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Un ramassis de mensonges a servi de prétexte à l’attaque sur Gaza
jeudi 7 août 2014 - Daoud Kuttab
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Deux frères sont assis sur les décombres de leur maison dans le quartier de Beit Hanoun, alors que la dernière trêve est entrée en vigueur - Photo : AFP

La guerre israélienne contre la bande de Gaza est basée sur le mensonge du début à la fin. Le menteur en chef et l’homme responsable de l’usage disproportionné des armes israéliennes qui ont ôté la vie à presque 2000 Palestiniens — principalement des civils — contre 3 morts civiles israéliennes, n’est autre que le premier ministre israélien Benjamin Netanyahou.

L’attaque sur Gaza a été déclenchée le 29 juin mais l’incitation à la guerre a commencé quand le premier ministre israélien a accusé de manière irresponsable le mouvement islamique Hamas de Gaza d’avoir soi-disant kidnappé 3 Israéliens. Les 3 Israéliens faisaient apparemment de l’auto-stop, le 12 juin, et ils ont été enlevés par des personnes non encore identifiées qui les ont tués peu de temps après, semble-t-il. Un des 3 israéliens a appelé la police et sur l’enregistrement de l’appel on entend le bruit d’un coup de feu. Netanyahou a immédiatement donné la consigne de garder la mort des trois Israéliens secrète.

Dans le Jewish Daily Forward, J.J. Goldberg parle des “décisions politiques et des mensonges” qui sont à l’origine de l’attaque contre Gaza. “On a dit aux journalistes qui avaient entendu parler [de l’appel à l’aide], que le Shin Bet voulait garder le secret pour faciliter les recherches. Les autorités israéliennes ont annoncé officiellement qu’Israël ’assumait qu’ils étaient vivants et agissait en conséquence’. Ce qui était un mensonge pur et simple,” a écrit Goldberg.

Deux semaines après l’enlèvement et quantités de discours anti-Hamas, l’attaque contre Gaza a été lancée sur la base d’une falsification de la réalité. Faisant suite à l’arrestation de centaines de Palestiniens et aux raids aériens israéliens quotidiens à Gaza, la mort d’un combattant palestinien dans une frappe sur Gaza a engendré une escalade de la situation. Le jour suivant, le Hamas, qui avait jusqu’ici respecté le cessez-le-feu conclu en novembre 2012, a rétorqué en tirant un barrage de roquettes. Cela a servi d’excuse à Israël pour commencer le pilonnage de Gaza. Et on ne parle plus des raids aériens israéliens lancés, les jours précédents, au prétexte fallacieux que les chefs du Hamas avaient ordonné l’enlèvement et le meurtre des trois Israéliens.

La vérité est toujours la première victime de la guerre et l’attaque de Gaza ne fait pas exception. Les Israéliens disent qu’ils ont essayé de “frapper durement le Hamas,” mais en réalité ils s’en sont pris aux civils palestiniens qui n’avaient rien à voir avec le Hamas. Le nombre de combattants du Hamas tués dans l’agression est dérisoire en comparaison du nombre de civils dont 300 enfants assassinés simplement parce qu’Israël se moque de savoir qui se trouve à l’autre bout de ses missiles.

Il y a eu une seconde série de mensonges à la fin de l’attaque israélienne contre Gaza, le 2 août, le jour où une trêve de 72 heures devait prendre effet. Israël a affirmé qu’un de ses soldats avait été kidnappé 90 minutes avant le début de la trêve humanitaire. Le Hamas a répondu qu’ils avaient combattu contre des soldats israéliens au coeur de Rafah à 7 heures du matin, une heure avant la trêve, et qu’à 7 H 34 ils avaient annoncé la bataille sur twitter. Le Hamas a dit qu’ils n’étaient pas au courant qu’un soldat israélien ait été kidnappé et que le soldat avait sans doute été tué dans le combat. En réponse Israël a lancé une de ses plus odieuses attaques contre la population de Rafah, causant la mort de près de 100 Palestiniens, en grande majorité des civils. Il s’en est suivi une tempête politique qui a atteint son apogée quand le président des Etats-Unis et le secrétaire général de l’ONU ont "exigé" que le Hamas libère sans conditions le soldat israélien capturé.

Après cette odieuse démonstration de force militaire et de puissance politique, Israël s’est calmé subitement, a reconnu que le soldat était mort et l’a enterré rapidement dimanche après-midi. Quelques heures plut tôt, les médias israéliens rapportaient que Netanyahou, hors de lui, avait martelé à Dan Shapiro, l’ambassadeur étasunien à Tel Aviv, que les Etats-Unis ne devaient plus jamais se substituer à Israël en ce qui concerne le Hamas.

Ce n’est évidemment pas la première fois que Netanyahou ment comme un arracheur de dents. Pour diaboliser le Hamas, le premier ministre israélien l’a assimilé au mouvement radical de l’Etat Islamique (IS) et à al-Qaeda, ce qui n’a rien à voir avec la réalité. En fait, selon Ali Mamouri de Al-Monitor, l’IS considère le Hamas comme un apostat et ses combattants ont brûlé le drapeau palestinien pendant l’offensive actuelle.

Peter Jenkins, un respectable diplomate anglais, a recensé près de 35 affirmations discutables dans un discours que Netanyahu a prononcé devant l’Assemblée Générale de l’ONU en octobre 2013 sur le programme nucléaire iranien et la nécessité pour les Palestiniens de reconnaître Israël comme un état juif s’ils voulaient la paix.

Netanyahou a à nouveau été épinglé en mai 2014 pour avoir qualifié le mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) de mouvement antisémite. “La passion avec laquelle Netanyahou a ridiculisé les voisin d’Israël, menacé l’Iran et discrédité le mouvement BDS en le qualifiant d’antisémite’ … prouve simplement qu’il aurait tout à perdre si la situation venait à être sérieusement débattue. On se rapproche du moment où les mensonges ne suffiront plus,” a écrit Dale Sprusansky, l’adjoint du rédacteur en chef du Washington Report sur les Affaires du Moyen Orient dans un article qui portait sur cinq mensonges prononcés par Netanyahou dans son discours au Comité Américain des Affaires Public d’Israël (AIPAC) en mai dernier.

Tout cela a été corroboré, en 2011, par le président étasunien Barack Obama et l’ancien président français Nicolas Sarkozy qui, sans se rendre compte que le micro était branché, ont convenu que Netanyahou était un menteur.

Les politiciens ont la réputation de fournir des informations trompeuses et/ou exagérées. Les medias dominants doivent normalement vérifier les affirmations des politiciens, ce qui les incite à dire la vérité. Mais ce que dit Netanyahou est rarement vérifié et il peut se permettre de mentir effrontément sans être contredit. Ses mensonges ont causé, le mois passé, des milliers de morts et de blessés. Il est inacceptable qu’un dirigeant comme le premier ministre israélien bénéficie d’une telle impunité. Il faut enfin dire la vérité et, comme les Etats-Unis eux-mêmes l’ont affirmé, il faut que les responsables de crimes de guerre rendent des comptes. On ne doit plus accepter que de tels personnages puissent se cacher derrière des déclarations mensongères et des belles paroles.

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* Daoud Kuttab : journaliste palestinien né à Jérusalem, il a enseigné le journalisme à Princeton et dirige actuellement le Community Media Network, organisation dédiée au progrès du journalisme arabe indépendant . Il est producteur de documentaires et titulaire de nombreuses distinctions. Il est chroniqueur pour Palestine Pulse de Al-Monitor, The Jordan Times, The Jerusalem Post et The Daily Star (Liban).

Du même auteur :

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- Rapport d’Amnesty International : un rappel opportun de la brutale occupation israélienne - 4 mars 2014
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4 août 2014 - Al-Monitor - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.al-monitor.com/pulse/ori...
Traduction : Info-Palestine.eu - Dominique Muselet