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De minables politiciens faisant de grandes ombres
jeudi 30 août 2007 - Khaled Amayreh - Al-Ahram Weekly

L’Autorité Palestinienne (AP) a démenti énergiquement des rapports de la presse israélienne alléguant que des entretiens secrets entre des négociateurs palestiniens et israéliens étaient sur le point d’aboutir à un « document pour un accord » montrant à quoi ressemblerait un accord final entre les deux bords.

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Olmert voudrait conclure avec Abbas un accord restant vague, général et non-contraignant - Photo : AFP

Des officiels de l’AP ont déclaré à Al-Ahram Weekly que la direction palestinienne attendait toujours de savoir si l’état israélien avait pris « la décision stratégique de mettre un terme à son occupation des Territoires Palestiniens Occupés, ou s’il s’accrochait juste à la même vieille politique de tergiversation et de tromperie. »

Plus tôt cette semaine, un journal israélien avait affirmé qu’Abbas et Olmert discutaient un protocole d’accord couvrant la plupart des questions au coeur du conflit Israélo-Arabe telles que Jérusalem, les réfugiés et les frontières. Le document, selon l’article, serait présenté avant la conférence régionale de paix sponsorisée par les Etats-Unis et prévue pour novembre.

Cependant, toujours selon des officiels de l’AP, alors que les deux côtés ont trouvé un accord général concernant le principe d’un état palestinien, il n’y a aucune entente sur la forme d’un tel état, ses frontières et sa souveraineté.

« Nous essayons toujours de savoir si le gouvernement israélien est sérieux quant à la paix. J’espère que les perspectives générales seront plus claires dans quelques semaines, » a dit Ahmed Subh, le fonctionnaire de rang le plus élevé au ministère palestinien des affaires étrangères basé à Ramallah. Subh a indiqué à Al-Ahram Weekly qu’il n’y avait toujours aucune « réponse claire » sur toutes les questions qui entouraient la conférence régionale en projet.

« Nous ne savons pas quand elle se tiendra exactement, nous ne savons où elle aura lieu, qui y participera, et nous connaissons encore moins la base politique sur laquelle la conférence s’appuiera. » L’incertitude palestinienne concernant cette conférence qui est vue par beaucoup d’observateurs comme le dernier espoir pour la paix pour beaucoup d’années à venir, est tout à fait justifiée.

Israël voudrait conclure avec le régime basé à Ramallah un accord restant vague, général et non-contraignant, accord qui avant tout maintiendrait ou même perpétuerait le statu quo pour beaucoup d’années et apportant en contrepartie « une amélioration importante » dans les conditions de vie des Palestiniens.

De son côté la direction palestinienne espère que la communauté internationale, avec en particulier les Etats-Unis, fera pression sur Israël pour convenir d’un calendrier pour en finir avec l’occupation israélienne commencée en 1967.

Selon la presse israélienne, les directives pour des négociations avec les Palestiniens sont limitées aux questions (considérées comme apolitiques) « locales » avec comme objectif immédiat « l’affaiblissement du Hamas » en resserrant encore sur la bande de Gaza le blocus déjà très éprouvant. Dans le même temps, Israël cherchera une normalisation sans cérémonie avec les états arabes afin de former un « plus large contexte diplomatique » qui faciliterait « des développements plus positifs » dans l’arène israélo-palestinienne.

Pour sa part, Olmert, tout en essayant de maintenir autant que possible le fossé existant entre le Hamas et le Fatah afin d’affaiblir la position palestinienne générale vis-à-vis d’Israël, est néanmoins dans une situation inconfortable voyant certaines cartes qu’il utilisait pour faire diversion et faire peur --- le Hamas, ou « le terrorisme » --- lui glisser des doigts.

Selon les israéliens, leur premier ministre cherchera à convaincre les américains et les européens que la communauté internationale doit d’abord aider l’AP à créer une base économique saine sans laquelle n’importe quel accord de paix s’avérerait précaire. Israël aurait proposé que l’occident et les riches états arabes pétroliers aident l’AP à mettre en place « un système étendu d’assistance sociale » en Cisjordanie afin de gagner plus d’appui populaire que le Hamas et ainsi remporter des élections.

Ce plan, récemment remis aux principaux responsables de l’AP lors d’une conférence tenue portes closes à l’institut pro-israélien de Washington pour la politique proche-orientale [Washington Institute for Near East Policy], envisage l’adoption par l’AP des méthodes de gestion du Hamas en distribuant directement l’aide à ceux qui en ont besoin, afin de retourner l’opinion publique en faveur du Fatah.

Inutile de dire que l’AP, tout en étant disposée à écouter, n’est pas vraiment enthousiaste vis à vis de ces manoeuvres, sa conviction étant que l’occupation israélienne est la principale sinon l’unique raison de la détérioration et de la situation économique et de la pauvreté dans les territoires occupés.

En outre, un rétablissement économique à longue terme en Cisjordanie et laissant de côté la bande de Gaza demanderait beaucoup d’années pendant lesquelles Israël est susceptible de créer encore plus de colonies, d’étendre celles qui existent déjà et de finaliser la judaïsation de Jérusalem-est. Et enfin, vu l’expérience passée, aucune future administration américaine républicaine ou démocrate ne sera disposée ou même simplement capable de forcer Israël à respecter le moindre accord.

Les fonctionnaires de l’AP se rendent compte de la tactique d’Olmert pour gagner du temps et des problèmes auxquels il fait face dans sa faible coalition politique aussi bien que dans l’opinion publique israélienne. Abed Rabbo, officiel de l’OLP [Organisation de Libération de la Palestine] a indiqué au journal Al-Hayat édité en langue arabe à Londres : « si Israël persiste dans son refus de débattre des questions centrales, la conférence de paix échouera. »

Certains observateurs pourraient être tentés d’accorder à Olmert le bénéfice du doute, estimant qu’il peut vouloir entrer dans l’histoire comme premier ministre de paix et non comme premier ministre de guerre. Il est évident cependant qu’il y a très peu d’éléments justifiant dans l’avenir un retournement israélien vis-à-vis des Palestiniens.

Ghassan Al-Khatib est un ancien ministre palestinien du travail. Il explique que le gouvernement israélien d’Olmert n’est aucunement en position de conclure une véritable paix avec les Palestiniens. « Ils essayent d’éluder les vraies questions autant que possible. Par conséquent l’Autorité Palestinienne ne devrait jamais accepter un arrangement ou accord qui laisserait les questions fondamentales sans solution parce que cela signifierait que l’occupation demeurerait intacte, » a-t-il déclaré à Al-Ahram Weekly.

Interrogé pour savoir comment selon lui le possible échec de la conférence régionale affecterait la situation politique dans la région, Khatib est d’avis que « les joueurs impliqués » essayeront de donner à cette conférence l’apparence de la réussite. « Vous savez que la plupart des politiciens sont des menteurs et des escrocs ; ils essayeront probablement de donner [à cette conférence] l’apparence du succès. Cependant la chose importante n’est pas l’apparence, mais l’impact sur la réalité. En bref, si la conférence échoue aux yeux des peuples, elle échouera même si elle parait réussir aux yeux des gouvernements. »

Une des principales raisons de ce manque d’optimisme est le fait qu’Ehud Barak, ministre israélien de la défense et dernier mais implacable associé politique d’Olmert, n’est aucunement disposé à des entretiens avec les Palestiniens pour déterminer un statut final. Barak est persuadé qu’Israël n’a aucun associé pour un accord de paix définitif et il estime avoir besoin d’au moins de cinq ans pour remettre l’armée israélienne sur pied après la guerre de l’an passé contre le Hizbullah.

La conclusion, selon Yoel Markus, un vieux commentateur israélien, est que « le pays est entré dans l’ère d’une direction politique minable en ce qui concerne sa qualité, sa motivation et sa capacité à mettre un terme à l’occupation. » Écrivant dans Haaretz daté du 21 août, Markus a résumé comment il voyait Olmert en citant un proverbe chinois : « Quand les nains font de grandes ombres, c’est signe que le soleil décline. »

Du même auteur :

- Abbas joue gros !
- Le manque de crédibilité de Bush
- Le précaire gouvernement Fayyad

24 août 2007 - Al-Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2007/859...
[Traduction : AIO - Info-Palestine.net]