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Une Intifada pour les prisonniers ?
mardi 15 mai 2012 - Khalid Amayreh
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La mère du prisonnier palestinien Bilal Diab tient une affiche avec un portrait de son fils, qui est sur ​​une grève de la faim depuis plus de 70 jours. Environ 2000 prisonniers palestiniens détenus par Israël sont en grève de la faim, exigeant la fin de l’emprisonnement sans procès ainsi que de meilleures conditions de détention - Photo : AP

Une grève de la faim ouverte et massive observée par des milliers de prisonniers palestiniens qui croupissent dans les prisons israéliennes, entre dans une « phase cruciale », puisque certains détenus seraient maintenant nourris de force. Les dirigeants palestiniens militants ont averti que la mort d’un seul prisonnier à la suite de l’intransigeance israélienne face à la grève, pourrait déclencher une Intifada - ou soulèvement - tous azimuts dans les territoires occupés.

L’avertissement est venu de dirigeants et militants affiliés à des groupes islamistes, disant que le peuple palestinien ne permettrait pas à Israël de briser la volonté des prisonniers qui ne font qu’exiger la plus élémentaire décence humaine et un semblant de traitement acceptable.

Le Fatah, le parti au pouvoir à Ramallah, a déclaré qu’il ne doutait pas qu’un refus israélien de répondre aux justes revendications des prisonniers « provoquerait un bouleversement » dans toute la région, en particulier en Cisjordanie. « Israël en supportera toutes les conséquences, à cause de son arrogance et de son intransigeance, et nous ne pouvons pas garantir qu’il n’y aurait pas de violence », a déclaré Eissa Karaki, le ministre de l’Autorité de Ramallah en charge du dossier des prisonniers.

« La situation est vraiment grave et la rue palestinienne est à 100% derrière les prisonniers, » a ajouté Karaki.

Les demandes des prisonniers incluent un terme à la détention administrative selon laquelle un détenu donné ne sait pas pourquoi il en prison ou quand il en sortira. D’autres demandes comprennent un terme à la pratique de l’isolement, d’autoriser les visites familiales - en particulier depuis la bande de Gaza - et l’arrêt des agressions la nuit dans les cellules et autres pratiques humiliantes.

La menace de déclencher un nouveau soulèvement ne doit pas être prise à la légère, étant donné le soutien populaire écrasant à la grève de la faim.

« C’est probablement la seule question qui bénéficie d’un consensus total parmi tous les Palestiniens, indépendamment des divisions politiques », a déclaré Ghassan Khatib, responsable du bureau de presse de l’Autorité palestinienne à Ramallah. « Tous les Palestiniens sont derrière les prisonniers, et tout accident ou décès va provoquer des réactions sévères, je n’ai aucun doute à ce sujet, » a-t-il ajouté.

Les fermes avertissements du camp palestinien ont été faits à la suite de la décision par la Cour suprême israélienne, le lundi 7 mai, de rejeter un appel de Bilal Diab et Thaer Halahleh. Ces deux prisonniers sont en grève de la faim depuis plus de deux mois. Leur avocat, Jawad Boullus, a accusé le tribunal israélien de « mauvaise volonté et d’intention malveillante ».

"Le tribunal a tout simplement dire à mes clients qu’ils devaient choisir entre l’incarcération à durée indéterminée dans des conditions humiliantes, ou la mort », a déclaré Boullus. Il a souligné que les deux captifs se trouvaient dans un « état de santé très, très mauvais », ajoutant que le refus du tribunal israélien de répondre à leurs demandes revenait à décider d’une condamnation à mort. Plus tôt dans la semaine, Boullus a visité Halahleh à l’hôpital de la prison de Ramleh. Il a dit qu’il avait des saignements dans l’estomac, qu’il avait perdu beaucoup de poids et souffrait de sévères maux de tête.

Ce samedi, on disait que l’un des deux avait succombé à sa grève de la faim prolongée. Mais la nouvelle a été démentie par des officiels palestiniens. Entre temps, les autorités israéliennes d’occupation auraient offert de libérer et d’expulser les deux captifs à Gaza.

Le frère de Bilal Diab, Azzam Diab, a déclaré qu’il avait été surpris de la présence de plusieurs gardiens de prison dans sa cellule. Ils lui ont demandé de les accompagner à l’hôpital de la prison de Ramleh afin de convaincre son frère de mettre fin à sa grève de la faim en échange de sa déportation vers la bande de Gaza. Il a refusé, disant qu’il ne serait pas utilisé pour faire pression sur son frère.

Les dirigeants palestiniens à Gaza et en Cisjordanie ont uni leurs efforts pour exhorter les gouvernements internationaux à faire pression sur Israël à mettre fin à ses traitements cruels envers les prisonniers palestiniens. L’ex-président de l’AP, Mahmoud Abbas, a déclaré qu’il faisait tout son possible afin que les gouvernements à l’étranger fassent pression sur le gouvernement israélien pour qu’il réponde aux justes revendications des prisonniers.

S’exprimant à Ramallah au cours d’une cérémonie de réception en l’honneur de Wu Sike, l’envoyé chinois au Moyen-Orient, ce lundi, Abbas a exhorté la Chine et d’autres « pays amis » à aider à sauver la vie des prisonniers. Il a ajouté qu’Israël devrait au moins libérer les prisonniers emprisonnés depuis avant la conclusion des Accords d’Oslo en 1994, ainsi que les femmes et les enfants.

Abbas a également réitéré la position de l’AP en ce qui concerne les négociations de paix avec Israël, en disant que la la reprise des négociations de paix n’était possible qu’avec le gel de l’expansion des colonies juives en Cisjordanie.

La direction palestinienne a également demandé à la Ligue arabe de soulever la question des prisonniers devant l’Organisation des Nations Unies. Mais aucun résultat spectaculaire n’est attendu du telle initiative, en raison de la faiblesse générale et des préoccupations de nombreux Etats arabes dans le sillage du printemps arabe.

En dépit de sa solidarité avec les prisonniers, l’Autorité palestinienne a été critiqué, quoique indirectement, par l’opposition pour ne pas « utiliser toutes ses cartes au profit des prisonniers. » L’Autorité Palestinienne et Israël sont des partenaires dans un accord de collaboration crucial appelé « coordination de la sécurité ». Israël verrait la remise en cause de cet arrangement comme suffisamment grave pour probablement se laisser fléchir en ce qui concerne les prisonniers palestiniens.

Toutefois, la décision par l’Autorité de Ramallah de réduire de manière significative ou de résilier la coordination répressive avec Israël pourrait également provoquer une réaction sévère de la part Israël qui pourrait compromettre la survie même de l’Autorité palestinienne. Mais une simple menace de rompre la coordination répressive tirerait la sonnette d’alarme à Washington et déclencherait une crise aiguë qui pourrait permettre à l’Autorité palestinienne d’exiger un règlement satisfaisant pour le problème des prisonniers.

D’autre part, comme Israël se prépare pour un été électoral, il serait politiquement inopportun pour le Premier ministre Binyamin Netanyahou d’apparaître comme cédant aux demandes palestiniennes. D’autres soutiennent que Netanyahou est trop fort et trop populaire pour que la décision de satisfaire au moins certaines des revendications des prisonniers palestiniens n’affectent ses chances de réélection de manière significative.

Personne ne sait comment la crise actuelle prendra fin. Mais ce qui est certain, c’est que la prolongation de la crise augmenterait de manière significative les tensions dans la région, en particulier si certains prisonniers succombent à la grève de la faim.

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10 mai 2012 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2012/109...
Traduction : Info-Palestine.net