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Les habitants de Gaza toujours bloqués à la frontière avec l’Egypte
mercredi 17 juillet 2013 - Rami Almeghari
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Voyageurs palestiniens toujours bloqués à la frontière de Rafah - Photo : APA/Eyad Al Baba

Marouf est maintenant de retour en Tunisie, après avoir été expulsé d’Égypte et où il avait déjà passé une semaine pour assister à une conférence sur les médias.

Il est l’un des milliers a avoir été affectés par l’interdiction imposée par l’Égypte aux Palestiniens de traverser le pays pour retourner à Gaza, l’Égypte étant la seule voie d’accès pour la grande majorité des habitants du territoire assiégé..

Le passage de Rafah, à la frontière entre l’Égypte et Gaza, situé à six heures de route de l’aéroport du Caire, est le principal débouché vers le monde extérieur pour près de 1,7 million d’habitants de Gaza en raison du blocus terrestre, maritime et aérien imposé par Israël.

L’Égypte a verrouillé le passage de Rafah après l’éviction par l’armée du président élu Mohammed Morsi, le 3 juillet, bloquant ainsi des milliers de Palestiniens à l’étranger.

« Pour moi, personnellement, j’ai eu la chance d’obtenir un visa de retour en Tunisie avec l’aide des organisateurs de la conférence », a déclaré Marouf. « Beaucoup d’autres voyageurs avec qui j’étais bloqué avaient des difficultés à obtenir de nouveau un visa vers le pays d’où ils étaient venus. Nous avons récemment appris que la décision des autorités égyptiennes est toujours appliquée et il n’est pas possible pour des centaines de Palestiniens de retourner à Gaza ».

Après le bouclage de Rafah, l’Égypte a commencé à expulser les habitants de Gaza au fur et à mesure de leur arrivés à l’aéroport du Caire, et a demandé aux compagnies aériennes internationales de refuser l’embarquement aux détenteurs de passeports de l’Autorité palestinienne, sur les vols à destination du Caire.

Yousef Aljamal, un contributeur à The Electronic Intifada, était parmi ceux expulsés après avoir débarqué au Caire en provenance de Malaisie la semaine dernière, sur le chemin du retour vers Gaza. Aljamal a rapporté avoir vu des dizaines d’autres Palestiniens expulsés vers l’Algérie, la Jordanie, le Pakistan, le Canada et la Malaisie.

L’Égypte a également expulsé des centaines de Syriens qui arrivaient dans le pays, certains fuyant la guerre civile, en imposant une nouvelle règle qui est d’obtenir un visa à l’avance.

« C’est totalement injuste que les autorités égyptiennes semblent blâmer tous les Palestiniens pour certaines actions ici et là à travers l’Égypte », a déclaré Marouf. « C’est totalement injuste que les familles et les enfants soient renvoyés de cette façon sous le prétexte de l’instabilité de la sécurité en Égypte. »

La séparation forcée des familles et les déportations sont particulièrement cruelles durant le mois de Ramadan qui a débuté cette semaine, a ajouté Marouf.

Calomnies anti-palestiniennes

Il y a eu plusieurs attaques contre des postes de l’armée égyptienne par des militants dans la péninsule du Sinaï depuis le putsch militaire, et les responsables militaires égyptiens ont à plusieurs reprises accusé les Palestiniens et le Hamas, qui dirige le gouvernement de Gaza, de participer à ces attaques. Mais aucune preuve tangible ne soutient ces accusations

Lina Atallah et Mohamad Salama Adam, du site indépendant d’informations Mada Masr, ont rapporté le 9 juillet que les affirmations militaires concernant l’instabilité dans le Sinaï, utilisées pour justifier la fermeture de Rafah, sont exagérées.

Un juge égyptien, qui s’est félicité du putsch de l’armée, a même accusé le Hamas de la pénurie de carburant qui avait frappé l’Égypte dans les jours précédant l’éviction de Morsi. Le juge a affirmé, dans le New York Times le 10 Juillet, que le gouvernement Morsi avait retenu l’approvisionnement en carburant pour les Égyptiens afin de pouvoir fournir Gaza. Cette affirmation, aussi totalement dénuée de fondement que le reste, fait écho aux rumeurs anti-palestiniennes omniprésentes dans les médias égyptiens.

Peu de répit

Le terminal de Rafah a été rouvert pendant quelques heures mercredi et jeudi, après six jours consécutifs de fermeture. Mais selon des responsables palestiniens, le problème de plusieurs centaines de voyageurs bloqués à la frontière avec Gaza, dont des pèlerins qui ont été en Arabie Saoudite, n’a pas encore été résolu.

Malgré le nombre grandissant de personnes bloquées des deux côtés de la frontière entre Gaza et l’Égypte, seuls les malades, les détenteurs de passeports étrangers et égyptiens ont été autorisés à entrer en Égypte à partir de Gaza.

« Je suis ici depuis la visite à ma sœur et à mon grand-père malade, il y a presque un mois », nous déclare Thaer Almadhoun, un citoyen canadien palestinien, tandis qu’il attendait du côté de Gaza au terminal de Rafah. « J’avais l’intention de retourner au Canada avant le 23 juillet, mais comme la situation est instable en Égypte et que le passage était fermé, j’ai décidé de tenter de traverser aujourd’hui », a expliqué Almadhoun.

Il craint en effet les effets de son retard sur son entreprise de construction au Canada.

« Les conditions de vie [dans la bande de Gaza] sont très mauvaises avec le manque de matières premières et de produits de base, y compris l’essence, l’électricité et même la difficulté de changer leur monnaie principale, le shekel [israélien] » », a déclaré Almadhoun. « J’espère que je pourrai traverser Rafah, puis prendre l’avion pour le Canada. »

Almadhoun était l’un des près de 400 voyageurs qui ont été autorisés à franchir la frontière le mercredi.

Situation difficile

De l’autre côté de la frontière, les autorités égyptiennes ont permis à plus de 1200 palestiniens restés bloqués - des malades des étudiants et des personnes qui avaient rendu visite à leur famille en Égypte - de retourner à Gaza mercredi.

Khitam Abdulrahman, une femme dans la cinquantaine, a traversé le terminal pour rentrer à Gaza après avoir été forcée de rester dans la ville égyptienne de Cheikh Zuwayid à quelques kilomètres du terminal de Rafah.

« Dieu merci, j’ai été hébergée par une bonne et gentille famille à Sheikh Zuwayid, « nous dit Abdulrahman, de retour à Gaza après être restée presque une semaine bloquée de l’autre côté. « Je ne pouvais pas retourner au Caire après que le terminal a été fermé jeudi dernier. »

Abdulrahman avait été au Caire pendant trois semaines pour le traitement d’une blessure au genou.

Elle a ajouté qu’elle avait eu la chance de trouver un endroit pour séjourner près de la frontière de Gaza, « mais tous ceux qui sont contraints de rester près de la frontière s’inquiètent car nous nous demandons ce que nous avons à faire avec ce qui se passe en Égypte. Ils devraient nous permettre de retrouver nos familles dans, Gaza au lieu de boucler le terminal de Rafah ».

D’autres habitants de Gaza, comme Hazim al-Bashiti, dormaient du côté égyptien dans le passage lui-même.

« J’ai été coincé au passage frontalier pendant les six derniers jours. La situation était très difficile. Les hommes, les femmes et les enfants voulaient revenir à Gaza pour observer le mois sacré du Ramadan avec les membres de leur famille », a déclaré al-Bashiti, âgé de 30 ans, qui avait également été en dehors de Gaza pour un traitement médical.

Les fermetures répétées

Depuis plus d’un an maintenant, le terminal de Rafah a été souvent fermé par l’Égypte, et les Palestiniens ont dû subir de longs retards et des refus arbitraires.

Selon les responsables palestiniens, les autorités égyptiennes retournent deux à trois cars de voyageurs presque quotidiennement - que ce soit pour des raisons de « sécurité » ou lorsque les fonctionnaires frontaliers disent que leur journée de travail est terminée.

« La plupart des gens qui voyagent le font par nécessité, comme des malades en traitement ou des étudiants. Chaque jour, nous nous demandons pourquoi ils renvoient cinquante à cent voyageurs », a déclaré à The Electronic Intifada Khaled al-Shaer, directeur du côté Gaza du terminal de Rafah, juste avant la fermeture prolongée de ce moment.

« Nous sommes en contact permanent avec les responsables égyptiens au point de passage. Parfois, certains de ces fonctionnaires montrent de la sympathie envers les voyageurs » , a déclaré al-Shaer.

« Mais nous attendons un changement réel du système de gestion du passage de Rafah, d’une façon qui permettrait des mouvements plus fluides pour nos voyageurs palestiniens. Les restrictions de voyage sont toujours là. Par exemple, certains jours 500 voyageurs peuvent traverser, les autres jours 700 et parfois 1000 », a ajouté al-Shaer.

Rafah a été fermé ce vendredi, a rapporté l’agence de nouvelles Ma’an, car c’est généralement le jour de repos hebdomadaire, bien que les responsables palestiniens aient espéré qu’il resterait ouvert pour permettre à ceux qui sont encore bloqués à l’extérieur de Gaza de rentrer chez eux.

Le terminal doit rouvrir samedi pour les malades et les détenteurs d’un passeport étranger.

Pour les Palestiniens encore à l’étranger, avec parmi eux Salama Marouf qui a été expulsé vers la Tunisie, l’incertitude et l’attente se poursuivent alors que les troubles politiques en Égypte s’éternisent.

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* Rami Almeghari est journaliste et conférencier universitaire dans la bande de Gaza.

Son courriel : rami_almeghari@hotmail.com.

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12 juillet 2013 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/conte...
Traduction : Info-Palestine.eu - Naguib