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Faire la paix n’a jamais fait partie de la politique d’Israël
vendredi 20 avril 2007 - Meron Benvenisti

Le scepticisme de rigueur affiché face à toute offre de paix a toujours caractérisé la réaction de presque tous les gouvernements israéliens depuis 1949, et pas seulement depuis l’année 1967 qui a vu l’occupation des Territoires. Quand Ehoud Olmert fait des réserves sur l’initiative arabe de paix, il marche sur la trace [de ses prédécesseurs et] de Moshe Dayan qui disait il y a un demi-siècle déjà : « Je suis contre toute concession de quelque la nature qu’elle soit, et si les Arabes veulent la guerre, je n’y suis pas opposé. »

Les gouvernements israéliens sont toujours prompts à lancer des opérations militaires mais ils sont toujours lents à se contrôler ou à rechercher des compromis et signer des accords. Après tout, il est toujours possible de justifier une agression en prétendant répondre à l’attaque de l’ennemi. La définition de la provocation, comparée à la réponse à la provocation, est seulement une question de perspective. Quand il y a un cycle perpétuel de violence et de contre violence, chaque cause aux yeux des uns a un contre effet chez les autres. En effet, il y a beaucoup d’exemples dans lesquels les uns ont lancé des provocations qui ont servi de prétexte à une réponse disproportionnée et, qui à son tour, a alimenté le cycle de violence.

Derrière les slogans : « guerre qui nous est imposée » et « guerre malgré nous », se cache une vieille attitude qui veut que l’usage de la force serve des buts stratégiques, tels la conquête de territoires ou le maintien des avantages territoriaux acquis au cours des précédentes guerres.

Le rejet des initiatives de paix est justifié sur le plan idéologique par les gouvernants israéliens qui veulent faire croire que l’hostilité des arabes est permanente, qu’ils manquent de volonté pour voir dans Israël une entité légitime, que la nature violente de la région ne permet pas d’aboutir à un accord de paix véritable mais tout au plus à un cessez-le-feu qui sera violé aussitôt que les ennemis d’Israël le verront faiblir.

Cette approche méprisante à l’égard de toute tentative de paix, s’est exprimé dans le fait que le rejet de l’offre de paix arabe n’a rencontré quasiment aucune protestation dans la société israélienne, excepté parmi un petit groupe d’activistes de la paix. Cette guerre éternelle de « nous n’avons pas le choix » a même bien plus d’impact sur la mentalité du public parce qu’il s’est mis en colère contre ses dirigeants pour n’avoir pas remporté une victoire éclatante [guerre du Liban] et donc d’avoir montré que le pouvoir militaire israélien n’était pas dissuasif, alors qu’il doit être gravé dans la mentalité de ses ennemis.

L’envie de sanctionner les dirigeants ne provient pas seulement des échecs dans la conduite de la guerre, mais également du fait que leur conduite a mis à nu l’abîme profond entre la belligerance ardente de généraux arrogants et leur manque de motivation et leur incapacité de mener à bien leur mission d’une part, et d’autre part l’érosion du consentement du public de supporter le deuil et surtout, sa réticence à renoncer à une vie meilleure en faveur des demandes d’une guerre éternelle « sans avoir le choix ».

La mise à nu de cet abîme est impardonnable. Parce que si telle est la situation, comment est-il possible de persister dans la prétention d’une « guerre au profit de notre existence », qui rejette toute possibilité de dialogue ?

En présentant ses excuses, le Premier ministre a dit : « Le Seigneur Tout Puissant nous a bénis par un miracle qui a fait que la situation est arrivée aujourd’hui et non, par la grâce de Dieu, dans deux ou trois ans. » Ehoud Olmert faisait référénce ici à l’accroisssement des forces de l’ennemi, mais il aurait été plus inspiré s’il avait parlé de ce qui a été vraiment révélé dans la deuxième guerre du Liban : le public israélien a eu assez du mythe de l’invincibilité d’Israël sur le champ de bataille et il souhaite mener une vie normale.

Quelque chose s’est produit depuis les années 50, et le public n’est pas effrayé par la « désacralisation de la défense » et sa transformation en une question irrévérencieuse, vidée de pathos. Un chef audacieux découvrira que ce n’est pas le conflit qui empêche la normalisation, mais l’absence de normalisation qui empêche de mettre fin au conflit.

Meron Benvenisti - Ha’aretz, 12/04/2007 :
The stale myth of battlefield bravado
Traduit de l’anglais par D. Hachilif

Par le même auteur :
- Diviser pour régner
- Les temples de l’occupation