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Soigner les enfants Palestiniens traumatisés
samedi 22 mars 2008 - Mel Frykberg - Al Jazeera.net
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Enfants Palestiniens devant leur maison à Al-Moghraqa dans Gaza. Selon les ONG sur place, la situation humanitaire est la pire depuis 1967 - Photo : Gallo/Getty

Alarmées par la récente incursion israélienne dans Gaza et la détérioration de la situation sociale et économique dans les territoires occupés, plusieurs ONGs ont lancé des programmes de crise pour les enfants Palestiniens en état de traumatisme.

Marwan Diab, un psychologue du programme de santé de la Communauté de Gaza (GCHP), indique que la plus jeune génération des Palestiniens a besoin d’une aide urgente.

« Une génération d’enfants palestiniens fait face au danger d’être psychologiquement affectés au delà de ce qui peut être guéri à moins qu’il y ait une intervention psychologique rapide et suffisante en même temps qu’une amélioration de la situation sociale, économique et politique dans la bande de Gaza, » nous dit-il.

Parmi ceux qui ont besoin l’aide, il y a Muhammad Ayman, un adolescent qui dit avoir vu son ami proche Muhammed Shreitih mourir en perdant son sang après avoir été blessé par un coup de feu à la tête par un colon israélien.

Cauchemars

« Je ne peux pas dormir la nuit, j’ai des cauchemars, je me réveille couvert en sueur et je revois le visage de Muhammed dans une mare de sang, » raconte Ayman à Al Jazeera.

Son ami Fahdi Nawaf, qui dit avoir également vu mourir Shreitih il y a quelques semaines, ajoute : « je ne me sens pas de quitter la maison, je suis effrayé même pour aller à l’école et quand je me force à y aller je ne peux pas me concentrer. »

Nawaf, Ayman et Shreitih, tous les trois âgés de 18 ans, sont originaires du village d’Al-Mazra’a Al-Qiliya près de Ramallah.

Nawaf et Ayman racontent qu’un colon venant de l’implantation israélienne de Telmond située à proximité, a abattu Shreitih alors que les adolescents participaient à une marche pacifique pour protester contre le grand nombre de morts et de blessés après la récente incursion militaire israélienne dans Gaza.

« Le colon a commencé à tirer vers nous avant que nous ayons même atteint la colonie. Il est sorti de l’autobus et est venu vers nous puis a commencé à tirer à 50 mètres de distance, » indique Ayman.

Mais Mickey Rosenfeld, le porte-parole de la police israélienne affirme que le colon avait été forcé d’ouvrir le feu parce que sa vie avait été mise en danger par des lanceurs de pierres [les colons juifs sont des fous furieux armés jusqu’aux dents et le reste n’est que mensonge éhonté - N.d.T].

Peur, colère et violence

Shreitih était l’un des 140 Palestiniens qui ont été assassinés pendant l’incursion dans Gaza et lors des manifestations qui ont éclaté après.

L’organisation israélienne de droits de l’homme, B’Tselem a publié un communiqué indiquant que plus que la moitié de ceux qui avaient été tués étaient des non-combattants, dont beaucoup d’enfants.

« Le nombre d’enfant atteints de symptômes de stress et désordre post-traumatiques dont l’incontinence au lit, les cauchemars, la peur et les comportements irritables a brusquement augmenté, » indique Diab a Al Jazeera, ajoutant que le GCHP a relancé son équipe d’intervention pour s’attaquer à ces problèmes.

La violence domestique est également en augmentation, dit-il, de même que le comportement de plus en plus agressif des enfants les uns envers les autres.

« Je sens tant de colère à l’égard de ce colon qui a tué Muhammed, » nous dit Ayman. « Il l’a tué sans aucune justification possible. »

Patricia McPhillips, représentante spéciale de l’UNICEF dans les Territoires Palestiniens Occupés, a fait écho à certaines des conclusions exposées par Diab. « Nous sommes très préoccupés au sujet des enfants, » dit-elle à Al Jazeera.

« Rien que l’an, passé, 37500 enfants Palestiniens dans les territoires occupés ont participé à nos sessions de conseil en groupe, 1200 en sessions particulières et plus de 18000 personnes ont participé aux sessions avec les parents, » ajoute-t-elle. « Nous avons également rendu visite à 800 familles dans les maisons et les hôpitaux à la suite des situations de crise aigüe. »

Aide disponible

Pendant la dernière incursion israélienne dans le nord de la bande de Gaza, dans la ville de Jabaliya, l’agence des Nations Unies pour l’aide aux réfugiés (UNRWA) avec ses partenaires du ministère de l’éducation et de l’éducation supérieure, qui travaille avec le Centre Palestinien pour la Démocratie et la Résolution du Conflit (CPDRC), a mis en place une équipe de secours pour les questions de santé mentale et a déployé des conseillers dans les écoles afin de parler avec les enfants.

Les Européens ont également exprimé des inquiétudes concernant la situation qui se détériore sur le terrain. Réagissant également, le service d’aide humanitaire de la Commission européenne, ainsi que les comités nationaux italiens et français de l’UNICEF, ont assigné des fonds significatifs pour soutenir cinq des équipes de secours de l’UNICEF composées de 25 personnes et peuvant être mobilisées très rapidement [d’une certaine manière l’Europe finance et assure le "service après-vente" dans la foulée des incursions israéliennes - N.d.T].

L’UNICEF a mis également en place une ligne téléphonique directe de consultation, des visites de suivi détaillé et un service de consultation en vis à vis pour les adolescents dans ses centres de jeunesse.

Bien que les enfants soient toujours particulièrement vulnérables dans les situations de conflit, ils sont d’un intérêt particulier pour McPhillips et ses équipes parce qu’ils constituent 56% de la population de Gaza et 52% de la population globale dans les Territoires Occupés.

« Il n’y a rien de normal ici. Les enfants d’aujourd’hui ont des parents qui ont été psychologiquement affectés lors de la première Intifada, et qui eux-mêmes sont les enfants des parents qui ont été transformés en réfugiés à la suite de la première guerre israélo-arabe, » explique McPhillips.

Au-delà de la peine

En plus des problèmes psychologiques provoqués par leur environnement violent, les enfants palestiniens font face à la situation économique à travers les privations et les questions de santé.

A la maison la nourriture et l’eau sont rares parce que beaucoup de parents sont sans emploi, et la situation n’est pas meilleure à l’école, où l’eau potable, les toilettes et les fournitures scolaires manquent tandis que les fermetures de frontière empêchent l’UNICEF de compléter tout ce qui fait défaut.

Col Nir Press, un porte-parole israélien, a nié que l’aide soit délibérément bloquée. Il a ajouté que les attaques régulières sur les passages frontaliers dans Gaza ont forcé son pays à trouver un équilibre entre les livraisons et la sécurité.

En attendant les enfants de Gazan ont besoin de produits de base comme les médicaments et les fournitures scolaires pour pouvoir grandir et devenir des adultes en bonne santé et qui contribuent à la société, nous dit McPhillips, ajoutant qu’un minimum de normalité devrait être rétabli dans le territoire de Gaza pour que cela soit possible.

Diab rappelle à la communauté internationale qu’elle est dans l’obligation de faire pression sur Israël pour qu’il respecte les traités internationaux et humanitaires qu’il a signés.

La seule petite lueur d’espoir qu’il aperçoit est dans la souplesse qu’il constate chez les enfants de Gaza en dépit de cet environnement terrifiant.

« Nous ne détestons pas tous les Israéliens, » concluent Ayman et Nawaf. « Nous voulons la paix avec eux. Nous détestons seulement le colon qui a tué notre ami Muhammad. »

12 mars 2008 - Al Jazeera.net - Vous pouvez consulter cet article à :
http://english.aljazeera.net/NR/exe...
[Traduction de l’anglais : AIO - Info-Palestine.net]