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Tuer est dans la nature du sionisme
dimanche 2 août 2015 - Shahd Abusalama
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Photo retirée des décombres de la maison de la famille Dawabsha. Ali, 18 mois, est mort dans les flammes, tandis que son frère, son père et sa mère sont très gravement brûlés

Ces bombes incendiaires sont tombées dans la chambre où toute la famille dormait paisiblement, mettant le feu à la maison. Les incendiaires ont laissé des graffitis : « Vengeance » et « Vive le Messie », inscrits sur les murs à côté d’une étoile de David, signant ainsi cette attaque atroce. Des témoins les ont vus s’enfuir vers la colonie de Ma’aleh Ephraim, où environ 1800 colons armés vivent sous la protection des forces israéliennes d’occupation.

On a retrouvé le corps calciné du bébé âgé de 18 mois, Ali Dawabsha. Le reste de la famille, le papa et la maman d’Ali et son frère âgé de 4 ans, a survécu à l’incendie, mais ils très gravement blessés. Ce que l’on peut voir à l’intérieur de la maison est horrible : une destruction totale et des murs noircis, des vêtements et des photos calcinés de la famille, posés sur le sol, avec des photos d’Ali et son petit plastron blanc sur lequel on peut lire « Bonjour Maman ».

Cette attaque israélienne est un autre crime dans l’incessante Nakba qu’endure le peuple palestinien depuis qu’existe le sionisme. Ali est un autre Mohammed Abu Khdeir, lui aussi brûlé vif par un groupe de colons à Jérusalem le 2 juillet 2014. C’est un autre enfant palestinien devenu la proie de la machine israélienne à assassiner, alors que les Palestiniens commémorent le premier anniversaire de l’offensive israélienne.

Ce matin, les dirigeants israéliens se sont précipités pour feindre des sentiments humains et condamner l’incendie criminel, le qualifiant « d’attaque terroriste ». Le journal The Times of Israel a écrit que Netanyahu a exprimé son « choc » face à ce qu’il a qualifié « d’acte odieux, horrible », avant de dire, « l’Etat d’Israël traite fermement le terrorisme, peu importe qui sont les auteurs. » Le journal a également signalé que les remarques de Netanyahou avaient été reprises par le ministre de la défense Moshe Ya’alon et les Forces israéliennes de défense.

Dans le même temps, des militaires israéliens lourdement armés se sont répandus à travers la Cisjordanie, appliquant des politiques de punitions collectives contre les Palestiniens et empêchant la colère de s’exprimer. Alors que j’écris ces lignes, plusieurs Palestiniens ont été blessés après l’enterrement du petit Ali Dawabsha. Aux dernières nouvelles, le jeune Laith al-Khaldi, un des blessés, vient de mourir.

En tant que palestinienne bien informée sur l’histoire d’effusion de sang et de dépossession infligée aux Palestiniens, qui porte le traumatisme collectif de leur rencontre avec le sionisme ainsi que les souvenirs de nombreuses et brutales attaques israéliennes contre Gaza, ce prétendu « choc » ne m’a guère frappée. J’ai plutôt été scandalisée par les larmes de crocodile et l’humanitarisme prétentieux affichés par Israël, malgré sa brutale occupation militaire de la Cisjordanie, l’expansion continue de ses colonies, le siège étouffant imposé sur la bande de Gaza qui reste en ruines après l’agression génocidaire de l’été dernier, et son auto-affirmation comme « Etat juif », et non pas un Etat de tous ses citoyens, car il discrimine les citoyens palestiniens d’Israël (Palestiniens de 1948), ou ce que ses dirigeants appellent une « cinquième colonne potentielle ».

Le monde ne doit pas considérer l’incident épouvantable d’aujourd’hui comme un événement exceptionnel. C’est un autre maillon de la mentalité colonialiste sioniste qui voit toujours les Palestiniens comme une menace existentielle, nous déshumanise et nous considère en permanence comme inférieurs et marginaux.

Israël ne peut pas se laver de la responsabilité des actes de ses colons, ni prétendre qu’ils ne sont pas l’expression de sa propre moralité totalement pervertie.

Israël est le seul à blâmer, non seulement parce que cet Etat encourage les colonies illégales à se développer, fournit à ses colons les armes les plus modernes tout en les protégeant avec ses forces « de défense », mais aussi parce que ces actions sont un produit de l’entreprise sioniste de longue date qui, alors qu’elle cherchait à déshumaniser les Palestiniens, a en retour déshumanisé la société israélienne.

Cela est évident dans le discours culturel israélien qui célèbre Israël et le dépeint comme « héroïque », tout en ignorant les coûts politiques et humains subis par les « autres » en raison de ses « succès ». La représentation permanente des juifs comme « victimes », face à des Palestiniens « hostiles » et « terroristes », nourrit aussi cette mentalité. Même les livres des enfants israéliens sont exploités pour diaboliser les Palestiniens et présenter les juifs comme des victimes du terrorisme des « arabes ».

L’attaque d’aujourd’hui ne peut pas être extraite de son contexte. Elle est profondément connectée à la prétendue et tant vantée « guerre d’indépendance » qui a déclaré Israël comme Etat juif après un processus systématique de nettoyage ethnique qui allait des massacres comme celui de Deir Yassin, à la violence psychologique, et a fait près d’un million de réfugiés palestiniens.

Ces actes de terreur reproduisent la même mentalité que celle qui a conduit au massacre de Kafr Kassim de 1956, dont les auteurs ont été graciés et libérés un an après. Une unité de la police des frontières israélienne avait délibérement ouvert le feu sur des Palestiniens de retour de leurs fermes, ignorant du nouveau couvre-feu imposé à leur village. Les tirs ont tué 49 personnes, près de la moitié étaient des enfants. C’est également la même mentalité qui a conduit à la seconde expulsion massive des Palestiniens en 1967.

Selon un soldat israélien, dont le témoignage est paru dans le magazine Haolam Haze, le 10 octobre 1967 :

« Nous avons tiré ces coups de feu tous les soirs sur les hommes, les femmes et les enfants. Même pendant les nuits de pleine lune, quand nous pouvions identifier les personnes et faire la distinction entre les hommes, les femmes et les enfants. Le matin, on fouillait la zone et sur l’ordre explicite de l’officier sur place, on tuait tous ceux qui étaient cachés ou blessés, y compris à nouveau les femmes et les enfants. »

Et encore une fois, c’est la même attitude qui prétend faire porter aux civils palestiniens dans la bande de Gaza la responsabilité de la punition collective et des attaques périodiques qu’ils subissent, lesquelles seraient, selon le vocabulaire israélien déshumanisant, rien de plus que « tondre la pelouse ». La dernière attaque sur Gaza n’était que le dernier épisode de cette guerre, prétendue « d’auto-défense ».

L’incendie criminel devrait être considéré dans ce contexte historique de négation des Palestiniens par l’Etat sioniste et des attaques incessantes contre notre existence même. La plupart des médias internationaux présentent cet acte comme « exceptionnel » avant d’insister sur sa condamnation par les dirigeants israéliens, suggérant ainsi qu’il n’était pas représentatif de la politique israélienne.

Il est absolument représentatif et il doit provoquer l’indignation, non seulement à cause de la violence des colons, mais aussi à cause du régime qui l’a produit, qui vit du terrorisme et continue malgré tout à être célébré dans le discours politique et culturelle occidental, vivant en toute impunité.

Nous devrions exiger non seulement la dénonciation de cette attaque atroce contre le petit Ali Dawabsha âgé de 18 mois, mais la délégitimation d’Israël et de son idéologie sioniste qui produisent et encouragent une telle violence, la justifiant moralement et politiquement.

* Shahd Abusalama est une artiste palestinienne, de Gaza . Elle est actuellement inscrite en Master auprès du département consacré aux Médias et au Moyen-Orient à l’Université de Londres. Elle dispose d’un blog : Palestine From my Eyes, et elle peut être suivie sur Twitter : @shahdabusalama

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31 juillet 2015 - Palestine From My eyes - Vous pouvez consulter cet article à :
https://palestinefrommyeyes.wordpre...
Traduction : Info-Palestine.eu - Lotfallah