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Dire les choses comme elles sont
jeudi 18 décembre 2008 - Dr. Mustafa Barghouthi
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Mustafa Barghouti, député palestinien et secrétaire général de la P.N.I., l’Initiative Nationale Palestinienne

Alors que beaucoup spéculent au sujet de la future politique d’Obama pour le Moyen-Orient, la réaction générale arabe est « wait-and-see », attendre et voir. Le nouveau président va probablement faire face à une avalanche de problèmes, l’économie et l’Irak pour commencer, suffisamment pour le tenir occupé pour un mandat entier. Mais il n’y a aucun signe que le « changement, » qu’Obama aime tellement invoquer, s’applique au conflit israélo-palestinien. Les nominations qu’il a faites jusqu’à présent ne sont pas bien encourageantes.

Les Israéliens, Tzipi Livni, comme de nombreux autres, veulent que les Américains se maintiennent en dehors de celui-ci. Ils veulent garder les Palestiniens divisés, tendant la carotte de négociations éventuelles, tout en élargissant les colonies de peuplement et modifiant sans cesse le statu quo. Pendant ce temps, les Palestiniens paraissent vraiment malchanceux.

Continuant des négociations qui n’ont aucune chance de succès, l’Autorité Palestinienne s’accroche à Annapolis comme un homme qui se noie s’accroche à une paille. Que font les participants d’Annapolis au sujet des colonies de peuplement israéliennes qui ont augmenté exponentiellement au cours des négociations d’Annapolis ? Rien. Que font-ils au sujet des barrages routiers israéliens dont le nombre a augmenté de 521 à 699 pendant la même période ? Rien. Que font-ils au sujet du système d’apartheid que les gouvernements israéliens successifs, à l’évidence, renforcent ? Rien.

A Washington, pendant ce temps, il y a trois positions concernant le Moyen-Orient.

Selon la première, Israël doit avoir les mains libres et les États-Unis doivent se tenir à l’écart. Au plus, les États-Unis pourraient envoyer des émissaires de l’escamotage type, des gens qui peuvent faire tourner le ballon, discuter de choses mineures, alors que le temps est gaspillé. En bref, des gens qui détournent notre attention tandis qu’Israël construit de nouvelles colonies de peuplement, modifie la démographie de Jérusalem et, plus généralement, crée de nouveaux faits accomplis sur le terrain. Ceux qui préconisent ce point de vue souhaitent conserver les Palestiniens divisés, tout en encourageant l’Autorité Palestinienne à agir en tant que chien de garde pour Israël.

Selon la deuxième position, les États-Unis devraient oublier la Palestine et de se concentrer sur des choses telles que l’économie, ou sur l’Irak, l’Afghanistan et l’Iran. Après tout, la question palestinienne est d’un faible rendement, comme les précédents présidents américains l’ont découvert à leur dépit, et le nouveau président a déjà suffisamment à faire. Cette position tout comme celle mentionnnée au-dessus laisse les mains libres à Israël. Et les deux positions ont l’appui des groupes pro-israéliens, comme Comité Américain-Israélien des Affaires Publiques (AIPAC).

La troisième position suit plus ou moins les traces du rapport Baker-Hamilton, conseillant à l’administration américaine de se retirer d’Iraq et de mettre fin à une guerre honteuse. Les partisans de cette position sont des personnes telles que Lee Hamilton, l’ancien conseiller national pour la sécurité Zbigniew Brzezinski et Brent Scowcroft. Le Président américain Jimmy Carter, qui a écrit un livre attaquant le système d’apartheid d’Israël, est également un partisan de ce point de vue. Tous ces officiels sus-mentionnés misent sur l’Initiative Arabe et recommandent instamment la mise en ?uvre d’une formule conduisant à une solution globale au conflit du Moyen-Orient. Ils soutiennent aussi la création d’une direction palestinienne unifiée.

Les partisans de la troisième position osent dire quelque chose qu’Israël ne veut pas entendre. Ils disent que l’on peut trouver l’origine de chaque problème particulier au Moyen-Orient, en Iraq et en Afghanistan inclus, dans le problème palestinien. Et en conséquence, ils veulent faire la distinction entre les intérêts américains d’une part et la politique israélienne de l’autre. Ils estiment aussi qu’Israël a dépassé les bornes quand il a créé un système d’Apartheid en Palestine. La plupart d’entre eux pensent qu’Obama est le dernier président en mesure d’approuver une solution à deux États. Sinon, la seule solution sera un Etat bi-national que beaucoup affirment ne pas être l’intérêt le meilleur pour Israël.

Malheureusement, les responsables arabes gardent une attitude passive sur l’ensemble de la question, en en disant aussi peu que possible et, en général, laissant l’initiative à d’autres. Nous n’avons personne pour faire avancer nos points de vue à Washington, tout simplement parce que nous avons échoué à maintenir un groupe de pression arabe ou palestinien aux États-Unis.

Les présidents américains, Obama inclus, ne prennent pas de risques à moins d’y être obligés... Et tant que nous, les Palestiniens et les Arabes, nous garderons le silence, les responsables américains ne seront pas susceptibles de s’intéresser à notre cas. Nous pouvons influer sur les choix de Obama, mais seulement si nous faisons un effort collectif pour clarifier notre position. Un point dont nous devons mettre en évidence, l’urgence, c’est que la Palestine est le problème fondamental, celui à partir duquel tous les autres troubles dans la région émanent.

Notre cause n’est pas perdue.

Pendant un certain temps après le Sommet de Beyrouth, les Arabes ont fait une tentative courageuse pour laisser tomber le futile, l’approche étape par étape des négociations et pour remplacer cela par quelque chose de plus sérieux. Leur tentative a été suffisamment crédible pour entraîner Sharon dans une série de tactiques de diversion, y compris une offensive dans les territoires occupés, suivi par l’assassinat du président Yasser Arafat. Le processus d’Annapolis n’était qu’une autre tactique de retardement.

La seule chose que ce processus a réussi à ce jour, c’est de fixer l’attention des Palestiniens sous occupation, et de plus, de les diviser, pendant qu’Israël met la main sur plus de terres et modifie les réalités démographiques.

Israël va avoir bientôt une élection, dont le gagnant le plus probable sera un membre du Likoud ou un ancien membre du Likoud : Netanyahou ou Livni. Ceci confirme qu’Israël ne va pas changer ses façons de faire de si tôt. Il continuera à construire des colonies et des murs, à modifier la composition démographique de Jérusalem et, plus généralement, à maintenir les Palestiniens dans la confusion et la division. Par conséquent, les Palestiniens doivent d’agir.Je suggère qu’ils fassent tout leur possible pour :

- Restaurer l’unité nationale palestinienne, mettre fin aux divisions internes, et construire une direction nationale unifiée capable de parler d’une seule voix à l’administration américaine et au monde. Les Palestiniens devraient cesser d’écouter ceux qui veulent qu’ils entretiennent les divisions.

- Nous rassembler dans le soutien à l’initiative arabe comme unique alternative au coup par coup et des solutions provisoires. Nous ne devons pas céder à la tentative insidieuse de Shimon Perez d’interpréter l’Initiative Arabe d’une manière sélective. Ce qu’Israël veut, c’est arracher une normalisation complète avec les Arabes tout en continuant à occuper leurs terres.

- Appeler à une conférence internationale basée sur les résolutions des Nations unies afin de mettre en ?uvre l’Initiative Arabe dans son intégralité. L’objectif ici est de mettre fin à l’occupation de tous les territoires occupés, notamment à Jérusalem. Un mécanisme international efficace destiné à établir la paix doit être créé. Et les États-Unis ne devront pas être autorisés à monopoliser la médiation, tant qu’ils continuent à être totalement partiaux au profit d’Israël. Les Arabes et les Palestiniens peuvent coopérer avec les autres puissances qui montent sur la scène internationale.

- Lancer une campagne médiatique pour dénoncer le système d’Apartheid créé par Israël et mettre fin à la domination d’Israël sur l’opinion mondiale.

Tous les points ci-dessus sont réalisables. Rien dans ce que j’ai dit n’est trop difficile pour les régimes arabes. Tout ce que je veux dire, c’est que nous devons illustrer l’injustice flagrante faite aux Palestiniens. Nous avons besoin de fournir un autre point de vue à un public longtemps monopolisé par le lobby israélien. Nous devons défendre les valeurs de changement, de liberté, d’égalité dont Obama a parlé pendant si longuement. La Palestine est la plus grande victime au monde de l’apartheid. Notre cause est juste et nous devons la défendre.

* Mustafa Barghouti est secrétaire général de la P.N.I., l’Initiative Nationale Palestinienne.

Du même auteur :

- Et maintenant, la question de Jérusalem - 20 octobre 2008
- La fin de la tragi-comédie d’Oslo - 1° septembre 2008
- Journée internationale contre le racisme marquée par l’apartheid d’Israël - 22 mars 2008
- Depuis Annapolis, la violence israélienne a doublé ! - 14 janvier 2008
- Pré-requis pour la paix - 21 décembre 2007
- Châteaux en Espagne - 16 décembre 2007
- « La conférence de paix n’est qu’une chimère » - 18 octobre 2007

5 décembre 2008 - Ma’an News Agency - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.maannews.net/en/index.ph...
Traduction : Laurent G.