Fermer la page
www.info-palestine.net
Les exécutions sommaires de Palestiniens font monter l’inquiétude
samedi 17 octobre 2015 - Charlotte Silver
JPEG - 54.6 ko
La police israélienne près du corps d’un Palestinien qu’elle a abattu après qu’il aurait tenté de poignarder une personne dans la Vieille Ville de Jérusalem le 14 octobre. (Oren Ziv ActiveStills)

Parmi les décisions prises, la police israélienne et la police des frontières vont mettre en place le bouclage de quartiers palestiniens de Jérusalem-Est occupée.

Pendant ce temps, des groupes des Droits de l’Homme ont tiré la sonnette d’alarme sur la politique israélienne d’exécutions extrajudiciaires visant les Palestiniens.

Le cabinet de sécurité a aussi décidé le déploiement de sa police militaire pour seconder la police civile dans les principales villes de l’état d’Israël actuel, et 1400 réservistes de la police aux frontières ont été rappelés pour renforcer les forces d’occupation israéliennes à Jérusalem.

"Les forces israéliennes installent des blocs de béton et ferment plusieurs rues, entrées et quartiers à Jérusalem-Est" selon un tweet du 14 octobre de l’ONG Al-Haq à Ramallah (@alhaq_org).

Au nombre des mesures répressives, les habitations des Palestiniens qui auraient pris part à une agression seront démolies dans les deux semaines qui suivent les agressions – délai beaucoup plus court que celui accordé auparavant aux familles pour faire appel de telles ordonnances.

Cette punition collective vise exclusivement les membres de familles palestiniennes et n’a jamais été utilisée contre des juifs.

Le cabinet a également décrété que les familles ne seront pas autorisées à reconstruire leur maison qui aura été détruite, et les agresseurs présumés pourraient voir leur permis de séjour révoqué.

Human Rights Watch a condamné la politique de démolitions. La directrice de l’antenne locale, Sari Bashi, a déclaré qu’ « aggraver la politique punitive de démolition d’habitations est une réponse illégale et irréfléchie »

Exécutions extrajudiciaires

Trente-deux Palestiniens ont été exécutés depuis le début de l’escalade des violences le 1 octobre. 17 au moins ont été tués alors qu’ils prenaient part à des manifestations.

D’autres ont été assassinés dans le cadre de ce qu’Amnesty International a qualifié d’exécutions extrajudiciaires.

Mercredi soir, Basil Bassam Raghib Sidr, 20 ans, a été abattu par un agent de police devant la Porte de Damas de la Vieille Ville de Jérusalem-Est occupée.

Des responsables israéliens ont prétendu que Basil Bassam Raghib Sidr avait tenté de poignarder l’agent, mais aucune blessure n’a été constatée.

Plus tard le même soir, Ahmad Shaaban, 23 ans, du quartier Ras al-Amud à Jérusalem-Est aurait agressé une femme à la gare routière centrale de Jérusalem-Ouest. Ahmad Shaaban a été abattu sur le coup, tandis que la femme aurait subi des blessures légères à modérées.

Toutefois, le rapport israélien est contesté.

Qpress, site web d’information palestinien sur Jérusalem, a mis en ligne l’enregistrement, selon lui, d’un témoin oculaire israélien déclarant aux médias que Shaaban n’était pas armé et ne faisait rien lorsqu’il a été abattu. Aucun autre détail quant au prétendu témoin oculaire n’est fourni.

S’exprimant avec agitation en hébreu, la personne dit : « Gare routière centrale à Jérusalem, là maintenant, un terroriste a été éliminé devant mes yeux. Devant mes yeux. Dix coups, ils ont tirés sur lui. Quel chaos ! Il n’a touché personne. Il n’avait pas de couteau. Tout le monde criait ‘terroriste’ et le garde de sécurité a fait feu. Devant mes yeux. Dix coups ! Ma tête me fait mal. »

Qpress a aussi publié une vidéo qui selon lui montre l’assassinat de Shaaban. Le clip bref et granuleux montre une personne debout devant ce qui semble être un corps immobile et faisant feu à bout portant trois fois.

Qpress a publié cette photo qui selon lui montre Shaaban après qu’il eut été tué.

JPEG - 15.5 ko
Le corps d’Ahmad Shaaban, 23 ans, abattu à la gare routière centrale de Jérusalem le 14 octobre. (via Facebook)

« Tirer pour tuer »

Neuf organisations de défense des droits de l’homme présentes dans l’actuel Israël, parmi lesquelles B’Tselem, Association pour les droits de l’homme en Israël et Amnesty International, ont conjointement condamné ce qui semble être une politique israélienne du « tirer pour tuer » visant tout Palestinien suspecté d’être impliqué dans des agressions d’Israéliens juifs.

« Personne ne conteste la nature grave des événements de ces derniers jours, » dit la déclaration commune, « ni la nécessité de protéger le public contre des attaques au couteau et d’autres attaques. Toutefois, il semble que trop souvent, au lieu d’agir d’une manière appropriée à la nature de chaque incident, les policiers et les soldats sont prompts à tirer pour tuer. »

Tout en n’étant pas une politique énoncée officiellement, les exécutions sommaires de Palestiniens ont été approuvées par des hommes politiques de premier plan.

Le commandant de police israélien de Jérusalem Moshe Edri a déclaré : « Quiconque poignarde des juifs ou blesse des innocents doit être tué, » et le ministre israélien de la sûreté publique, Gilad Erdan, a affirmé que « tous les terroristes devraient savoir qu’ils ne survivront pas à l’agression qu’ils sont sur le point de commettre. »

Edri et Erdan font écho aux commentaires faits plus tôt par Yair Lapid, chef du parti ostensiblement centriste Yesh Atid.

Déploiement militaire

L’armée israélienne a déployé plusieurs unités supplémentaires en Cisjordanie occupée et autour de la Bande de Gaza, ce qui accroît la présence militaire de 50 % depuis le 1 octobre.

La photographe Anne Paq twitte (@annepaq) le 14 octobre : "de forts affrontements encore en cours à Bethléem avec un drone au-dessus de nos têtes... Les affrontements se poursuivent à Bethléem, des quantités inouïes de grenades lacrymogènes ont été lancées sur les manifestants... Plus tôt, l’un deux avait été blessé à la tête."

Un jeune garçon roué de coups

Un reportage vidéo publié par Middle East Eye montre de jeunes Palestiniens fuyant les soldats israéliens à Surif, village au nord de Hébron en Cisjordanie.

Un soldat réussit à empoigner un garçon, le projetant à terre, avant que plusieurs autres soldats ne commencent à lui donner des coups de pied et de poing. Ils ont ensuite emmené son corps ensanglanté en le traînant.

Les protestations continuent à Gaza, avec les forces israéliennes qui tirent sur les Palestiniens, faisant trois blessés à l’est du camp de réfugiés al-Bureij, où les Palestiniens sont confrontés aux soldats israéliens pour le sixième jour d’affilée, selon le ministère de la santé palestinienne à Gaza.

"Des avions de combat volent actuellement à basse altitude au-dessus de la partie ouest de la ville de Gaza." twitte Mohammed Omer (@Mogaza) le 14 octobre.

Le quotidien Haaretz de Tel Aviv rapporte que les récentes manifestations à la frontière de Gaza avec Israël vont très probablement amener l’état hébreu à construire une nouvelle barrière gigantesque, semblable à celle sur sa frontière avec l’Egypte, isolant encore plus les 1,8 millions de Palestiniens emprisonnés dans le territoire assiégé.

L’armée israélienne a annoncé qu’elle n’enquêterait pas sur les tirs de ses soldats sur des manifestants qui ont tué neuf Palestiniens à Gaza depuis vendredi dernier.

Militarisation de Jérusalem-Est

La police secrète israélienne, le Shin Bet et son armée ont de nouveau exclu la possibilité de mettre en place un bouclage général de la Cisjordanie, qui interdirait aux Palestiniens détenteurs d’un permis d’entrer à Jérusalem-Est occupée et en Israël de franchir les postes de contrôle.

Des responsables auraient dit à la réunion du cabinet de sécurité mardi soir qu’aucune attaque n’a été perpétrée par un Palestinien ayant un permis de travailler en Israël et a indiqué qu’un bouclage global serait condamné comme étant une punition collective.

La police israélienne a néanmoins été autorisée à boucler des quartiers palestiniens de Jérusalem-Est.

Mercredi les forces d’occupation ont commencé à ériger des postes de contrôle à l’entrée des zones palestiniennes.

JPEG - 41.2 ko
La police israélienne fouille les Palestiniens à un barrage routier dans le quartier de Ras al-Amud dans Jérusalem-Est occupée, le 14 octobre. (Oren Ziv ActiveStills)

Jabal al-Mukabir a été complètement bouclé, aucune entrée ou sortie, que ce soit de personnes ou de véhicules, n’est autorisée, selon l’agence Ynet d’Israël.

"A Saint-Jean-d’Acre (Akka), 50 Palestiniens environ ont organisé une veillée en soutien à Jérusalem. La police israélienne a attaqué la veillée et arrêté 22 personnes, parmi lesquelles des enfants" signale le journaliste Budour Hassan (@Budour48) le 14 octobre 2015.

Les ministres israéliens Naftali Bennett et Yisrael Katz ont exigé que le Premier Ministre Benjamin Netanyahou « fasse respecter la souveraineté d’Israël à Jérusalem-Est » et « nettoie les quartiers palestiniens.

Aucun pays au monde ne reconnaît la prétention d’Israël sur Jérusalem-Est, et le Conseil de sécurité de l’ONU a déclaré que sa proclamation de souveraineté sur la cité était « nulle et non-avenue. »

Le commissaire de police par intérim Bentzi Sau s’est vanté que chaque nuit « nous menons des raids d’arrestation dans tous les quartiers ou camps de réfugiés de Jérusalem-Est. »

Pendant ce temps, des milliers de Palestiniens ont assisté aux funérailles de Mutaz Ibrahim Zawahreh, 27 ans, fut abattu par les forces israéliennes lors d’une manifestation dans le camp de réfugiés Dheisheh à Bethléem.


Charlotte Silver est une journaliste américaine indépendante à San Francisco, précédemment basée en Cisjordanie.

15 octobre 2015 - The Electronic Intifada - vous pouvez consulter cet article à
https://electronicintifada.net/blog...
Traduction : Info-palestine.eu - MJB