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Gaza : le Jihad islamique reste une organisation populaire

jeudi 23 mai 2013 - 14h:25

Asmaa al-Ghoul

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Le 9 Mars 2012, les avions de guerre des forces d’occupation ont assassiné Zouhir al-Qaisi, le secrétaire général des Comités de résistance populaire (CRP), en envoyant un missile sa voiture dans le quartier de Tel al-Hawa, à l’ouest de la ville de Gaza. Cette situation a poussé le mouvement du Jihad islamique palestinien (JIP) à lancer à lui seul des attaques contre Israël pendant quatre jours.

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Une femme tient un exemplaire du Coran lors d’un rassemblement dans la ville de Gaza, le 4 octobre 2012, pour marquer le 25e anniversaire de la fondation du mouvement du Jihad islamique - Photo : Reuters/Suhaib Salem

Au cours de la riposte, les Brigades d’Al-Quds (Branche militaire du JIP) ont lancé environ 200 missiles sur Israël. Elles ont également menacé de tirer des roquettes pouvant atteindre des villes au-delà d’Ashdod, c’est-à-dire à 35km de Gaza si l’agression venait à prendre de l’ampleur.

Toutefois, à la lumière de « l’équilibre de la terreur » comme l’ont décrit les analystes à l’époque et qui a prévalu suite à l’assassinat, le 30 avril 2013, de Haitham al-Mislah, ainsi que les raids israéliens qui ont suivi, une question pertinente s’impose : le JIP est-il capable de mener tout seul une guerre contre Israël ?

La guerre pourrait-elle éventuellement s’étendre pour impliquer le Hezbollah au Liban, l’Iran et la Syrie. Ou bien, le mouvement recourra-t-il à l’intimidation politique, d’autant plus qu’il avait déjà fait part de son intention de participer aux élections du Conseil National de l’Organisation de Libération de la Palestine et le conseil local ?

La guerre à venir

Al-Monitor est allé à la rencontre de Khaled al-Batesh, un responsable du JIP. Dans son bureau, al-Batesh estime qu’une prochaine guerre est inévitable car « à ce stade, les sionistes cherchent à se débarrasser d’un lourd fardeau, dur à porter depuis les résultats de la dernière guerre de novembre 2012, lorsque Tel Aviv était prise sous les tirs de roquettes de la résistance. »

Al-Batesh a par ailleurs supposé que dans sa prochaine agression, Israël tenterait de changer l’équation et de semer la confusion dans l’arène palestinienne en envenimant la situation et en menaçant l’Iran, la Syrie et le Hezbollah au Liban.

Il précise : « La situation dans la Bande de Gaza peut facilement s’enflammer tant que l’ennemi croit qu’il peut en sortir victorieux. Cependant, il ignore que les choses ne seront pas aussi faciles qu’elles le paraissent. La résistance sera particulièrement violente et féroce dans la protection des citoyens et elle gagnera la bataille tout en déjouant les plans de l’ennemi. Frapper l’Iran ne sera pas un jeu d’enfant. Israël et les États-Unis auront à payer le prix d’une telle action, et cette fois, ce ne sera pas comme la guerre sur Gaza qui a dévoilé la faiblesse d’une communauté internationale qui justifiait son mutisme par le prétexte d’une guerre contre le terrorisme. »

Par ailleurs, notre interlocuteur s’est dit convaincu que Gaza sera probablement impliquée dans une future agression du moment qu’Israël ambitionne de redorer son image, d’éliminer les forces même limitées des organisations palestiniennes, d’empêcher davantage de tirs de roquettes en provenance de Gaza, et d’imposer de nouvelles conditions relatives à la question des colonies, tout cela dans le but de prouver à l’opinion publique israélienne que son gouvernement est puissant et capable d’imposer ses propres conditions.

Les analyses de Batesh ne sont pourtant pas partagées par Hassan Abdo. Pour cet analyste politique du Centre Palestinien de Recherche et d’Etudes, le récent assassinat a violé la trêve qui avait été négociée sous les auspices de Égypte. Cette violation a cependant été un acte isolé qui ne s’inscrivait pas dans le cadre d’une politique générale israélienne. Abdo a ajouté que selon les dernières déclarations du Ministre Israélien de la Défense, Moshe Ya’alon, ce dernier veut partir en guerre ; une position qui reflète également l’état d’esprit de l’extrême droite israélienne dont il est issu.

En outre, Abdo nous a confirmé que si les forces de l’occupation devaient poursuivre la politique d’assassinats, le JIP ne resterait certainement pas les bras croisés et inactif car le mouvement est amplement capable de mener tout seul une bataille contre Israël, comme cela a été le cas lors de l’assassinat de Qaisi. Le mouvement avait continué à marteler Israël, l’obligeant à se plier à sa volonté. L’analyste a ajouté que la trêve actuelle implique de nombreuses parties et c’est pourquoi, le JIP ne veut pas être perçu comme celui qui cherche à saboter cette situation, au contraire, le mouvement veut apporter sa contribution en s’accordant à une vision collective.

Al-Monitor s’est également entretenu avec Khoder Habib, un responsable au sein du JIP qui a souligné que le mouvement n’est pas tenté par une réponse unilatérale dans le cas où il y aurait une nouvelle agression : « Si la trêve n’est pas respectée et par voie de conséquence violée, le mouvement voudra que la riposte soit préparée dans le cadre d’une seule initiative palestinienne, et ces représailles communes seront plus puissantes et obtiendront un résultat plus efficace qu’une action en solo. »

Il a également ajouté que le JIP se considère partie prenante des nombreuses organisationss palestiniennes et des branches de la résistance.

Interrogé sur les éléments que le mouvement juge comme rompant la trêve, Habib répond : « Cela dépend de la bataille et ce sont nos frères sur le terrain qui détermineront ces éléments, en consultation avec le reste des factions de la résistance Palestinienne. »

Et d’ajouter : « Le Mouvement du Jihad tient à la trêve et la respecte, bien que l’ennemi l’ait auparavant violée à maintes reprises. Notre engagement reflète un engagement envers le meilleur intérêt qui soit pour notre peuple. Toutefois, si jamais Israël continue ses transgressions et ses agressions, la trêve sera interrompue et la résistance se trouvera confrontée à un sérieux défi et n’aura d’autre choix que d’emprunter la voie représailles. »

Non aux Accords d’Oslo

Selon le site Internet du PIJ, les principes généraux du mouvement se résument à : « libérer la Palestine de la rivière à la mer, car c’est la terre des musulmans et des Arabes. Pas de compromis sur un pouce de cette terre, et l’existence de l’entité sioniste est nulle et interdite. Selon la charia, il est interdit de reconnaître un seul bout de l’entité sioniste. Tous les projets d’accord qui avalisent l’existence sioniste en Palestine, ou cherchent à compromettre nos droits nationaux, sont rejetés et interdits ».

C’est ce qui explique la position du JIP, lorsqu’il refuse de prendre part à des élections législatives et présidentielle pour l’Autorité nationale palestinienne, dans le cadre des Accords d’Oslo de 1993. Ainsi, Abdo estime qu’il est peu probable que le mouvement soit un jour impliqué dans n’importe quel processus politique sous occupation israélienne. Il ajoute que, selon ce qu’il constate, le mouvement considère comme corrompues les autorités intermédiaires formées sous l’occupation. Comme celles-ci ont été créés sous l’occupation, elles servent par conséquent les intérêts de l’occupant et sapent le projet de libération de la Palestine.

Habib, d’autre part, déclare que le JIP a une position claire sur les élections législatives et présidentielles, et qu’il n’y prendra pas part. Il a la même position sur les Accords d’Oslo et ses implications. C’est pourquoi le mouvement a refusé de participer aux élections de 1996 et 2006.

« L’équation n’a pas encore changé. Les accords d’Oslo sont toujours la référence et nous continuons à les rejeter. Nous les voyons comme une déviation de ce qui doit rester la bonne direction pour tous les Palestiniens : résister et libérer toute la terre », dit-il encore.

Dans son livre « Le Mouvement du Jihad islamique en Palestine : Faits et Attitude », publié en 2007, Ramadan Shalah, le secrétaire général du Jihad Islamique Palestinien, a déclaré que la principale raison pour avoir refusé de participer aux élections, c’est qu’elles ont conduit à la détérioration de la situation des Palestiniens.

« Nous sommes un peuple qui vit sous l’occupation. Nous vivons ce qui est maintenant connu comme une phase de notre libération nationale de l’emprise de l’occupation. Dans une telle phase et dans de telles circonstances, aucune action ne doit prendre le pas sur le djihad et la résistance ... Nous nous demandons quelles sont les répercussions des élections sur la cause et le peuple palestinien, que ce soit en interne, politiquement, socialement et au niveau de la sécurité ? Je crois que tout le monde est d’accord que la situation palestinienne actuelle est mauvaise etque nous sommes dans une situation sans précédent ... Où est le Conseil législatif ? Un quart de ses membres sont dans les prisons israéliennes. Cela ne prouve-t-il pas que ce processus démocratique sous occupation sert de piège pour que nous nous éloignions de nos priorités, lesquelles sont avant tout la lutte contre l’ennemi ? » écrit Shalah dans son livre.

La popularité du Jihad

A la lumière de ces positions politiques de plus en plus affirmées, et en raison de la récente guerre contre la bande de Gaza, la popularité du JIP a augmenté à un tel point que certains adversaires des partis islamiques en ont fait l’éloge, comparé à d’autres mouvements affiliés à l’Islam politique et qui sont impliqués dans le pouvoir. Le JIP a commencé à gagner à son tour du terrain, après que le Hamas ait été le mouvement le plus populaire pendant de longues années, avant qu’il n’accède aux postes de responsabilités.

Habib est persuadé que la popularité croissante du mouvement est principalement due au fait que le mouvement est totalement engagé dans le sens de la résistance, sans considérer d’autres options. « Cela représente une menace stratégique pour l’entité sioniste. C’est tellement vrai que le mouvement a été pris pour cible par les forces d’occupation, plus que les autres organisations », dit-il.

Batesh, en revanche, estime que la popularité du mouvement est le résultat de ses positions claires et de son refus de prendre part à un accord avec les forces d’occupation. Et aussi parce qu’il n’a pas été impliqué dans l’effusion de sang palestinien.

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* Asma al-Ghoul est journaliste et écrivain, du camp de réfugiés de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

De la même auteure :

- Le Jihad islamique n’acceptera jamais un Etat palestinien limité aux frontières de 1967 - 16 mai 2013
- L’impact psychologique de la guerre sur les enfants de Gaza - 5 mai 2013
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7 mai 2013- al-Monitor - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.al-monitor.com/pulse/ori...
Traduction : Info-Palestine.eu - CZ & Niha


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