Thiab n’avait que 18 ans et était encore au lycée quand il a été arrêté une première fois par l’armée d’occupation israélienne en octobre 2003 dans son village de Kufr Rai. Il a été condamné à sept ans et demi de prison pour ce qu’Israël appelle son « activisme politique dans le groupe du Djihad islamique. »
Quand il a été arrêté, il a refusé d’obéir aux ordres des soldats israéliens qui lui disaient de regarder vers le sol au lieu de les regarder de face, et quand il a refusé, ils ont menacé de lui tirer dessus. Thiab est resté inébranlable, et il répondit vertement que de toute façon, la mort était inévitable. Ses répliques rendaient malade de peur sa mère qui écoutait les échanges depuis une autre pièce où elle avait été enfermée par les soldats.
Après sa libération, en février 2010, la vie n’a jamais été la même pour Thiab. Il a été arrêté pour de courtes périodes de temps et a été convoqué plusieurs fois par les services israéliens du renseignement pour des interrogatoires, qui duraient généralement plusieurs jours. Un interrogatoire en mai de la même année a duré sept jours. Thiab a également été arrêté par l’Autorité palestinienne pendant 28 jours, un sujet que sa mère, Umm Hisham, qui est âgée de 65 ans, ne tient pas à discuter.
« Il est inutile de parler à ce sujet maintenant, » murmure-t-elle, en se détournant avec une main sur son visage. « Nous avons besoin de tout le soutien que nous pouvons obtenir, du président Mahmoud Abbas et de Salam Fayyad [Premier ministre]. » Elle leva les yeux avec un sourire fatigué. « Il s’est mis en grève de la grève de la faim pendant 14 jours après que l’AP l’ait arrêté. »
S’adapter à la « liberté » après la prison était une épreuve en elle-même, surtout depuis que Thiab se trouvait constamment convoqué pour des interrogatoires par Israël et par intermittence, par l’AP.
« Il voulait vivre sa vie comme il l’imaginait, mais il ne le pouvait pas parce que l’occupation a retiré tout sens à sa vie, » dit Umm Hishâm. « Il a une force de caractère tellement respectable, mais il lui a été refusé de pouvoir mener la vie qui devrait être celle d’un jeune homme de son âge, comme fonder une famille, aller à des fêtes de mariage en dehors du village et visiter d’autres villes. »
Les restrictions à la liberté de mouvement de Thiab ont été illustrées avec force en janvier 2011, lorsqu’il a voulu aller à Jénine pour rendre visite à sa belle-s ?ur, après qu’elle eut donné naissance à des jumeaux. Un check point volant l’attendait juste à l’extérieur Kufr Rai et il a alors subi une fouille à nu et est resté détenu pendant plusieurs heures avant d’être renvoyer à la maison. « Il est sorti de prison pour se retrouver dans une plus grande prison », souligne Umm Hishâm.
Après un apprentissage du métier de coiffeur, Thiab a ouvert un salon de coiffure dans son village. A peine 12 jours plus tard, il était à nouveau emmené par les forces israéliennes pour un interrogatoire au cours duquel ils l’ont provoqué et se sont moqués de sa profession. Quand il est rentré chez lui, il ne retourna plus jamais à son salon de coiffure.
Le 17 août 2011, Thiab était en compagnie de quatre de ses voisins sur le toit de la maison de son frère. C’était au milieu du mois de Ramadan, et les villageois ont l’habitude de rester éveillés tard pendant le mois sacré. À 1 heure du matin, des bombes assourdissantes ont explosé brusquement autour de la maison et la cour a été rapidement envahie par une unité spéciale de soldats israéliens, tous habillés en civil. Un autre groupe de soldats, cette fois facile à distinguer avec leurs uniformes, a fait irruption sur le toit et ils se sont saisi de tous les cinq jeunes hommes. Les soldats ont ensuite rassemblé toutes les femmes et tous les enfants dans une pièce. Isam, l’un des frères Thiab, a été menotté dans une pièce à part et les soldats n’arrêtaient pas de le piétiner. Les soldats ont relâché les quatre hommes qui étaient avec Thiab, mais quant à lui, ils l’ont menotté et lui ont bandé les yeux, puis ils lui ont imposé de se traîner sur les genoux jusqu’à l’endroit où la jeep de l’armée était garée, à environ 200 mètres.
Thiab a ensuite fait 14 jours de grève de la faim en solidarité avec Khader Adnan, et plus tard à nouveau 12 jours en solidarité avec Hana Shalabi. Lorsque le Service pénitentiaire israélien (IPS) a renouvelé sa détention de six mois à la fin février de cette année, Thiab a immédiatement commencé sa grève de la faim avec son ami et codétenu Thaer Halahleh. Ils ont alors été séparés et placés dans des cellules différentes et quand il est devenu évident qu’ils n’allaient pas mettre fin à leur grève de la faim, les IPS les ont placés tous les deux en cellule d’isolement. Le 28 mars, Thiab et Halahleh ont été hospitalisés et ils sont actuellement à l’hôpital pénitentiaire de Ramle.
Jamil Khatib, l’avocat de Thiab et d’Halahleh et d’autres grévistes de la faim qui ont également été hospitalisée, leur a rendu visite pour la dernière fois le mercredi 25 avril.
« À son 59e jour de sa grève de la faim, la santé de Bilal est à un niveau très critique », a souligné Khatib. « Il a perdu 25 kilos et il a des difficultés à parler, un faible taux de sucre dans le sang et une douleur constante à l’estomac. Ses cheveux tombent et il souffre de vertiges fréquents, en plus de tomber inconscient à certains moments. Il est très faible et ne peut pas se déplacer sans être assisté. »
Lundi 23 avril, le tribunal militaire israélien a rejeté les appels déposés par Khatib demandant la libération de Thiab et d’Halahleh. Le lendemain, Khatib a interjeté l’appel devant la Haute Cour israélienne à Jérusalem en demandant deux choses : que l’appel soit traité dès que possible et que Thiab et Halahleh soient transférés au tribunal dans des ambulances, et non dans des jeeps militaires.
Khatib dit qu’une proposition d’exil des deux prisonniers en échange d’une fin de leur grève de la faim ne lui a pas été officiellement présentée par les autorités d’occupation, car il leur a clairement fait savoir qu’il ne négocierait pas à cette condition. En outre, Thiab et Halahleh ont fait savoir tout aussi clairement qu’ils refusaient d’être exilés où que ce soit en dehors de leurs propres villages.
« Je m’attends à ce qu’ils continuent leur grève de la faim, sur le même chemin qu’a suivi Khader Adnan, » dit Khatib. « Ils sont déterminés à poursuivre leur grève de la faim jusqu’à la liberté ou le martyre. Il s’agit du plus récent message qu’ils nous ont adressé. Ils ont également demandé une solidarité renforcée et une stratégie claire des moyens d’information et des organisations qui suivent leur cas. »
Azzam, un des frères de Thiab, est à son 30e jour de grève de la faim en solidarité avec son frère, indépendamment du fait qu’il purge une peine de prison à perpétuité depuis 2001 dans les prisons de l’occupation.
« Bilal est le plus jeune de mes 13 enfants, » dit Umm Hishâm. « Son père est mort quand il était âgé de 8 mois, donc il a toujours été gâté par ses frères et s ?urs. Je demande à tout le monde, à toute personne pour qui les droits de l’homme signifient quelque chose, de nous aider, de faire que Bilal soit libre. »
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27 avril 2012 - Al-Akhbar - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduction : Info-Palestine.net - Claude Zurbach