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Israël mis en garde : situation explosive alors que des grévistes de la faim palestiniens frôlent la mort
lundi 14 mai 2012 - Harriet Sherwood
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Palestiniens protestant devant le QG du Comité International de la Croix Rouge à Gaza (Mahmud Hams/AFP/Getty Images)

En Cisjordanie et à Gaza, les manifestations de soutien à quelque 2.000 prisonniers palestiniens en grève de la faim prennent de l’ampleur tandis que des médiateurs égyptiens s’efforcent de négocier un accord pour éviter que la spirale protestataire n’échappe à tout contrôle au cas où un détenu meurt.

Deux prisonniers qui refusent de s’alimenter depuis 77 jours seraient proches de la mort et six autres seraient dans un état critique, selon des groupes palestiniens. L’administration pénitentiaire israélienne (IPS) dit qu’aucune vie n’est en danger.

Au cours d’une intervention inhabituelle, Tony Blair, le représentant du Quartette pour le Moyen-Orient, a pressé Israël à « prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter une issue tragique qui pourrait avoir des implications sérieuses sur les conditions de stabilité et de sécurité sur le terrain ». Il s’est dit « de plus en plus péoccupé par la détérioration des conditions de santé » des grévistes de la faim.

Auparavant le président palestinien Mahmoud Abbas avait qualifié la situation de « très dangereuse ». Il déclarait à l’agence Reuters : « Si quelqu’un meurt, ... ce sera un désastre et personne ne pourra contrôler la situation ». Abbas a appelé à Hillary Clinton, la Secrétaire d’Etat américaine, à intervenir.

Jamal Zahalka, membre du Parlement israélien, a déclaré à un rassemblement de solidarité à Jaffa : « Si l’un des prisonniers grévistes vient à mourir, une troisième intifada éclatera ».

Selon l’organisation "Médecins pour les Droits Humains", il n’y a aucun cas de personne survivant sans aucun aliment ni supplément plus de 75 jours. Le gréviste de la faim Bobby Sands est décédé en 1981 après 66 jours.

Les forces de sécurité israéliennes ont riposté aux protestations et aux marches dans les villes et villages de Cisjordanie avec le gaz lacrymogène, les balles caoutchoutées et les canons à eau. A Gaza ont eu lieu des manifestations et des rassemblements, et la grève de la faim a été évoquée dans les prêches de vendredi, jour de la prière. Une cinquantaine de personnes, notamment d’anciens prisonniers et des militants, ont entamé une grève de la faim par sympathie.

« Les protestations prennent chaque jour de l’ampleur » dit Hurriya Ziadi de Ramallah, dont le frère est en grève de la faim après 10 années passées en prison. « Les prisonniers palestiniens sont ulcérés parce que ce sont nos frères et nos s ?urs qui exigent leurs droits humains élémentaires. Cela touche chaque Palestinien ».

La protestation des prisonniers « nourrit tout un éventail de protestations non violentes partout en Cisjordanie » déclare l’ancien candidat à la présidence Moustafa Barghouti.
La grève de la faim est l’une des formes les plus efficaces de résistance non violente. Mais s’il y a un mort, cela déclenchera énormément de colère ».

Des négociateurs égyptiens tentent de désamorcer ce scénario en négociant un accord pour mettre un terme au mouvement. Certains progrès ont été accomplis, disent les autorités palestiniennes. Les Egyptiens avaient négocié un accord à l’automne dernier pour la libération du soldat israélien Gilad Shalit, en échange de plus de 1.000 prisonniers palestiniens.

Les exigences-clés des détenus sont l’abolition des emprisonnements sans procès ni inculpations, intitulés « détention administrative », et la fin des incarcérations à l’isolement ; l’autorisation aux familles de Gaza de visiter les prisonniers dans les prisons israéliennes ; l’accès à du matériel éducatif ; et la cessation des fouilles au corps et des rafles pendant la nuit dans les cellules.

4.635 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes, dont 308 en détention administrative, sept femmes et 218 enfants

La question des droits des prisonniers rencontre un puissant écho au sein des familles palestiniennes, puisqu’un grand nombre d’entre elles ont des parents en prison. Selon l’organisation de prisonniers Addameer, au 1er mai il y avait 4.635 prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes, dont 308 en détention administrative, sept femmes et 218 enfants.

Les groupes de défense des droits de l’homme palestiniens disent qu’environ 2.500 prisonniers se sont joints à la grève de la faim depuis que le mouvement de masse a été lancé, le 17 avril dernier.

L’IPS (l’administration pénitentiaire israélienne) dit que 1.500 prisonniers mènent une grève de la faim sous supervision médicale. Quatre prisonniers ont été transférés à l’hôpital la semaine dernière. Deux prisonniers ont été exemptés de l’isolement, selon une porte-parole de l’IPS, notamment Mahmoud Issa qui se trouvait placé à l’isolement depuis plus de 10 années.

Dans une lettre adressée à « Ma bien-aimée Lamar », Tha’er Halahleh, qui refuse toute nourriture depuis 77 jours, demandait pardon à sa fille née deux semaines après son incarcération, il y a 23 mois, et qu’il n’a jamais pu voir.

« En grandissant, tu comprendras comment l’injustice a frappé ton père et des milliers de Palestiniens jetés en prison et en cellule par l’occupation, brisant leur vie et leur avenir sans autre raison que leur poursuite de la liberté, de la dignité et de l’indépendance », dit-il dans sa lettre.

« Tu sauras que ton père ne supportait pas l’injustice et la soumission et qu’il n’acceptait pas les insultes et les compromis, et qu’il s’est engagé dans une grève de la faim pour protester contre l’Etat juif qui veut faire de nous des esclaves humiliés sans aucun droit ni dignité nationale ».

Bilal Diab, détenu administrativement depuis le mois d’août dernier, a envoyé ses dernières volontés à sa famille il y a deux jours, demandant notamment que des confiseries commémoratives soient distribuées à ses funérailles ;
« Nous aurons la victoire, mais uniquement à travers le martyre ou la libération immédiate - pas de solution partielle » écrit-il. « En ce 75ème jour de ma grève de la faim, je suis toujours déterminé, patient et concentré ».

Selon Israël les deux hommes sont membres du Jihad islamique et leur détention est nécessitée par des motifs sécuritaires.

13 mai 2012 - The Guardian - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.guardian.co.uk/world/201...
Traduction : Info-Palestine.net - Marie Meert