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Un sioniste face aux faucons d’Israël
mardi 29 septembre 2009 - Frédéric Koller - Le Temps

A en croire les autorités israéliennes, Richard Goldstone ne serait en définitive rien d’autre qu’un agent de l’Iran et de la Libye dont le rapport sur les crimes de guerre à Gaza - qu’il présente ce matin devant le Conseil des droits de l’homme à Genève - aurait pour simple but de déstabiliser l’Etat hébreu. Devant l’Assemblée générale de l’ONU, la semaine dernière, le premier ministre Benyamin Netanyahou posait ainsi cette question : « Le rapport injuste et faussé (de Goldstone) est un test pour tous les gouvernements : êtes-vous avec Israël ou les terroristes ? »

Un allié des terroristes, Richard Goldstone ? L’accusation prêterait à sourire si la campagne de dénigrement israélienne à l’égard de ce juriste de renommée internationale n’était pas largement relayée sur Internet.

Né en 1938 en Afrique du Sud, Richard Goldstone a servi les plus hautes instances judiciaires de son pays et dénoncé, dans le cadre d’une commission qui portait son nom, les violences de l’apartheid à la fin des années 1980. Plus tard, dans les années 1990, il fut procureur général du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda. Il a également été membre du conseil de fondation de plusieurs ONG de défense des droits de l’homme. « Ce n’est pas un homme expansif, mais je suis frappé par son courage, note à son propos Pierre Hazan, professeur invité à l’Institut de hautes études internationales et du développement. Son grand mérite est d’avoir transformé un mandat accusatoire en un mandat équilibré qui tienne compte des responsabilités de tous les belligérants. »

Stratégie de disqualification

La droite ultranationaliste israélienne l’accuse d’antisémitisme. Richard Goldstone avait anticipé ses attaques lors de la présentation de ses conclusions aux médias, il y a deux semaines, en rappelant qu’il était un juif issu d’un milieu sioniste ayant de fortes attaches avec Israël. Il s’était alors défendu en expliquant qu’il était certes très déçu par ce qu’il avait découvert - à savoir la punition collective imposée par l’armée israélienne à toute une population civile - mais qu’il ?uvrait non pas contre Israël mais dans l’intérêt des Israéliens, des Palestiniens et de la justice internationale.

En réalité, Richard Goldstone est irréprochable, tout comme son rapport qui met sur le même plan les crimes israéliens et ceux des groupes armés palestiniens. Ne pouvant s’en prendre à la personnalité de l’auteur du rapport, le pouvoir israélien a opté pour une autre stratégie afin de disqualifier ses conclusions embarrassantes. Le rapport Goldstone, comme l’a expliqué un porte-parole de l’ambassade d’Israël à Washington, devrait « inquiéter tous les pays qui luttent contre le terrorisme ». Explication : dans la logique de guerre asymétrique entre des armées régulières et des « groupes terroristes » utilisant des boucliers humains, le droit international humanitaire ne serait plus pertinent. Les Américains et les Européens qui ont tué beaucoup de civils en Irak ou en Afghanistan, poursuivait le porte-parole, feraient bien d’y réfléchir à deux fois avant de soutenir l’enquête du juge sud-africain. Il semble que Washington ait été sensible à cet argument. C’est moins clair du côté européen.

29 septembre 2009 - Le Temps - photo : Alex Catalan /Wikimedia