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Israël fera tout pour invalider la commission des Nations Unies qui doit enquêter sur les crimes de guerre
lundi 16 février 2015 - Allison Deger
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28 juillet 2014 - Dans le camps de réfugiés d’Aïda, en Cisjordanie, un mur porte les noms des enfants tués à Gaza depuis le début de l’agression israélienne - Photo : AFP/Musa Al-Shaer

Début février, Israël a gagné : Schabas s’est retiré en faisant référence aux allégations israéliennes de parti-pris en faveur du gouvernement palestinien. Il a été remplacé par une ancienne juge à la Cour suprême de l’Etat de New York, Mary McGowan Davis. Après le rapport Goldstone, celle-ci avait présidé le Comité d’experts indépendants des Nations Unies chargé d’examiner les conclusions de la Mission d’expertise indépendante sur les violations des droits de l’homme commises pendant l’opération "Plomb durci" entre décembre 2008 et janvier 2009.

En 2012 Schabas avait été rémunéré 1.300$ pour un travail de consultant à l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) : il avait fourni une analyse juridique concernant la demande de statut d’observateur non-membre. Dans sa lettre de démission, Schabas dit qu’Israël a soutenu qu’il était incapable de neutralité, mais il souligne que conseiller des gouvernements est plutôt habituel dans son métier. Selon l’argument israélien, indique Schabas, il serait toujours inféodé aux Palestiniens, et peut-être même en quête de futures compensations financières.

McGowan a été considérée comme bien plus favorable à Israël. Dans son blog, Norman Finkelstein notait que dans le dernier message de McGowan examinant les crimes de guerre israéliens, elle s’accordait avec Israël pour dire qu’il traitait de manière responsable ses propres investigations sur des crimes de guerre, soulevant la nécessité d’une enquête onusienne. Finkelstein disait aussi que McGowan était responsable de ce que Richard Goldstone avait fait marche arrière sur certaines de ses conclusions originales en 2009.

Mais même une fois Schabas remplacé par McGowan, Israël a rejeté d’avance toutes constatations par l’enquête sur Gaza. Il a dit que « la démission de Schabas ne suffit pas à blanchir le parti-pris fondamental et inhérent à la commission elle-même », via une déclaration par le ministre des Affaires étrangères publiée la semaine dernière.
« L’élimination d’un symptôme ne soigne pas la maladie » a dit Israël, « L’empreinte de Schabas sur le rapport final – à remettre dans un mois – ne peut être purgée après qu’il a dirigé et mené pendant cinq mois les phases de recherche et de collecte de preuves, avec le travail de rédaction déjà entamé ».

Mais le mécontentement d’Israël à l’égard de Schabas remonte plus loin que son contrat de travail pour l’OLP. Dès avant le début de son mandat, Israël avait appelé à la démission de Schabas de la commission.

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« Je suis persuadé qu’il est difficile de continuer à travailler alors qu’une procédure est cours pour examiner si le président de la commission doit être destitué » dit le juriste canadien William Schabas dans sa lettre de démission - Photo : Journal de Montréal

En juillet dernier le ministre des Affaires étrangères publiait un dossier d’information sur l’enquête. A cette époque, Schabas n’avait pas encore formellement accepté de travailler pour la Commission des droits de l’homme. Mais Israël disait déjà que Schabas devait être éliminé parce que, dans des interviews passées, il avait dit que le Premier ministre Benjamin Netanyahou et l’ancien Président Shimon Peres devraient faire l’objet d’une enquête pour crimes de guerre. Le dossier affirmait aussi que Schabas avait pris parti en participant en 2012 au Tribunal Russell, l’instance d’opinion investiguant les crimes de guerre sur le modèle déployé en Afrique du Sud.

En outre, Israël disait que Schabas avait déjà pris sa décision sur la guerre, alors toujours en cours, puisqu’il avait dit à la BBC (selon le ministre israélien des Affaires étrangères) : « Il y a un grand nombre de victimes civiles d’un côté et pratiquement pas de victimes civiles de l’autre, et donc, de prime abord, il y a à l’évidence une réponse disproportionnée d’Israël afin de se protéger lui-même ».

Ensuite en novembre Israël annonçait qu’il ne se conformerait pas à l’enquête de nations Unies, citant nommément Schabas comme source à la fois « d’une hostilité obsessionnelle envers Israël et du mandat partisan de la commission et de ses positions anti-israéliennes publiquement exprimées ». Le ministre israélien des Affaires étrangères avait baptisé l’enquête « comité Schabas » en ajoutant qu’elle était minée de « conclusions prématurées avec la prétention de mener une investigation ».

La déclaration de non-coopération d’Israël invoquait cinq exemples des critiques de Schabas contre Israël et ses dirigeants. En réalité, l’annonce israélienne de ne pas participer à la commission fut imputée à Schabas.

Le même mois, parlant au mémorial de l’Holocauste Yad Vashem à Jérusalem Netanyahou dénigra l’enquête sur Gaza dans un discours où il assimilait le Hamas aux nazis. « Dans la région des régimes dictatoriaux et des mouvements brutaux brutalisent leurs peuples – supprimant les femmes, lynchant les homosexuels, forçant les chrétiens à vivre dans la peur. Et qui le Conseil des droits de l’homme condamne-t-il ? Israël ! »

Enfin, la veille de la démission de Schabas, Netanyahou rencontrait le Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon et lui renouvelait son opposition à l’investigation sur Gaza, la qualifiant « de démarche dangereuse qui pourrait saper la stabilité régionale ».

La commission a dit qu’elle poursuivrait l’investigation et on attend toujours la remise de ses attendus pour le mois prochain. N’empêche qu’Israël n’acceptera aucune de ses conclusions. En dépit de ses déclarations fracassantes, il participerait indirectement, comme l’annonçait l’agence Reuters la semaine passée. Il aurait même renvoyé des documents à la commission des Nations Unies. Certains Israéliens se sont envolés vers Genève pour aller témoigner combien les roquettes du Hamas les ont affectés.

La démission de Schabas ne suffit pas à Israël. Il veut que toute l’enquête soit supprimée et que la communauté internationale se tourne vers le Hamas « et non vers les actions de ceux qui se défendent des terroristes » a dit le Ministre des Affaires étrangères. Comme l’enquête n’a pas encore dévoilé le champ de ses activités, le fait que des Israéliens ont témoigné le mois dernier indique qu’elle a l’intention d’étudier les actions du Hamas.

* Allison Deger est la rédactrice adjointe du site Mondoweiss. Elle peut être suivie sur Twitter : @allissonCD

Consultez également :

- Gaza : des familles entières massacrées... - 5 février 2015
- 2137 Palestiniens, dont des familles entières, tués depuis le mardi 8 juillet 2014 - 25 août 2014

10 février 2015 - MondoWeiss - Vous pouvez consulter cet article à :
http://mondoweiss.net/2015/02/resig...
Traduction : Info-Palestine.eu - AMM