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Gaza : le massacre de Zeitoun
lundi 19 janvier 2009 - Tom Eley - WSWS
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Un petit enfant blessé lors d’une attaque aérienne israélienne sur la ville de Gaza le 14 janvier, est soigné à l’hôpital Shifa - Photo : Mohamed Al-Zanon/MaanImages

Ces deux derniers jours, le massacre qui s’est déroulé à Zeitoun, un quartier au Sud de Gaza City, a commencé à sortir de l’ombre. Des groupes d’aide humanitaire, dont la Croix-Rouge, ont utilisé depuis mercredi les pauses de trois heures dans les bombardements israéliens pour tenter tant bien que mal d’évacuer les blessés, il semble que certains d’entre eux y soient encore. La plupart des morts ont été abandonnés sur place.

Ce qui est particulièrement abominable dans le massacre de Zeitoun - dont les détails continuent à faire surface - c’est le comportement sadique des Forces de défense israéliennes (FDI). C’est une exécution en masse qui s’est poursuivie plusieurs jours durant.

Les FDI ont trompé les résidents, leur promettant qu’ils seraient saufs s’ils se rassemblaient en grand nombre dans des bâtiments précis, puis ils les ont bombardés. Durant quatre jours, les Israéliens ont ensuite laissé les malades et les mourants - tous des civils, dont une majorité de jeunes enfants - sans assistance médicale, sans eau ni nourriture, alors qu’ils jouissaient d’un contrôle total sur cette zone. De plus, ils ont repoussé les demandes répétées des travailleurs humanitaires d’accéder au quartier.

Le nombre de morts à Zeitoun n’est pas connu avec certitude. Pour le moment, il semble qu’il se situe entre 70 et 85. Mais ce nombre pourrait augmenter significativement, les blessés laissés sans assistance continuant à mourir, et les travailleurs humanitaires découvrant les corps des victimes dans les bâtiments bombardés.

Israël a bombardé Zeitoun le dimanche, en prenant rapidement le contrôle. La cité occupe une position stratégique au Sud de la ville de Gaza, qui pourrait être utilisée par les FDI pour lancer une attaque sur la ville de Gaza proprement dite.

Selon des survivants, après avoir envahi la ville, les FDI ont poussé les familles nombreuses à se regrouper dans des bâtiments situés au centre de la ville, les faisant avancer sous la menace des armes d’un bâtiment à l’autre. Les FDI ont déclaré aux résidents de Zeitoun qu’ils les emmenaient dans des bâtiments qui n’allaient pas être bombardés.

Mais dans un cas au moins, il a été révélé que les FDI ont enfermé 110 Palestiniens dans un bâtiment qui a été bombardé moins de 24 heures plus tard, tuant peut-être 70 personnes, tous civils. Les travailleurs humanitaires n’ont découvert les corps qu’après avoir été tenus durant quatre jours à l’écart de ce quartier de Zeitoun.

Ceux qui étaient dans le bâtiment, qui a été décrit comme un « entrepôt » par un survivant, ont été abandonnés à l’intérieur sans eau ni nourriture. Au bout d’une journée, trois hommes ont tenté de s’aventurer à l’extérieur pour trouver de la nourriture. Ils ont immédiatement été touchés par un tir de barrage des FDI. À ce moment, un missile a frappé le toit de l’entrepôt.

Meysa Samouni, 19 ans, a survécu à l’attaque avec sa petite s ?ur de deux ans, qui a été blessée, elle a décrit la scène : « Lorsque le missile est tombé, je me suis plaquée au sol avec ma s ?ur en dessous de moi. Tout s’est rempli de fumée et de poussière, et j’ai entendu des cris et des pleurs. Une fois que la fumée et la poussière sont un peu retombées, j’ai regardé autour de moi et j’ai vu 20 à 30 personnes qui étaient mortes, et environ 20 qui étaient blessées.

« Les personnes qui ont été tuées autour de moi étaient mon mari, qui a été touché dans le dos, mon beau-frère qui a été touché à la tête et dont le cerveau était sur le sol, ma belle-mère Rabab, le frère de mon beau-père Talal, et sa femme Rhama Muhammad a-Samouni, 45 ans, la femme du fils de Talal, Maha Muhammad a-Samouni, 19 ans, et son fils, Mohammed Hamli a-Samouni, cinq mois, dont tout le cerveau était sorti du corps, Razqa Mohammed a-Samouni, 50 ans, Hanan Khamis a-Samouni, 30 ans, et Hamdi Majid a-Samouni, 22 ans. »

Un médecin de la Croix-Rouge qui a visité Zeitoun a décrit une scène horrible au Telegraph. « Dans la maison Samouni, j’ai vu environ 10 corps et à l’extérieur 60 autres. Je n’étais pas capable de les compter précisément parce que nous n’avions pas beaucoup de temps et que nous cherchions les blessés... J’ai pu voir un bulldozer de l’armée israélienne abattre des maisons à proximité, mais nous manquions de temps et les soldats israéliens ont commencé à nous tirer dessus. »

« Nous avons dû abandonner environ huit blessés derrière nous parce que nous ne pouvions pas les atteindre et qu’il n’était plus sûr pour nous de rester. »

Dans un autre bâtiment de Zeitoun, les Israéliens ont rassemblé 80 personnes. Des survivants racontent que des soldats israéliens ont abattu des gens de sang-froid lorsqu’ils ont tenté de s’enfuir. D’après un autre survivant, un homme, Atiyeh Samouni, a été abattu par les Israéliens après avoir ouvert sa porte pour les accueillir. Puis son fils de deux ans a été abattu aussi.

Toujours d’après les survivants, la plupart des hommes de Zeitoun ont été arrêtés, cagoulés, et emmenés ailleurs. Certains ont été utilisés comme boucliers humains.

La déclaration publique du Bureau des Nations unies pour la Coordination des affaires humanitaires concernant ce bombardement s’appuyait sur les récits des survivants, il venait confirmer un reportage de l’agence Associated Press et des témoignages réunis par un groupe israélien de défense des droits de l’Homme.

C’est dans le même quartier que la veille la Croix-Rouge avait trouvé quatre enfants presque morts près des corps de leurs mères. La Croix-Rouge a découvert les corps de 15 autres personnes dans un bâtiment bombardé, qui ont probablement eu des morts lentes et très douloureuses dues à l’absence d’assistance médicale. Des soldats israéliens étaient stationnés à moins de 90 mètres de cette famille.

Les agences humanitaires ont appris le massacre de Zeitoun lorsque des survivants du clan Samouni sont arrivés à la ville de Gaza au début de la semaine. Selon le Telegraph, « Une poignée de survivants, certains blessés, d’autres portant des enfants morts ou mourants, ont rejoint à pied la principale route nord-sud de Gaza avant d’être emmenés à l’hôpital sur des brancards. Trois jeunes enfants ont été enterrés dans la ville de Gaza ce soir-là. »

Mais Israël a refusé à la Croix-Rouge la permission de se rendre dans le quartier jusqu’à mercredi.

Une centaine d’autres personnes qui avaient besoin d’un traitement médical ont été évacuées de Zeitoun, non en raison de blessures, mais à cause de la déshydratation et de la famine. La ville est restée sans eau ni nourriture depuis qu’Israël l’a occupée dimanche.

À Genève, le Haut-commissaire des Nations unies aux Droits de l’Homme, Navi Pillay, a condamné les atrocités commises à Gaza. Israël affirme que toutes ses actions sont justifiées par les tirs de roquettes dérisoires des Palestiniens. Mais Pillay a déclaré que cela ne dispensait pas Israël de se conformer aux lois internationales. Dans un entretien accordé à la BBC, Pillay a déclaré que les actions d’Israël semblaient réunir « tous les éléments des crimes de guerre ».

L’ONU et le Programme mondial contre la faim ont interrompu leurs apports d’aide alimentaire à Gaza en raison des attaques commises régulièrement par les FDI contre des organisations humanitaires. Depuis mercredi, Israël affirme avoir observé un cessez-le-feu de trois heures par jour pour permettre aux travailleurs humanitaires de se rendre dans les zones sous contrôle des FDI. Cependant, en plusieurs occasions, les FDI ont tiré sur les travailleurs humanitaires durant la prétendue pause de trois heures.

Selon la convention de Genève, une armée qui envahit un pays est responsable de la prise en charge des malades, des blessés et de l’approvisionnement en nourriture dans les territoires qu’elle contrôle. Israël enfreint manifestement ces conventions, bloquant complètement la livraison de nourriture et de médicaments, tirant sur les ambulances et les empêchant de parvenir jusqu’aux blessés, et laissant mourir les malades et les blessés sous son contrôle.

Certains éléments indiquent que Zeitoun a été spécifiquement désignée par les FDI pour faire un exemple. Le Telegraph mentionne que c’était un lieu connu pour l’activité du Hamas.

Le massacre de Zeitoun est un crime de guerre abominable dont les FDI et le gouvernement israélien portent la responsabilité. Mais le déchaînement de violence des FDI ne serait pas possible sans le soutien plein et entier des États-Unis et la complicité des Nations unies, des puissances européennes et des régimes arabes du Moyen-orient.

Si Israël entre dans la ville de Gaza, qui abrite plus de 400 000 habitants, les méthodes employées à Zeitoun seront réemployées à une échelle bien plus grande.

(Article original anglais publié le 9 janvier)

13 janvier 2009 - World Socialist Web Site (WSWS) - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.wsws.org/francais/News/2...