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Sur l’Iran, Sarkozy se trompe
mardi 18 septembre 2007 - Editorial du New York Times
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Le Rafale (Dassault Aviation) : le nouveau hochet du couple Sarkozy-Kouchner ?

Le président français Nicolas Sarkozy a fait le mauvais geste au mauvais moment en évoquant la possibilité, dans son premier grand discours de politique étrangère, le 27 août, d’un recours à la force contre le programme d’armement nucléaire de l’Iran. C’est par le biais de négociations approfondies et de pressions économiques accrues, et non par la menace d’une action militaire, que les Etats-Unis et leurs alliés doivent chercher à dissiper les graves dangers que l’Iran fait courir au monde.

M. Sarkozy, pour qui il était jusque-là exclu que la France se joigne à une action militaire américaine contre l’Iran, ne s’est pas exactement prononcé en faveur d’une attaque contre les installations nucléaires iraniennes.

Mais il a affirmé qu’un Iran doté de l’arme nucléaire était “inacceptable” et réaffirmé son soutien à la campagne diplomatique menée par les Etats-Unis, la France et d’autres puissances mondiales. Cette campagne repose sur un marché que Téhéran a toujours rejeté : l’application des sanctions décidées par l’ONU ou - si l’Iran cessait d’enrichir l’uranium - l’offre d’importants avantages politiques et économiques.

On frémit en pensant que les commentaires de M. Sarkozy reflètent peut-être sa compréhension de l’orientation actuelle de la politique américaine. Beaucoup plus proche de Washington que son prédécesseur, il a rencontré le président Bush pendant ses vacances dans le Maine. Son discours, qui reflète son style direct et sans nuances, sera interprété comme une mise en garde adressée à Téhéran et aux pays récalcitrants devant un renforcement des sanctions imposées à l’Iran pour ses ambitions nucléaires.

Le message : si la voie diplomatique échoue, soit l’Iran se dotera d’armes nucléaires, soit une action militaire l’en empêchera. Le 29 août, M. Bush a pris le relais en déclarant que la menace nucléaire iranienne justifiait le maintien des troupes américaines en Irak.

Des discours aussi directs que celui de M. Sarkozy risquent d’avoir des effets contraires en Iran, en attisant les sentiments nationalistes au bénéfice de partisans de la ligne dure tels que le président Mahmoud Ahmadinejad, qui tient tête à l’Occident et se refuse à tout compromis.

Ils risquent également d’être interprétés par les faucons du gouvernement Bush comme le signe d’une adhésion accrue de l’Europe à l’option militaire. La France, qui s’est montrée farouchement partisane de la voie diplomatique, doit poursuivre sur cette lancée. M. Sarkozy ne devrait pas donner d’excuses à M. Bush pour abandonner cette option.

Les chances de convaincre Téhéran de renoncer aux armes nucléaires sont peut-être minces, mais la communauté internationale a toujours le recours de renforcer ses sanctions. Ces dernières années, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne ont formidablement avancé dans la formation d’un consensus international contre le programme d’armement nucléaire de l’Iran. Cependant, pour que ce consensus débouche sur des sanctions efficaces, le Conseil de sécurité des Nations unies doit rester uni.

L’accord que Téhéran a conclu au mois d’août avec les inspecteurs de l’ONU pour répondre aux questions posées par son programme nucléaire n’est qu’un nouveau simulacre. La Chine et la Russie, qui font le plus d’obstruction au sein du Conseil de sécurité, invoqueront cet accord pour s’opposer à un renforcement des sanctions. Les Etats-Unis et leurs alliés doivent faire preuve d’ingéniosité pour proposer les sanctions les plus sévères possible. L’heure est à une diplomatie énergique, pas aux menaces.

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Editorial du New York Times (via le Courrier international), hebdo n° 879, le 6 septembre 2007