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Nouveau projet de transports améliorant la mobilité en Cisjordanie
samedi 6 février 2016 - Daoud Kuttab
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Autobus palestinien suranné circulant à Bethléem

Yousef Darawbsheh, vice observateur général du trafic au Ministère palestinien des Transports, se rappelle comme il était effondré après la lecture du Rapport 2011 de la Banque Mondiale (BM) sur les problèmes de transport en Cisjordanie. Il s’intitulait : « La facilitation des transports pour hommes et femmes : défis et opportunités au Moyen-Orient et en Afrique du Nord » et présentait des études de cas au Yémen au Maroc et en Cisjordanie.

L’étude du cas cisjordanien reflétait la croissance économique négative en affirmant que « les postes de contrôle et les impacts économiques de l’occupation paralysent les hommes tout autant que les femmes ».

Comme Darawbsheh avait les mains liées par les restrictions israéliennes, il fut d’autant plus découragé par certaines statistiques de l’étude de la BM sur certains points du transport local.

Ainsi par exemple, l’étude montrait que « seulement 32 % de femmes et 41 % d’hommes estiment que les transports publics sont accueillants et confortables pour les femmes, et 33 % des personnes interrogées se plaignent de la musique bruyante ». Le rapport de 31 pages notait également que « comme les itinéraires ne sont pas imposés, les opérateurs évitent des zones qu’ils ne jugent pas rentables. Plus de la moitié des répondants pensent que les transports publics sont accueillants et 40 % qu’ils ne sont pas accueillants ».

Une situation très frustrante

Dans une interview accordée au Monitor, Darawbsheh se disait très pessimiste quant à la possibilité de modifier cette réalité et de hausser les transports palestiniens jusqu’aux normes internationales. « L’étude présente un tableau très négatif de la situation intérieure des transports en Palestine ». Darawbsheh soulignait qu’il y a « 86 compagnies d’autobus différentes – dont beaucoup sont des entreprises familiales fonctionnant sur de petits itinéraires simples ».

Pour s’attaquer au dossier des transports en Palestine, les autorités ont pensé remédier au problème en recherchant le soutien de différents donateurs, et selon Darawbsheh, aussi bien des donateurs arabes que des membres de la Banque de Développement islamique – mais en vain.

Alors qu’il tentait vainement d’attirer des donateurs pour financer les projets de transports locaux, le Ministre palestinien des Transports a entendu parler d’une subvention pour des projets d’infrastructure, destinée aux pays en développement. Cette subvention offerte par ORIO, l’agence de l’exportation du gouvernement des Pays-Bas, vise des projets d’infrastructure importants dans les pays en développement qui pourraient bénéficier aux exportations néerlandaises.

Wijnand Marchal, Premier Secrétaire de la Représentation Néerlandaise auprès de l’Autorité palestinienne à Ramallah, a confié au Monitor que l’équipe palestinienne travaillait depuis trois ans à présenter ce qui allait s’avérer une offre couronnée de succès. « Avec l’aide d’experts auprès de l’International Finance Corporation [IFC] [Banque Mondiale], les Palestiniens ont formulé un projet global qui prend en compte la création efficace de lignes d’autobus, d’aires de service centrales ainsi qu’un planification horaire ».

Pour l’élaboration de ce projet, le Ministre palestinien a dû convaincre les petites compagnies d’autobus, essentiellement familiales, de se fondre dans trois sociétés centralisées. « Ce fut très difficile mais nous avons réussi à convaincre les propriétaires des compagnies qu’une fusion profiterait à tout le monde », dit Darawbsheh.

Il faut noter qu’en l’absence de toute autorité centrale ou de ressources financières importantes, de nombreuses entreprises familiales sont apparues au fil des ans pour répondre aux besoins locaux. La création d’un consortium de ces compagnies aidera à produire une politique plus cohérente sans affecter négativement ni ces entreprises ni leurs employés.

Un plan en trois phases

Une fois cette fusion acquise, le Ministre palestinien a pu formuler un plan en trois phases qui fournira en fin de compte un système d’autobus de qualité connectant l’ensemble de la Cisjordanie. La préparation inclut également la mise sur pied d’un groupe de 12 consultants issus des multiples propriétaires d’autobus ainsi que des réunions intensives avec des experts de l’IFC.

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Bus de travailleurs palestiniens, Qalqilya, mars 2003 - Photo : AFP/Menahem Kahana

« Différentes études ont été menées pour examiner les lois et règlements nécessaires, [de même que] des études environnementales et financières et [des études sur] la mise en service, les horaires et la billetterie des autobus » ajoute Darawbsheh.

Selon le Ministère palestinien des Transports, la première phase proposée s’étendra sur une année et comprendra l’importation depuis les Pays-Bas de quelque 120 autobus. La deuxième phase durera trois ans et portera sur la construction de trois dépôts de service pour la nouvelle flotte d’autobus. La troisième phase verra la création de point d’information présentant les horaires des lignes d’autobus.

Darawbsheh a dit au Monitor que la soumission envoyée à ORIO inclut la décision du gouvernement palestinien de partager le coût de toute l’opération : « Nous avons réussi à obtenir du Cabinet la décision de payer 20 % des frais globaux de ce projet qui se monte à 40 millions d’euros ». Les gouvernements qui proposent le partage des coûts montrent qu’ils sont disposés à partager la charge financière et qu’ils font un maximum d’efforts pour prouver leur engagement dans un projet d’infrastructure aussi important que celui-ci.

« L’ensemble de la proposition palestinienne nécessite 32,5 millions d’euros ce qui revient en gros à 80 % du budget total. La proposition globale faite aux Pays-Bas a réussi à battre quelque 40 demandes de pays du monde entier », avait déclaré Darawbsheh au site d’information Ma’an News. Al-Monitor ignore quels étaient les autres pays en lice.

Un projet global bien étudié

W. Marchal dit que les Palestiniens ont su présenter un projet global bien étudié. « Ils ont été capables de résoudre les divers problèmes et défis pour présenter une offre très solide » a-t-il déclaré. Il se dit très excité par l’occasion saisie de propulser l’économie palestinienne en offrant des transports sûrs et fiables, qui comporteront les dernières technologies en matière d’applications de téléphonie.

Pendant des années, les compagnies palestiniennes ont dû acheter des véhicules et des autobus israéliens vieux de 10 à 13 ans, exigeant des entretiens réguliers et des pièces de rechanges coûteuses. « Maintenant la population pourra jouir de bus confortables et standardisés qui circuleront dans les temps et auront peu de pannes, » dit Marchal.

Darawbsheh note que le Ministère palestinien des Transports se réjouit du nouveau réseau d’autobus et qu’il travaille sur un projet européen basé sur un plan italien couvrant l’ensemble des besoins de transports des Palestiniens, y compris la possibilité d’un réseau ferroviaire et d’aéroports.

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* Daoud Kuttab : journaliste palestinien né à Jérusalem, il a enseigné le journalisme à Princeton et dirige actuellement le Community Media Network, organisation dédiée au progrès du journalisme arabe indépendant . Il est producteur de documentaires et titulaire de nombreuses distinctions. Il est chroniqueur pour Palestine Pulse de Al-Monitor, The Jordan Times, The Jerusalem Post et The Daily Star (Liban). Son compte Twitter : @daoudkuttab

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29 janvier 2016 - Al-Monitor - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.al-monitor.com/pulse/ori...
Traduction : Info-Palestine.eu - AMM