La nouvelle porte-parole anglophone du Hamas, Israa al-Mudallal, dans son bureau de presse dans la ville de Gaza, le 6 novembre 2013. (Photo by Wissam Nassar)

Agée de 23 ans, Israa al-Mudallal occupe actuellement un petit bureau dans le département de communication du gouvernement, dans la ville de Gaza. En face d’elle se trouve le bureau d’Ihab al-Ghussein, le porte-parole du gouvernement et le chef du département.

Sa tête couverte d’un foulard beige, Mudallal a mis l’accent sur le message qu’elle souhaitait transmette au monde extérieur.

Elle déclare à Al-Monitor :« Je voudrais modifier la formulation du discours palestinien avec la communauté internationale. Je vais me concentrer sur les aspects humanitaires, notamment les problèmes d’électricité tout en évitant les sujets à scandale, comme la division palestinienne. »

Toutefois, bien que consciente qu’elle sera le porte-parole d’un gouvernement isolé et très éloigné du gouvernement en place en Cisjordanie, dirigé par le Fatah, Mudallal insiste qu’il n’y a aucun problème par rapport à son travail car elle parle au nom de tous les Palestiniens, et non pas des factions divisées et séparées les unes des autres.

Cette nomination fait suite à la stratégie de Ghussein qui ambitionne d’améliorer l’image du gouvernement Hamas véhiculée par les médias internationaux. Il a indiqué que cette initiative s’inscrit dans le cadre de ses nombreux objectifs tracés lors de sa prise de fonction à la tête du service des médias, il y a de cela une année. Et assigner le poste de porte-parole à une femme trilingue constitue un grand pas dont la réalisation s’est faite en une année.

Ghussein explique à Al-Monitor : « J’ai consulté les responsables au gouvernement et l’idée a très bien été accueillie par tous. » Et d’ajouter : « Le choix d’une femme à ce poste était intentionnel. En effet, l’objectif étant de briser les stéréotypes afin d’embellir l’image du Hamas devant le monde entier ; une image jusqu’ici représentée par l’oppression des femmes ».

« Nous avons depuis toujours affirmé que nous ne sommes pas contre la participation et l’implication de la femme dans tous les aspects de la vie, mais bien évidemment, les actes sont plus éloquents que les paroles, » a-t-il noté, tout en soulignant : « J’ai choisi Israa parmi une douzaine de noms car j’étais convaincu que c’était la bonne personne à la bonne place. »

La jeune Mudallal a vécu à Bradford, au Royaume-Uni. Elle a étudié au lycée pendant deux ans, avant de retourner à Gaza et poursuivre sa troisième année du secondaire au lycée publique du territoire. Mudallal a ensuite étudié le journalisme à l’Université Islamique. Avant sa nomination au sein du gouvernement Hamas, la jeune porte-parole présentait une émission-débat sur Al-Kitab une chaine satellite de l’université.

En acceptant ce poste, Israa Mudallal est consciente que sa nouvelle mission limitera ses mouvements et ses déplacements à travers le monde, mais elle avoue être prête à relever le défi et à faire ce sacrifice dans le but d’afficher une meilleure image du Hamas, considéré par de nombreux États occidentaux comme une organisation terroriste.

« Je ne veux pas anticiper les évènements et appréhender ce qui ne s’est pas encore produit. Toutefois, si je rencontre n’importe quel souci, je le considérerais comme le prix de mon engagement et un sacrifice pour mon pays, » a-t-elle affirmé.

Il a donc fallu huit mois pour que la jeune femme décide d’accepter le poste au gouvernement. Une décision qui implique l’abandon de son ancien poste et notamment son public à cause duquel elle a eu beaucoup de mal à prendre sa décision.

« Lorsque j’étais présentatrice à la télévision, je choisissais moi-même chaque mot que je prononçais. Mais plus maintenant. Aujourd’hui, je représente un gouvernement, » a-t-elle expliqué.

En charge des contacts avec les médias occidentaux, Israa Mudallal, à l’instar de tous les journalistes dans Gaza, n’est cependant pas autorisée à communiquer avec les médias israéliens, se tenant ainsi à la décision du Hamas imposée en décembre 2012 sur les journalistes Palestiniens de Gaza.

Pour sa part, le quotidien israélien The Jerusalem Post a rapporté que la Radio Militaire Israélienne a tenté de rejoindre Mudallal au téléphone, mais cette dernière s’en est excusée.

Citée par le quotidien, Mudallal aurait répondu : « Aucun média à Gaza ne communiquera avec Israël ; c’est inacceptable et je vous présente mes excuses. »

Par ailleurs, Ghussein juge assez satisfaisantes les réactions à cette nomination . Il ajoute : « Personne n’a critiqué notre démarche, du moins les responsables. Je souhaite que cette initiative parvienne à atteindre les objectifs escomptés sur le long-terme, à savoir représenter la Palestine telle qu’elle devrait être perçue. »

Ayant déjà travaillé avec des militants internationaux pro-palestiniens, Mudallal est une habituée des publics et auditoires internationaux. Toutefois, elle reconnait que traiter avec des journalistes étrangers serait une toute nouvelle expérience. Elle affirme : « Je suis consciente de l’énorme responsabilité qui m’a été confiée, mais j’espère être à la hauteur et relever le défi, avec le temps. »

Mudallal a, par le passé, été correspondante pour la chaîne de télévision iranienne anglophone Press TV, en plus de la chaîne locale Al-Kitab. Elle affirme ne pas craindre que son travail la classe dans la catégorie d’un modèle donné de journalistes.
« Dans tous mes passages professionnels, j’ai appris de nouvelles choses. Cette fois, je vais m’atteler à soutenir ma cause, la cause Palestinienne partout où je vais. »

* Abeer Ayyoub est une contributrice à Al-Monitor Palestine Pulse. Elle est diplômée de l’Université islamique de Gaza avec un baccalauréat en littérature anglaise. Après des travaux de recherche sur les droits de l’homme, elle est devenue journaliste dont le travail a également paru dans Al Masry Al-Youm, Al Jazeera et Haaretz. Sur Twitter : @ Abeerayyoub

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