Un nouveau théatre offre des activités nouvelles aux habitants, adultes et enfants, du camp de réfugiés de Jénine.
L’idée d’un théatre et d’un atelier dramatique parait hors de propos dans ce camp du nord de la Cisjordanie.
Mais ces idées sont maintenant bien vivantes après qu’ait vu le jour le Théatre de la Liberté en février.
« Je ressens une sorte de liberté ici », nous dit Sabine, âgée de 13 ans, et assise à l’extérieur du théatre.
Près de 20 autres filles, qui viennent juste de terminer un atelier théatral, approuvent.
« Cela renforce ma personnalité et me donne la liberté de m’exprimer », dit Aisha, âgée également de 13 ans.
L’acteur et directeur israélien, Juliano Mer-Khamis, cofondateur du théatre, nous explique : « Nous voulions créer un centre culturel qui rendent plus forts les enfants de Jénine, qui leur amène de la connaissance. »
« Nous voulons essayer avec eux de réduire les effets vicieux de l’occupation, en menant une lutte commune. »
Récemment, le théatre a accueilli deux spectacles : un pour des enfants au sujet de Joha, l’imbécile plein de sagesse, et une satire politique pour les adultes.
Maison bondée
Alors que des affrontements avaient lieu durant un raid militaire israélien, les travailleurs du théatre installaient la scène et discutaient au sujet de quels projecteurs employer.
Les deux spectacles ont attiré près de 1000 personnes, bien que le théatre n’ait normalement qu’une capacité de 400 places.
« L’intérêt dans le camp pour ces activités est vraiment gigantesque. Même si nous avions 3 ou 4 spectacles, nous ne serions pas capables d’accueillir tout le monde », nous dit le cofondateur Jonatan Stanczak, un infirmier suédois en pédiatrie basé à Haifa.
L’objectif est de produire un spectacle chaque semaine.
Mer-Khamis et Stanczak animent aussi des ateliers pour les enfants.
Après moins d’un mois de cours dramatiques réguliers, les enfants ne peuvent plus s’en passer, beaucoup revenant après l’école avec des chants, des poèmes et des idées de scènes qu’ils veulent interpréter.
Stanczak explique que les ateliers fonctionnent 4 ou 5 jours par semaine et que parfois ce sont 200 enfants qui y participent.
Au cours d’un des ateliers, Mer-Khamis a joué l’animateur devant 60 enfants et a fait fonctionner un spectacle de mime.
Les enfants riaient, et ils ont été invités un par un à se joindre au jeu. Ils ont ensuite monté un sepctacle de leur propre initiative, en s’inspirant de leurs expériences de l’école locale de l’UNRWA, avec une attention particulière sur leurs professeurs adeptes de la discipline.
« Ce que je vois à Jénine, ce sont des enfants déstructurés, dans la confusion, et incapables de se concentrer plus de 5 minutes », dit Mer-Khamis.
Le projet du théatre est de changer tout cela.
Projet communautaire
Mer-Khamis ajoute : « Le plus important est de faire en sorte que lorsque les enfants viennent ici, ils représentent réellement quelque chose. Ils peuvent rester dans le hall et transformer cet espace pour en faire un espace pour eux, sur le plan physique et émotionnel. »
Avec un fort support local, le théatre est progressivement en train de devenir un projet de communauté.
« Les gens sont volontaires à tout moment, nous disant qu’ils vont rester et travailler et que nous devrions rentrer chez nous avant que la sortie de Jénine ne soit bouclée », nous dit encore Mer-Khamis.
Le théatre est une réincarnation et a été bâti avec l’héritage d’Arna Mer-Khamis, un israélien qui avait fondé un système alternatif d’éducation et un groupe de théatre à Jénine, lequel a disparu après sa mort en 1995.
Le nouveau théatre a demandé moins de 6 mois pour être mis sur pied et a été inauguré l’an passé par Stanczak, qui par chance a rencontré Zakaria Zubaidi, responsable à Jénine des Brigades des Martyrs d’al-Aqsa et un des enfants de l’ancienne école d’Arna.
Brutale fin de carrière
Zubaidi a déclaré vouloir rétablir des liens avec le mouvement pacifiste juif.
« Ce sont ses mots, sa façon de parler du projet d’Arna » qui ont poussé Stanczak à prendre contact avec Mer-Khamis et Dror Feiler, un militant et compositeur suédois, pour leur soumettre l’idée de reconstruire le théatre, explique Stanczak.
La carrière de Mer-Khamis comme acteur professionnel en Israël a connu une fin brutale auprès le déclenchement de la seconde Intifada. Un des anciens élèves d’Arna avait mené une attaque-suicide en Israël, et Mer-Khamis a été vilipendé après avoir dédié un poème à son ami Youssouf.
« Je devins du jour au lendemain un soit-disant partisan des attaques-suicide », nous dit-il. « Les amis, les acteurs, disaient que je devrais être fusillé ... Les gens se sont mis bloquer mes spectacles et à retirer leurs subventions du théatre, la télévision est devenue hors de question pour moi et les campagnes publicitaires pour mes spectacles ont été décommandées. »
Il est heureux de s’investir aujourd’hui dans le projet du Théatre de la Liberté. « La vie, la chance et la politique vont de concert dans cette région et m’ont permis de réaliser ceci », conclut-il.
Consultez le site du théatre : http://www.thefreedomtheatre.org
Projection à Paris le 28 avril du film "Les enfants d’Arna"
en présence de Juliano Mer-Khamis http://www.protection-palestine.org...
25 avril 2006 - AL-Jazeera.net - Vous pouvez consulter cet article à :
http://english.aljazeera.net/NR/exe...
Traduction : Claude Zurbach