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Roger Waters va faire tomber les murs
jeudi 6 décembre 2012 - Paris-Match

Deux ans après avoir rempli quatre soirées à Bercy avec « The Wall », l’ancien Pink Floyd investira en 2013 le Stade de France pour mettre un point final à cette tournée historique et politique.

Interview Benjamin Locoge - Paris Match

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Roger Waters va faire tomber les murs
A Québec, en juillet 2012. Pendant la chanson « Another Brick in the Wall, part II », une marionnette géante se déploie sur la scène pour mieux dénoncer l’autorité du pouvoir. En médaillon, Roger Waters.
Photo REUTERS/Mathieu Belanger




Paris Match. En vous lançant dans cette tournée, imaginiez-vous un tel succès ?

Roger Waters. J’avais pressenti que la première partie se passerait bien, les billets s’étant écoulés dès la mise en vente. Mais je n’avais pas imaginé finir dans les stades. Avant d’en arriver là, il a fallu faire évoluer le show.

Cette réussite est-elle une forme de revanche par rapport à vos anciens camarades de Pink Floyd ?

Une revanche, non. Mais c’est très gratifiant… En 1987, quand j’ai voulu défendre mon disque “Radio Kaos”, je jouais devant 15 000 personnes, pendant qu’eux [les trois autres membres du groupe jouaient sous le nom de Pink Floyd] faisaient 150 0000 dans le stade d’à côté. C’était un peu dur, même si je dis souvent que cela m’a permis de forger mon caractère. Je suis donc plus qu’heureux que les gens soient là, que beaucoup de jeunes se pressent à mes concerts. Toute une nouvelle génération a découvert Pink Floyd grâce à ce spectacle.

Plutôt que de venir écouter Roger Waters ou Pink Floyd, le public ne vient-il pas voir “The Wall” ?

Absolument, c’était la même chose en 2006 et 2007 quand je jouais l’album “Dark Side of the Moon”. Ces disques sont des marques à part entière. On achète “The Wall”, on écoute “Dark Side of the Moon”, ils ont forgé l’histoire de la musique. Les gens le savent, ils y sont attachés. Et je crois aussi qu’ils sont désormais attachés aux valeurs et à la politique que je défends.

Vous considérez que les spectateurs viennent assister à un meeting ?

Ils viennent parce qu’ils savent qu’il y a un humain derrière toutes ces chansons, un homme avec des convictions. Il m’a fallu du temps pour être considéré comme un artiste politique. Les premiers disques de Pink Floyd n’étaient pas spécialement engagés ! Sur le premier album, aucune des chansons de Syd Barrett n’est engagée. Mais sur le second, j’ai écrit “Corporal Clegg”, par exemple, qui évoque quelqu’un qui rentre de la guerre. Ma vraie première chanson politique c’est “Echoes”, sur le disque “Meddle”, qui développait l’idée que les hommes sont fondamentalement semblables. Seul leur lieu de naissance diffère.

« “The Wall” a forgé l’histoire de la musique »

A cette époque, on ne vous voyait pas comme un artiste politique…

Peut-être, mais moi je l’étais déjà, contrairement aux autres membres du groupe. Je ne suis même pas sûr qu’ils aient compris le sens de cette chanson. Nous étions différents, nous le sommes toujours, et c’est l’une des raisons pour lesquelles Pink Floyd s’est séparé.

Lors des premières dates de “The Wall” en 2010, certains critiques se sont élevés contre les images religieuses que vous diffusez durant le concert. Les avez-vous pris en compte ?

C’est une polémique montée par un lobby juif américain qui pleurniche pour n’importe quoi. Ils ont vu le concert et ont crié à la récupération de l’étoile de David. Mais mon message est bien plus limpide. Il y a des croissants, des faucilles, des marteaux, des croix, je veux juste montrer que l’on est bombardé par les symboles, l’idéologie et le commerce. Et que cela n’est pas bon. Mais, vous le savez peut-être, je suis très impliqué dans le conflit israélo-palestinien, j’étais juré dans le tribunal pour la paix en Palestine de New York. Ce qui me vaut d’être souvent surnommé en Israël le “nazi juif”…

Vous n’irez donc pas jouer “The Wall” à Tel-Aviv ?

Certainement pas ! Je suis pour le boycott d’Israël, j’y ai beaucoup réfléchi. Tout comme cela n’aurait pas été approprié d’aller chanter en Afrique du Sud pendant l’apartheid, quand Mandela était encore sous les verrous. La Cour internationale de justice a tranché : l’occupation des territoires et de la bande de Gaza est illégale, le blocus imposé par le gouvernement est illégal, la construction du mur est illégale. C’est pour me battre contre cela que je fais de la musique. Point final.

En concert le 21 septembre 2013 au Stade de France, à Saint-Denis.

2 décembre 2012 - Paris-Match