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Comment les vivants sont devenus des martyrs dans les écoles de l’UNRWA
jeudi 23 octobre 2014 - Ola Al Tamimi
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Les forces israéliennes d’occupation n’ont pas hésité à bombarder et à massacrer des Palestiniens réfugiés dans des écoles de l’UNRWA

Lors de la dernière guerre israélienne contre Gaza, le rôle à double tranchant de l’UNRWA se reflétait clairement dans le discours de ses représentants et ses communiqués de presse qui ont contribué à faire des réfugiés un groupe d’individus devant être contrôlé. Ils ont modifié la perception des réfugiés palestiniens en les privant de leur droit à l’auto-défense.

Il y a longtemps, à l’ère de la citoyenneté, les démocraties modernes ont créé un groupe d’individus qu’elles ont qualifié de « réfugiés ». Ce groupe d’individus était privé de tout droit. Des mesures ont été mises en œuvre afin de soustraire ce groupe à toute influence politique (que font-ils ici ? Pourquoi ne rentrent-ils pas chez eux ?). S’agissant des réfugiés palestiniens, les organisations humanitaires adoptent un mécanisme similaire à celui d’entités souveraines et impératives, telles que les forces d’occupation israéliennes ou les pays d’accueil arabes, ôtant toute importance politique aux réfugiés.

Tout comme les autorités israéliennes, l’UNRWA a transformé le peuple palestinien, pourtant doté d’une importance historique et d’un rôle sociétal, en un élément contrôlable. Cette agence traite les réfugiés palestiniens du monde entier comme s’il s’agissait d’un groupe pouvant être contrôlé par l’intermédiaire d’une série de programmes axés sur des actions humanitaires et de secours.

« Laissez-nous passer pour secourir les civils en Syrie »

Ainsi, l’UNRWA s’appuie sur une politique d’utilisation d’images comme moyen de communication, excluant et dissimulant ainsi certains faits et acteurs majeurs des événements photographiés pour se concentrer uniquement sur certains aspects. L’image utilisée par l’UNRWA lors de sa campagne « Laissez-nous passer pour secourir les civils en Syrie » peut être interprétée en ce sens. L’agence pourrait utiliser une image similaire pour ses campagnes de secours et de reconstruction à Gaza après la guerre.

Selon les organisateurs, l’objectif de cette campagne était de rappeler à la communauté internationale et à l’opinion publique la détresse des réfugiés palestiniens en Syrie et la diversité des conditions dans lesquelles les civils y vivent. Autre objectif de la campagne, générer 23 millions de tweets et être diffusée sur les réseaux sociaux.

« On dit qu’une image vaut mieux qu’un long discours. Grâce à votre soutien, cette terrible image montrant des milliers de résidents du camp de réfugiés de Yarmouk attendant l’aide humanitaire sera projetée sur grand écran à Times Square (New York), non loin du siège des Nations unies, permettant aux organisations humanitaires œuvrant sur le terrain en Syrie d’envoyer un message fort à la communauté diplomatique en soulignant le caractère inacceptable de la souffrance permanente des habitants de Yarmouk. L’image sera ensuite projetée sur grand écran à Times Square et l’envoyer par tweet à tous ceux qui ont soutenu cette campagne. »

La description associée à la campagne et à l’image ne fait aucune mention des Palestiniens ou de la souffrance qu’ils endurent au sein du camp de réfugiés de Yarmouk, ce qui contribue à propager la première Nakba et à en créer une nouvelle.

Bien que l’image reflète la souffrance endurée par les personnes, elle néglige les événements quotidiens et d’autres éléments contextuels, tels que la résistance.
C’est la raison pour laquelle les organisations humanitaires ont recours aux images. Elles constituent un outil efficace pour la sensibilisation et la collecte de fonds, même si celle-ci repose sur la douleur et la souffrance des personnes. Les images renforcent également le stéréotype de la détresse des pays du Sud qui ont constamment et désespérément besoin d’aide que seules les organisations humanitaires occidentales sont en mesure de leur fournir.

Les communiqués de presse ont également joué un rôle dans la politique médiatique adoptée par l’UNRWA à l’égard des réfugiés palestiniens.

Les déclarations publiées lors du dernier conflit israélien dans la bande de Gaza en sont une illustration. Au cours de la période précédent les 17 et 22 juillet, les bureaux de l’UNRWA à Jérusalem et à Gaza ont publié des communiqués de presse évoquant l’existence de roquettes dans les écoles de l’agence. Selon ces communiqués, « l’UNRWA a découvert, lors de l’inspection usuelle de ses locaux, des roquettes dissimulées dans une école désaffectée de la bande de Gaza. Suite cette découverte, le personnel de l’UNRWA a été évacué des locaux, c’est pourquoi nous ne sommes pas en mesure d’indiquer précisément le nombre de roquettes ».

Les communiqués précisent également que « l’école est située entre deux autres écoles de l’UNRWA qui accueillent respectivement 1 500 personnes déplacées » et ajoutent que « l’UNRWA condamne fortement et expressément la ou les organisations responsable(s) de cette infraction flagrante à l’inviolabilité de ses locaux en vertu du droit international ». Ils indiquent également que « l’agence a immédiatement informé les autorités compétentes et entrepris toutes les mesures possibles pour le retrait de ses objets afin de préserver la sûreté et la sécurité au sein de l’école. L’agence entreprendra également une enquête approfondie sur les circonstances de cet incident ».

Ces déclarations soulèvent un certain nombre de questions. Par exemple, l’UNRWA n’a pas précisé quelles sont les autorités compétentes qu’elle a informées de la présence des roquettes. Il pourrait s’agir du gouvernement palestinien de Gaza ou de celui de Ramallah, voire des forces d’occupation à Tel Aviv. Elle n’a pas non plus mentionné le nombre de roquettes découvertes le 22 juillet, alors que le communiqué publié par le bureau de Jérusalem le 17 juillet faisait état de la découverte de 20 roquettes.

En outre, on ignore dans quelles écoles ont été découvertes les roquettes. Ceci fait de l’ensemble des écoles de l’UNRWA qui hébergent des réfugiés une cible légitime pour les forces d’occupation israéliennes sous prétexte que des roquettes y sont stockées. En d’autres termes, ces déclarations exposent plus de 160 000 réfugiés aux bombes et aux missiles d’Israël.

Quelques heures après la publication du second communiqué le 22 juillet, les forces israéliennes ont effectivement bombardé l’école de filles du camp de Maghazi, où plus de 300 personnes déplacées avaient trouvé refuge. Dans un communiqué publié après le bombardement, l’UNRWA a déclaré : « l’école préparatoire pour filles du camp de réfugiés de Maghazi [...] a été touchée par des engins explosifs qui ont probablement été tirés par les forces israéliennes ». Cette dernière phrase laisse entendre que l’agence ignore la véritable identité des responsables de l’attaque, rendant ainsi la déclaration ambiguë et sujette à interprétation.

Elle pourrait ainsi être interprétée comme exonérant les forces israéliennes de toute responsabilité quant au sang versé par les martyrs et suggérer indirectement que la résistance palestinienne procède à des bombardements. Cette situation a été complétée par la déclaration émise le 24 juillet par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, dans laquelle il condamne la présence de roquettes au sein des écoles sans connaître les résultats de l’enquête entamée par l’agence.

Le jour de cette déclaration et notamment à Beit Hanoun, des restes d’enfants dispersés dans une école de l’UNRWA abritant des réfugiés ont été découverts suite à une attaque des forces israéliennes. Ce jour là, cinq obus ont été tirés sur l’école depuis des tanks déployés le long de la frontière orientale de Beit Hanoun au nord de la bande de Gaza, entraînant la mort de 20 personnes et faisant plus de 200 blessés, en majorité des femmes, des enfants et des personnes âgées.

Une autre école située à Rafah, au sud de la bande de Gaza, a été prise pour cible en plein jour. Le pire massacre a eu lieu dans l’école Abu Hussein située dans le camp de réfugiés de Jabaliya au nord de Gaza, tuant et blessant des dizaines de personnes malgré le fait que l’agence ait transmis les coordonnées de l’école plus de 17 fois aux Israéliens afin d’éviter les attaques. Ban Ki-Moon s’est rendu hier à Gaza afin d’exprimer sa peine et sa douleur après avoir constaté de ses propres yeux la dévastation provoquée par la guerre israélienne et les déclarations de l’UNRWA.

15 octobre 2014 - Al-Akhbar - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduction : Info-Palestine.eu - Claire L.