Ramallah, 20 mars 2008. Ce 21 mars 2008 marque la Journée internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, mais pour les Palestiniens, il n’y a pas grand-chose à célébrer à cet égard.
Dans un contexte où l’occupation israélienne, toujours présente, se mue progressivement en un système d’apartheid, le texte de la Convention sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid n’a jamais été aussi pertinent, hors du cas de l’ancien régime d’apartheid d’Afrique du Sud.
« Les Palestiniens sous occupation sont aujourd’hui confrontés à un système d’apartheid arrivé à maturité et caractérisé par une discrimination systématique » déclare le secrétaire général de l’Initiative nationale palestinienne, le Dr Mustafa Barghouthi, député.
« Trouvez-moi un autre cas dans le monde où les routes sont réservées sur un critère ethnique ? Où une population de colons implantée en toute illégalité consomme 48 fois plus d’eau par habitant et par an que la population locale ? Où un peuple occupé paie deux fois plus cher le prix des services publics - tels que l’eau et l’électricité - que ceux qui les occupent ? Où un peuple est, comme le sont les Palestiniens, obligé d’acheter la nourriture au même prix du marché que l’occupant (les Israéliens) - dont le revenu par habitant est 30 fois supérieur - et est empêché de construire sa propre économie indépendante ? Où les malades souffrant d’affections chroniques n’ont aucun accès aux soins à cause de leur nationalité et n’ont donc plus qu’à mourir. »
« Ce sont là des manifestations concrètes de l’apartheid à un degré jamais connu, pas même au plus fort du régime d’apartheid d’Afrique du Sud » ajoute le Dr Barghouthi.
L’existence d’un système d’apartheid en Palestine a été signalée par le rapporteur spécial aux Nations unies sur la situation des Droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, le professeur John Dugard, lui-même sud-africain. Dans son rapport de janvier 2007 au Conseil des Droits de l’homme, Dugard écrit : « Les lois et pratiques d’Israël dans les territoires palestiniens occupés ressemblent, de façon certaine, à l’apartheid [...] et tombent probablement dans le champ d’application de la Convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid ».
Par ailleurs, la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (dont Israël est signataire) stipule que « la discrimination entre les être humains pour des motifs fondés sur la race, la couleur ou l’origine ethnique est un obstacle aux relations amicales et pacifiques entre les nations et est susceptible de troubler la paix et la sécurité entre les peuples ainsi que la coexistence harmonieuse des personnes au sein d’un même Etat. »
« Le gouvernement Olmert s’est présenté lui-même comme apportant la paix dans la région à travers le processus d’Annapollis » remarque le Dr Barghouthi. « Mais c’est ce même gouvernement qui continue de construire le Mur d’apartheid ; qui a récemment donné le feu vert à l’expansion de plusieurs colonies ; qui fait tout pour fragmenter les territoires palestiniens occupés depuis 1967 ; qui assure l’impunité à son armée et à ses colons dans leur violence contre les Palestiniens ; qui a imposé des punitions collectives à un niveau jamais égalé contre le peuple de la bande de Gaza ; et qui a laissé mourir des Palestiniens malades, sur sa frontière, simplement parce que c’était des Palestiniens. »
« Jusqu’à ce que la communauté internationale ôte l’impunité à Israël pour ses violations permanentes des droits humains, individuels et collectifs, des Palestiniens, et jusqu’à ce qu’elle tienne responsable Israël devant la loi internationale, l’intensification croissante du racisme et de l’apartheid représente le seul avenir auquel les Palestiniens doivent s’attendre » conclut le Dr Barghouthi.
Contexte
La Journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale est célébrée chaque année le 21 mars. C’est le jour où, en 1960, la police a ouvert le feu et tué 69 personnes dans une manifestation non violente à Sharpeville, en Afrique du Sud, contre les « lois sur les laissez-passer ». En proclamant cette Journée en 1966, l’Assemblée générale appelait la communauté internationale à redoubler d’efforts pour éliminer la discrimination raciale sous toutes ses formes.
La Convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid a été adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 30 novembre 1973 et est entrée en vigueur le 18 juillet 1976.
Israël a signé (le 3 janvier 1979) la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale du 7 mars 1966 (résolution 2106 A du 21 décembre 1965), entrée en vigueur le 4 janvier 1969.
20 mars 2008 - Initiative nationale palestinienne
Adoptée et ouverte à la signature et à la ratification par l’Assemblée générale dans sa résolution 3068 (XXVIII) du 30 novembre 1973. Entrée en vigueur : le 18 juillet 1976, conformément aux dispositions de l’article XV.
Les Etats parties à la présente Convention,
Rappelant les dispositions de la Charte des Nations unies, par laquelle tous les Membres se sont engagés à agir, tant conjointement que séparément, en coopération avec l’Organisation en vue d’assurer le respect universel et effectif des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion,
Considérant la Déclaration universelle des droits de l’homme, qui dispose que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits et que chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur ou d’origine nationale,
Considérant la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, dans laquelle l’Assemblée générale a déclaré que le processus de libération est irrésistible et irréversible et que, dans l’intérêt de la dignité humaine, du progrès et de la justice, il faut mettre fin au colonialisme et à toutes les pratiques de ségrégation et de discrimination dont il s’accompagne,
Rappelant que, aux termes de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, les Etats condamnent spécialement la ségrégation raciale et l’apartheid et s’engagent à prévenir, à interdire et à éliminer sur les territoires relevant de leur juridiction toutes les pratiques de cette nature,
Rappelant que, dans la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, certains actes qui peuvent être qualifiés aussi d’actes d’apartheid constituent un crime au regard du droit international,
Rappelant que, aux termes de la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, les "actes inhumains découlant de la politique d’apartheid" sont qualifiés de crimes contre l’humanité,
Rappelant que l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations unies a adopté toute une série de résolutions dans lesquelles la politique et les pratiques d’apartheid sont condamnées en tant que crime contre l’humanité,
Rappelant que le Conseil de sécurité a souligné que l’apartheid et son intensification et son élargissement continus troublent et menacent gravement la paix et la sécurité internationales,
Convaincus qu’une convention internationale sur l’élimination et la répression du crime d’apartheid permettrait de prendre de nouvelles mesures plus efficaces sur le plan international et sur le plan national en vue d’éliminer et de réprimer le crime d’apartheid,
Sont convenus de ce qui suit :
Article premier
Article 2
Aux fins de la présente Convention, l’expression "crime d’apartheid", qui englobe les politiques et pratiques semblables de ségrégation et de discrimination raciales, telles qu’elles sont pratiquées en Afrique australe, désigne les actes inhumains indiqués ci-après, commis en vue d’instituer ou d’entretenir la domination d’un groupe racial d’êtres humains sur n’importe quel autre groupe racial d’êtres humains et d’opprimer systématiquement celui-ci ;
Article 3
Sont tenus pour pénalement responsables sur le plan international, et quel que soit le mobile, les personnes, les membres d’organisations et d’institutions et les représentants de l’Etat, qu’ils résident sur le territoire de l’Etat dans lequel les actes sont perpétrés ou dans un autre Etat, qui :
Article 4
Les Etats parties à la présente Convention s’engagent :
Article 5
Les personnes accusées des actes énumérés à l’article 2 de la présente Convention peuvent être jugées par un tribunal compétent de tout Etat partie à la Convention qui pourrait avoir juridiction sur lesdites personnes, ou par un tribunal pénal international qui serait compétent à l’égard de ceux des Etats parties qui auront accepté sa compétence.
Article 6
Les Etats parties à la présente Convention s’engagent à accepter et à exécuter conformément à la Charte des Nations unies les décisions prises par le Conseil de sécurité ayant pour but de prévenir, d’éliminer et de réprimer le crime d’apartheid, ainsi qu’à concourir à l’exécution des décisions adoptées par d’autres organes compétents de l’Organisation des Nations unies en vue d’atteindre les objectifs de la Convention.
Article 7
Article 8
Tout Etat partie à la présente Convention peut demander à l’un quelconque des organes compétents de l’Organisation des Nations unies de prendre, conformément à la Charte des Nations unies, les mesures qu’il juge appropriées pour prévenir et éliminer le crime d’apartheid.
Article 9
Article 10
Article 11
Article 12
Tout différend entre les Etats parties concernant l’interprétation, l’application ou l’exécution de la présente Convention qui n’aura pas été réglé par voie de négociation sera porté devant la Cour internationale de Justice, sur la demande des Etats parties au différend, à moins que ceux-ci ne soient convenus d’un autre mode de règlement.
Article 13
La présente Convention est ouverte à la signature de tous les Etats. Tout Etat qui n’aura pas signé la Convention lors de son entrée en vigueur pourra y adhérer.
Article 14
Article 15
Article 16
Tout Etat partie peut dénoncer la présente Convention par voie de notification écrite adressée au Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies. La dénonciation prendra effet un an après la date à laquelle le Secrétaire général en aura reçu notification.
Article 17
Article 18
Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations unies informera tous les Etats :
Article 19
Source : AIDH - Version originale ONU (en anglais).
20 mars 2008 - Initiative nationale palestinienne - Traduction du texte INP : Info-Palestine.net