa belle maison "puisque la banque est très gentil avec eux !". De cette façon là, on ne pense qu’à rembourser les banques, sans aucune protestation ; même si l’on est plus pauvre qu’avant. C’est la première leçon de l’économie libérale de Fayad "augmentons les impôts, améliorons les salaires, facilitons les conditions des prêts bancaires. Conséquence : les Fonctionnaires ne pensent plus et ils n’ont plus d’intelligence collective.

- Les ouvriers, les paysans, chauffeurs, etc., ces gens là souffrent beaucoup. Leur condition de vie change tout le temps, dépend de la situation politique, ils n’ont pas de revenu stable, ils courent tout le temps pour pouvoir assurer de quoi manger à leurs familles, ils leur manque une organisation. Le syndicat qui représente les ouvriers par exemple est dirigé par un groupe nommé par les partis politiques, selon un quota qui convient à tout le monde sauf évidemment aux ouvriers "nos syndicalistes sont payés par leurs patrons".

En arabe et en anglais on les appelle NGO’S, en français ONG, mais nous avons inventé un nouveau mot NGOSisation. En Palestine on ne fait pas la différence entre les ONG, les organisations, les associations et coopératives, ce sont les mêmes puisqu’elles ont les mêmes objectifs "évidemment pas toutes mais la majorités". Ces objectifs sont liés avec la présence de beaucoup d’organisations étrangères qui sont prêtes à financer les ONGS Palestiniennes. Elles sont capables de payer des millions de dollars pour les salaires des fonctionnaires qui deviennent une classe sociale assez riche.

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Visite des travaux d’extension des réseaux d’assainissement à Rafah par le Consul Général de France à Jérusalem [au centre, les mains dans les poches] - Peut-on imaginer que l’aide fournie par les principales agences et NGOs se fasse sans objectifs et contreparties politiques ?

Elles sont aussi prêtes à financer des projets culturels, sportifs , projets de construction de rues, des écoles et tous les projets qu’on peut imaginer, sauf les projets qui rendent les ONGS et la société Palestinienne indépendantes de leurs financeurs. Les organisations américaines par exemple financent les projets de construction de très belles routes, (merci aux américains pour l’asphalte "en arabe le mots asphalte est le Zéfte" et le Zéfte est aussi une insulte) sans leur demander c’est quoi le prix ?! Ce qui est dangereux c’est que ces ONG ont été fondées par les partis politiques palestiniens, surtout les partis de gauche.

Chaque parti a ses ONG, les directeurs, ses secrétaires et les salariés sont adhérents au parti. On entend parfois deux points de vue politiques contradictoires, déclarés par deux responsables du même parti, le premier pense à la politique des financeurs "il ne faut pas les fâcher", l’autre c’est sa culture et son éducation révolutionnaire qui s’expriment. Il arrive des fois qu’un directeur d’ONG quitte son parti en fondant un nouveau parti "démocratique, socialiste, libéral, national, international, respecte les droit des femmes, etc." Sa base populaire est ses salariés.

Le pire c’est quand ils organisent des manifs contre le mur ou contre la colonisation, ou bien comme c’était le cas cette année quand la cueillette des olives devient à la mode. Les responsables ou les directeurs ou les chefs "toujours avec leurs belles secrétaires" se précipitent à participer à la cueillette des olives et ils arrivent avec les journalistes, se font prendre en photos, font des discoures très vite et partent 5 minutes après, avant que ça ne soit dangereux. En gros c’est une maladie en Palestine. Et certaines ONG ne sont pas connues en Palestine, car leurs discours s’adressent aux européens et aux américains, "les financeurs". Je n’hésite pas à dire que beaucoup d’associations militantes en Europe continuent de collaborer avec elles ???

Peut être qu’il est nécessaire de financer des projets en Palestine, si ces financements nous aident à obtenir l’indépendance économique, mais si les aides sont là pour détourner la société palestinienne d’une société militante vers une société mercenaire, c’est refusé.

Depuis Oslo (14 ans) la Palestine a reçu des milliards de dollars mais où en sommes nous de l’indépendance ? Ou peut-être l’histoire suivante est vraie :

un américain réserve une chambre à l’hôtel de Ramallah, il donne 100 dollars au gars de l’hôtel, le gars les donne au boucher à qui il doit de l’argent, le boucher doit de l’argent à un éleveur de vaches, l’éleveur doit 100 dollars à un commerçant de granulés alimentaires pour vaches, il lui donne les 100 dollars, le commerçant va vite les donner à une pute à qui il doit 100 dollars, elle va rapidement pour rembourser le gars de hôtel de Ramallah, mais l’américain n’a pas aimé la chambre donc le gars redonne les 100 dollars à l’américain.

L’autre classe qui est la majorité silencieuse est la même classe qui révolutionnait en Palestine tout le temps et la même qui a révolutionné en Tunisie. Ce sont les ouvriers, les étudiants, les paysans, les petits salariés, les associations et les coopératives qui militent et qui résistent, mais cette classe n’est pas tranquille de ceux qui s’installent en Palestine pour opprimer toute initiative de résistance.

Prenons l’exemple de la coopérative Al Sanabel, qui fait partie de la société Palestinienne. Elle est ciblée par plusieurs organisations, qui proposent de financer conditionnellement les activités de la coopérative. Évidemment la coopérative refuse car ses objectifs sont en contradiction avec ceux de ces organisations.

Nous ne sommes pas les seuls, nous sommes la Majorité des Palestiniens, qui veulent vivre en dignité, libres, qui répondent aux demandes des Palestiniens et pas aux demandes des financeurs, qui compte sur une solidarité populaire internationale.

Pour aider notre combat et notre résistance soyez solidaires avec nous, parce que c’est nous qui avons la force et les autres ne font que profiter de notre malheur.

* Raed est agriculteur et vit dans la région d’Hébron

20 janvier 2011 - Communiqué par l’auteur


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