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Tandis que Hamas et Fatah s’empoignent à propos de l’Égypte, le mouvement Tamarod en Palestine prend de l’ampleur
vendredi 26 juillet 2013 - Asmaa al-Ghoul
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Des membres Palestiniens des forces de sécurité gardent à la frontière entre l’Égypte et la Bande de Gaza, le 5 juillet 2013 – Photo : Reuters/Ibraheem Abu Mustafa

Un mouvement palestinien appelé Tamarod - ce qui signifie « rébellion » - a créé une page facebook le 1er juillet, qui atteint aujourd’hui le nombre de 18 000 membres. Le mouvement tire son nom du mouvement égyptien qui a provoqué la révolution du 30 juin.

Dans sa première déclaration, Tamarod affirme : « Nous représentons une initiative indépendante, affiliée à aucun parti, mouvement, faction ou autorité. Nous représentons une initiative de la jeunesse, dont le but est de faire entendre sa voix et de rendre possible sa participation politique. »

Le mouvement, dont le slogan s’apparente a celui de la Révolution égyptienne du 25 janvier [2011] « Liberté, dignité et justice sociale », s’adresse au peuple palestinien : « Ô Palestiniens, révoltez-vous contre l’oppression, révoltez-vous contre ceux qui entravent les élections. Aucun d’entre eux n’est légitime ; leurs mandats ont tous expiré. La seule légitimité est celle du peuple. Notre mouvement, en Cisjordanie et à Gaza est un mouvement pacifique dont l’objectif est clair : retrouver la vraie légitimité, celle du peuple. »

Al-Monitor, le site d’information et d’analyse sur le Moyen-Orient, a tenté de contacter les acteurs clés du Hamas afin de recueillir leur avis, mais la majeure partie d’entre eux s’est gardée de tout commentaire sur la question, considérant la situation trop sensible.

Yahi Moussa, député du Hamas, a déclaré à Al-Monitor le 8 juillet dans un entretien téléphonique : « Il y a un accord entre les organisations dans Gaza de s’abstenir de tout commentaire ».

Bassem Naim, conseiller du premier ministre du gouvernement de Gaza pour les affaires internationales, a déclaré : « Naturellement, la situation interne en Égypte a eu un impact sur la vie quotidienne des Palestiniens, en particulier suite à la fermeture du passage de Rafah, qui aggrave actuellement la situation humanitaire à Gaza et aura une incidence sur la situation économique ». Naim a considéré que la décision prise le 9 juillet 2013 de rouvrir le passage frontalier et de laisser passer ceux qui sont demeurés du côté égyptien, n’était pas suffisante pour répondre aux besoins des 1,7 millions de gazaouis.

S’adressant à Al-monitor le 9 juillet, Naim a ajouté : « la cause palestinienne représente la cause des nations arabo-islamiques et ne sera pas influencée par un quelconque événement, étant donné qu’il s’agit d’une cause légitime et qu’elle a déjà traversé de grandes difficultés. La relation entre l’Égypte et la Palestine s’établit par delà les partis et les politiques ; cette relation a une profondeur historique : nous sommes des pays voisins ».

L’une des rares réactions sorties du Hamas a été une déclaration publiée le 8 juillet, suite à la mort d’une dizaine de membres des Frères Musulmans et de deux gardes du corps présidentiels dans une même matinée. La déclaration a été publiée sur la page facebook d’Izzat al-Rishq, membre du bureau politique du Hamas. On pouvait y lire : « Le Hamas condamne le massacre qui a coûté la vie à une douzaine de civils ce matin ».

« Le mouvement exprime sa profonde peine et son chagrin suite à la mort de ces victimes. Il appelle à mettre un terme aux effusions de sang qui s’abattent sur le peuple égyptien, si cher à nos yeux. Nous présentons nos condoléances aux familles des victimes. »

Dans une déclaration datée du 8 juillet, le Hamas a accusé le Fatah de diffamation envers le mouvement. Le Hamas a affirmé qu’il s’était procuré des documents officiels prouvant que le Fatah a élaboré et fourni aux médias égyptiens des histoires mensongères destinées à dresser les Égyptiens contre le peuple palestinien. Plus tôt, le Fatah a demandé au Hamas de ne pas interférer dans les affaires égyptiennes.

De son côté, le gouvernement Hamas a affirmé au cours de la session tenue le 9 juillet 2013, que le Fatah avait tenté d’impliquer le Hamas dans les affaires internes des autres pays. Le gouvernement a appelé à cesser une bonne fois la diffusion de telles absurdités.

Dans une première réaction venue du Hamas concernant la crise qui a affecté l’Égypte, le Premier Ministre Ismail Haniyeh a déclaré que les changements en Égypte n’auront pas d’impact sur la cause palestinienne, car celle-ci représente une revendication essentielle pour la nation arabo-islamique.

A l’occasion d’un discours délivré le 5 juillet 2013, Haniyeh a fait allusion à la déposition de Morsi par l’armée égyptienne, déclarant que cela n’aurait pas d’impact sur les politiques égyptiennes à l’égard de Gaza et de la cause palestinienne.

En se demandant si le Hamas allait surmonter la peine et la frustration causées par le départ de Morsi, Nouhad al-Sheikh Khalil, spécialiste en histoire moderne, pense que le Hamas n’est pas seul. En fait, le Hamas a des liens avec tous les partis en Égypte, et son destin n’est pas lié à un seul parti. Le Hamas définit ses liens avec les pays en fonction de leur engagement envers la cause palestinienne et l’unité de la nation. Le mouvement ne dépend de personne en particulier.

Dans une interview téléphonique avec Al-Monitor le 8 juillet, Khalil a déclaré ne pas renier le fait que le Hamas soit en parenté avec les Frères Musulmans. Toutes les organisations des Frères Musulmans coopèrent et s’organisent les unes avec les autres, ce n’est pas un secret. Pourtant, ils n’interviennent pas dans leurs affaires internes ; les Frères Musulmans égyptiens sont liés au président Palestinien Mahmoud Abbas en Cisjordanie, et le Hamas a coopéré avec des mouvements opposés aux Frères Musulmans en Égypte.

Khalil, auteur de l’ouvrage Internal Structure of the Muslim Brotherhood in Gaza : 1967-1987, souligne : « Si ceux qui ont évincé Morsi croient qu’ils agissaient dans la continuité de la Révolution du 25 janvier, la question de Gaza aura pour eux valeur de test ». Khalil déclare que même si le blocus sur le mouvement s’intensifie et atteint son point culminant, il ne pourra être plus rude que le blocus de 2007.

De son côté, l’analyste politique Mukhaymar Abu Saada a déclaré, dans une interview téléphonique avec Al-Monitor le 8 juillet, que les répercussions de l’éviction de Morsi sur les groupes politiques islamiques, y compris le Hamas, sont similaires à ce qui s’est produit en 2007. Le Hamas avait été politiquement et internationalement assiégé. « Aujourd’hui, la situation est encore pire. Lorsque le Hamas a été assiégé en 2007, il bénéficiait du soutien de l’Iran et de la Syrie.

Désormais, les relations avec l’Iran et le Hezbollah sont tendues et hostiles, alors que les liens avec la Syrie sont brisés.

Personne ne peut prévoir comment les choses vont évoluer avec le Qatar, après le couronnement du nouvel émir. »

Abu Saada a ajouté que « la Turquie, qui a récemment connu des difficultés, demeure le seul allié politique du Hamas. La Tunisie est en situation de faiblesse puisque son gouvernement de coalition comprend à la fois des partis laïcs et islamiques. Le Hamas est totalement isolé et est désormais un ’orphelin’ politique, comme il est présenté par certains journaux. Pourtant, cela ne signifie pas que le mouvement est faible sur le plan interne : cette situation pourrait le rendre plus fort du point de vue de son influence à Gaza. »

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* Asma al-Ghoul est journaliste et écrivain, du camp de réfugiés de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza.

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11 juillet 2013 – Al-Monitor – Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.al-monitor.com/pulse/ori...
Traduction : Info-Palestine.eu – Clémence D.