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Une interview de Mahmoud Zwahre, du PSCC
lundi 22 décembre 2014 - Sekina
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Manifestation hebdomadaire et non-violente dans le village palestinien de Al-Ma’asara, contre le mur d’apartheid

Figure importante de l’activisme palestinien, il manifeste chaque vendredi contre l’occupation. Son quotidien se traduit par une lutte continue contre l’occupant, à travers le renforcement de la résistance pacifique, et un combat pour la consolidation des liens entre Palestiniens et pour l’expression au sein de la société palestinienne. Suite à la mort du Ministre palestinien Ziad Abou Ein, il nous livre son impression sur la situation dans les territoires occupés.

Voici le texte de son interview :

Vous étiez présent à l’hôpital où a été transféré Ziad Abou Ein, le ministre palestinien décédé suite à une manifestation aux alentours de Ramallah. Quel est l’origine de sa mort ?

Oui j’y étais présent. C’est un soldat israélien qui l’a abattu. Il l’a attaqué en l’étranglant, ce qui a causé une réaction dans sa gorge, et a endommagé ses capacités à respirer. Cette attaque a entraîné sa mort. Il était dans un bon état de santé avant. Donc, sa mort ne serait pas survenue sans cette attaque.

Une équipe médicale composée d’un médecin palestinien, d’un Israélien et d’un Jordanien a été formée pour déterminer les causes de sa mort. Les trois médecins ont admis que l’attaque du soldat avait causé la mort du ministre. Le médecin israélien l’a notamment confirmé lors d’une interview, mais il a été le seul à ne pas signer le document le confirmant.

Savez-vous comment la manifestation a-t-elle dégénérée ?

La manifestation était pacifique. Les manifestants, dont Ziad Abou Ein, étaient venus planter des oliviers. L’armée se trouvait entre les manifestants et le village où ils souhaitaient planter les arbres. Les soldats ne les ont pas laissé passer, les manifestants ont donc tenté de franchir le barrage militaire de manière pacifique. Mais l’armée les a repoussés de manière violente, en les attaquant physiquement et en lançant des tirs de gaz.

Des mesures ont-elles été prises pour arrêter le responsable de la mort de Ziad Abou Ein ?

Non, jusqu’à maintenant, il n’y a pas eu de poursuites contre le soldat.

Ziad Abou Ein était ministre de l’autorité palestinienne. Quelle était sa fonction, et pouvez-vous nous parler de son combat contre l‘occupation israélienne ?

Il était responsable du domaine du mur et des colonies auprès de l’Autorité palestinienne. Il suivait les violations des droits de l’homme par Israël dans les territoires occupés. Il était un activiste important qui participait aux actions non-violentes. Il cherchait à mobiliser les Palestiniens contre l’occupation.

Israël n’a jamais apprécié son activisme. En 1981, il est arrêté aux États-Unis, puis relâché en 1985, et arrêté de nouveau. Il était mis en cause pour avoir participé à la défense de la cause palestinienne.

Quelles sont, à votre avis, les conséquences de sa mort sur les relations Israël-Autorité palestinienne ?

Il y aura un effet évident sur les relations entre Israël et l’Autorité palestinienne, notamment parce que cette fois, c’est un Ministre, une figure de premier plan de l’Autorité palestinienne qui est mort. Le président de l’Autorité palestinienne a parlé de stopper la coopération sécuritaire avec Israël.

Finalement, elle va continuer, mais Mahmoud Abbas a appelé à la mobilisation de la résistance palestinienne. 99% des Palestinien veulent stopper cette coopération. Cette coopération n’est pas claire, donc la plupart des gens ne savent pas ce qu’elle signifie exactement, mais ils la considèrent comme une collaboration avec Israël et contre la résistance palestinienne.

Pour Mahmoud Abbas, cette coopération sécuritaire est une source de pouvoir. Il affirme aussi qu’elle fait partie du processus de paix. Mais pourquoi respecter des engagements avec Israël alors qu’Israël ne les respecte pas ?

D’un autre côté, si cette coopération stoppe, Israël risque de punir l’Autorité palestinienne. Notamment en stoppant les transferts d’argent. Et s’il n’y a pas d’argent, il n’y a plus de salaires pour les fonctionnaires palestiniens, et donc plus d’Autorité palestinienne. Les Palestiniens ne sont pas prêts à voir l’Autorité palestinienne disparaître, mais ils veulent clairement un changement.

Quelles a été la réaction du Hamas après la mort du Ministre ?

Le Hamas dit vouloir stopper la coopération sécuritaire – qui existe aussi entre le Hamas et Israël dans la bande de Gaza. Mais il n’y a pas d’actions claires prises par le Hamas ou le Fatah pour le moment.

Un évènement comme celui-ci – l’attaque d’un Ministre ou haut responsable palestinien – a déjà eu lieu dans le passé ?

Oui, dans le passé, Israël a attaqué le membre palestinien du Parlement israélien, Fayçal Husseini. Il était responsable du dossier concernant les abus d’Israël à Jérusalem. Il faisait face à une grande pression, et finalement, il est mort au Koweït d’une crise cardiaque.

Ces situations ont le plus souvent lieu à Jérusalem, notamment contre des membres palestiniens de la Knesset.

Une flambée des violences est à craindre ?

Les gens vont réagir, c’est certain. Mais ça ne sera pas à travers une résistance armée. Cela va se traduire par des manifestations, des actions pacifiques.
Hier, un manifestant a été tué à Kalandia. Cela va encore mettre de l’huile sur le feu après la mort du Ministre.

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17 décembre 2014, Ramallah - Transmis par l’auteur