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Un an après, les bombes israéliennes continuent de tuer
jeudi 13 août 2015 - Mohamed Omer
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La famille Abu Nukira, qui vit dans le camp d’al-Shabura à Rafah, pleure la mort des siens - Photo : MEE/Mohamad Asad

Cela fait presque un an que les armes se sont tues après le sanglant conflit avec Israël qui a pilonné la bande de Gaza, mais la guerre continue à faucher des vies.

Mercredi matin [5 août] les sirènes des ambulances hurlaient à nouveau à travers les rues alors qu’elles se rendaient de toute urgence à l’hôpital Abu Yousef al-Najjar dans la ville de Rafah.

Tout le monde a été réveillé par les sirènes hurlantes. Les résidents comme les patients se sont agités et ont commencé à s’inquiéter de ce qui s’était produit cette nuit-là.

Bientôt, l’horreur de la nuit a émergé tandis que les ambulanciers sortaient les corps d’enfants comme de personnes âgées - toutes victimes d’une bombe israélienne non explosée abandonnée sur place après la guerre de l’été dernier.

Les autorités du secteur de la santé de Gaza ont confirmé que quatre personnes - toutes membres de la famille Abu Nukira - avaient été tuées. Au moins 35 autres ont été blessés dont quatre qui étaient dans un état critique, ont ajouté les mêmes autorités.

Le professeur de journalisme Ayman Abu Nukira a perdu trois parents dans l’explosion. Bien que gravement blessé, il a voulu être transporté sur une civière à l’enterrement de son fils, jeudi en fin d’après-midi.

Le Dr Ashraf al-Qidra, porte-parole du Ministère de la santé de Gaza, a indiqué que la bombe a éclaté au moment où des travailleurs palestiniens voulaient aider les membres de la famille à retirer les décombres d’une maison détruite dans la guerre.

L’été dernier les habitants de Rafah ont enduré une des attaques israéliennes les plus violentes dont on se souvient maintenant sous le nom de Vendredi noir. Durant l’escalade de trois jours [dans les bombardements] qui a éclaté après la capture d’un soldat israélien, le secteur a été durement frappé par les obus des tanks, les bombes et les missiles air-sol israéliens.

Selon un rapport d’Amnesty International et Forensic Architecture publié la semaine dernière, plus de 135 civils palestiniens - dont 75 enfants - ont été tués au cours de la même période dans un épisode qui pourrait constituer un crime contre l’humanité et un crime de guerre israéliens.

Alors que les habitants de Rafah tentent de rassembler leurs vies, ils disent à présent avoir l’impression de revivre ce cauchemar une fois de plus.

Ghassan Saleh - âgé de 21 ans et qui a aidé les ambulanciers à ramasser les restes des corps sur le site de l’explosion - a déclaré à MEE que la réalité d’avoir à assister à de nouvelles et aussi massives funérailles avait réveillé des souvenirs douloureux.

Alors que les blessures semblent nouvelles, ce n’est pas le premier décès dans la bande de Gaza à cause d’une munition non explosée. Il y a eu de nombreux tués au fil des années.

Depuis la guerre de l’an passé, six personnes - dont un journaliste de l’Associated Press et son traducteur palestinien ont été tués. Trois autres ont été blessés lors d’un reportage réalisé sur la façon dont la police palestinienne tente de désamorcer les munitions israéliennes non explosées.

Munitions non-explosées

Ahmed Abu Dayya, directeur du bureau de traitement des explosifs à Gaza a déclaré à MEE : « Les avions de combat de l’occupant ont largué des milliers de tonnes de missiles et d’explosifs, dont certains n’ont pas explosé et représentent une grave menace pour la vie des gens. »

Abu Dayya nous apprend que ses services ont réussi à désamorcer 50 tonnes de missiles non explosés. Quatre membres de son équipe ont été tués dans les opérations de désamorçage après la dernière guerre.

Le Service de l’action anti-mines des Nations Unies (UNMAS) estime qu’il y a au moins 7000 engins et munitions non explosés qui sont encore sous les décombres des près de 100 000 maisons qui, selon les estimations des Nations Unies ont été endommagées ou détruites durant le dernier conflit.

Tant que subsisteront des décombres, la crainte restera que d’autres incidents comme celui-ci ne se produisent.

« Nous avons survécu à la guerre, mais nous craignons d’être tués à tout moment par un des missiles non explosés restés sous les décombres des maisons démolies, » nous dit Ayman Abu Lebda, un résident de Rafah, âgé de 41 ans.

Selon un rapport publié par Handicap International, réalisé après la guerre mais publié le mois dernier, la moitié des 1,8 million d’habitants de Gaza éprouvent une peur et une anxiété quotidiennes à propos des bombes non explosées – une peur alimentée par la connaissance que ces munitions peuvent être n’importe où, depuis les immeubles de bureaux et de commerces jusqu’aux écoles et hôpitaux.

Les décombres ont été retirés de plusieurs parties de la bande de Gaza par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) avec des financements suédois. Toutefois, il existe des centaines de maisons dans la partie sud de la bande de Gaza qui doivent encore être déblayées et déclarées sûres.

« Les travaux de reconstruction à Gaza ne pourront commencer qu’une fois les décombres retirés, » déclare dans le rapport Guillaume Zerr, responsable de la mission de Handicap International dans les territoires palestiniens.

« Cette phase est à très haut risque, compte tenu des grandes quantités de munitions non explosées dans les décombres. La population locale est très exposée, car elle prend souvent en charge elle-même ce travail de déblaiement. »

Les ingénieurs chargés de désamorcer ces missiles font partie des victimes de ce travail, et plusieurs d’entre eux ont été tués depuis l’année dernière.

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* Mohamed Omer est un journaliste palestino-néerlandais renommé, basé à Gaza.

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6 août 2015 – Middle East Eye – Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.middleeasteye.net/news/g...
Traduction : Info-Palestine.eu - Lotfallah