Cronin avait déjà une longue et belle carrière de journaliste à son actif, notamment au Guardian et au Wall Street Journal Europe, lorsqu’il se rendit compte qu’il était incapable de continuer à travailler comme journaliste « objectif ». Il se qualifie à présent de « journaliste en campagne » et considère que sa tâche est de dénoncer les abus de pouvoir.
Cronin travaille pour The Electronic Intifada, un site web qui informe sur Israël et sur les Territoire palestiniens occupés. Il est l’auteur du livre « Europe’s Alliance with Israel - Aiding the Occupation » où il montre comment l’Union Européenne est complice du maintien de la politique d’occupation israélienne.
Complicités d’Etat
Dans sa présentation du film il évoqua notamment la société OIP dont le siège est à Audenarde [en Flandre orientale]. Depuis 2003 c’est une filiale de ELBIT, société israélienne, pour qui elle fabrique des systèmes de visée, des optiques nocturnes et des visières, qui sont ensuite installés sur du matériel militaire.
Au cours de l’agression israélienne « Opération Plomb Durci » contre Gaza en 2008-2009, certains des drones utilisés étaient fabriqués à Audenarde. Divers éléments de l’équipement sécuritaire dans le mur de l’apartheid à travers la Cisjordanie occupée ont également été fabriqués par OIP.
D’autres exemples donnés par Cronin sur la complicité belge dans l’occupation de la Palestine concernent l’entreprise Barco de Courtrai qui produit des écrans pour les avions de chasse israéliens et le secteur diamantaire qui importe du diamant israélien.
Selon l’économiste Shir Hever, un milliard de dollars des bénéfices du commerce du diamant israélien est destiné à l’industrie de l’occupation. David Cronin termine son exposé par une note positive - tout comme le film. Il croit fermement au pouvoir du peuple et demande à chacun de bien s’informer afin de pouvoir inciter à dénoncer l’injustice.
Le film
Cette idée s’exprime aussi fortement dans le film. Chacun est concerné et l’injustice concerne tout le monde. Les deux réalisateurs, Ana Nogueira et Eron Davidson, en tant que Sud-Africaine blanche et juif israélien sont très concernés par la problématique qu’ils illustrent dans leur documentaire « Feuille de route pour l’apartheid ».
Nogueira a travaillé pendant des années comme productrice et présentatrice de l’émission « Democracy Now ! » et a été correspondante pour la Deuxième Intifada. Davidson était un activiste des médias, auteur de films pour des projets communautaires. Quand leurs chemins se croisèrent, ils se sentirent obligés de produire quelque chose sur l’inégalité dans leurs pays de naissance, et ils réalisèrent donc leur premier film.
’Roadmap to Apartheid’ (2012) est rythmé par des citations d’anciens décideurs sud-africains et israéliens, des témoignages de citoyens victimes, des images historiques et des interviews de personnalités intéressantes comme le journaliste palestino-étatsunien Ali Abuminah, le poète-résistant Dennis Brutus, Sarit Michaeli de l’organisation israélienne pour les droits humains B’tselem et Eddie Makue du Conseil des Eglises sud-africain.
La première partie est centrée sur Gaza et la Cisjordanie. Le système d’occupation est analysé et comparé à la gestion de l’Afrique du sud à l’époque de l’apartheid. Un Palestinien explique les difficultés de sa famille parce qu’Israël vole leur eau, d’où une affection rénale chez sa fille. Au même moment, les enfants de la colonie juive illégale Ariel, quelques kilomètres plus loin, jouissent d’une eau surabondante dans leur piscine couverte.
Le film illustre la situation d’apartheid criante dans la ville palestinienne de Hébron. 160.000 Palestiniens sont terrorisés par quelques centaines de colons juifs illégaux et par une troupe de plus de 1.500 soldats israéliens chargés de protéger ces derniers. Des centaines de magasins palestiniens ont été fermés. La rue principale de Hébron n’est plus accessible aux habitants palestiniens de la ville et leurs maisons sont réquisitionnées par les colons. Un scénario similaire se déroule à Jérusalem-Est occupé et dans la zone qui se trouve hors de la Ligne Verte (la ligne de démarcation de 1949) : c’est ce dont parle la seconde partie du film. Les Palestiniens sont systématiquement mis hors de leurs maisons, lesquelles sont ensuite soit occupées par des Israéliens juifs soit détruites.
Presque toutes ces situations ont leurs images-miroirs en Afrique du Sud. Les Sud-Africains qui ont été interviewés confirment la justesse de la comparaison avec l’apartheid qu’ils ont connue. Rien ne peut plus nous retenir de nommer « apartheid » la gouvernance israélienne à l’égard des Palestiniens. Les exemples les plus clairs sont le Mur israélien qui sépare des Palestiniens d’autres Palestiniens et l’agression « Plomb durci » sur Gaza.
Les mouvements BDS
Mais cette dure conclusion du film s’accompagne d’un message d’espoir : des citoyens comme vous et moi pouvons mettre fin à l’apartheid. Si les populations concernées résistent massivement à la puissance répressive et si la société civile internationale les soutient en boycottant le régime, la seule issue possible sera la fin de l’apartheid.
Actuellement les mouvements BDS sont en train de se développer partout dans le monde. La paranoïa face à ce mouvement montre clairement que les décideurs israéliens d’aujourd’hui sont perturbés par ces actions globales non violentes.
Les « Boycott Divestment Sanctions » sont la bonne façon de mettre la pression sur nos propres gouvernements et sur Israël. Le film s’achève sur les paroles du poète activiste sud-africain Don Mattera quand il parle de paix entre les Israéliens juifs et les Palestiniens : “It is possible ..., it is possible ...”
Site du film : http://roadmaptoapartheid.org/about...
Interview de David Cronin : http://vrede.be/nieuws/50-israel-pa...
27 avril 2012 - Vrede - Vous pouvez consulter cet article à
http://www.dewereldmorgen.be/artike...
Traduction : Info-Palestine.net - Marie Meert