16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Le bras de fer se poursuit entre WikiLeaks et les Etats-Unis

lundi 25 octobre 2010 - 06h:50

Le Monde.fr

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


En publiant, comme il l’avait annoncé, plus de 400 000 rapports de l’armée américaine en Irak, le site WikiLeaks, spécialisé dans la publication de documents confidentiels, a une nouvelle fois provoqué la colère du Pentagone et du gouvernement américain.

Fin juillet, le site avait déjà publié plus de 90 000 rapports des troupes américaines en Afghanistan, jetant un nouvel éclairage sur la conduite de la guerre et montrant que pour les officiers sur le terrain, l’implication des services de renseignement pakistanais dans le soutien aux Talibans était une évidence.

Le Pentagone avait alors répliqué en lançant une vaste chasse à l’homme pour tenter d’identifier la "taupe" au sein de ses services. Pour l’armée américaine, le suspect numéro un est Bradley Manning, un analyste militaire de 23 ans, déjà inculpé pour la fuite de la vidéo d’une bavure de l’armée américaine en Irak, publiée par WikiLeaks sous le titre “meurtre collatéral”. Le jeune homme a été placé aux arrêts et risque 52 ans de prison.

MISE EN DANGER DES INFORMATEURS

En parallèle, le Pentagone accusait pêle-mêle WikiLeaks de mettre en danger la sécurité nationale, en publiant des informations utiles aux ennemis des Etats-Unis, et la vie des collaborateurs de l’armée sur le terrain. Les "journaux de guerre afghans" contenaient en effet les noms de plusieurs dizaines d’Afghans qui travaillent, le plus souvent secrètement, comme informateurs pour les troupes américaines.

Après avoir dans un premier temps nié la la présence d’informations permettant d’identifier des collaborateurs de l’armée dans les journaux afghans, WikiLeaks a ensuite affirmé qu’il supprimerait de ses futures publications les données nominatives sur les informateurs. La version non-éditée des journaux irakiens publiée par le site vendredi 22 octobre, que Le Monde a pu consulter, contient elle aussi plusieurs dizaines de noms de collaborateurs secrets des forces de la coalition.

Mi-octobre, le Pentagone a toutefois dû reconnaître que les journaux afghans ne contenaient pas d’informations sensibles. WikiLeaks affirme avoir conservé 15 000 autres rapports afghans, contenant eux des informations sensibles, et étudier la meilleure manière de les rendre inoffensive avant de les publier.

L’ARMÉE AMÉRICAINE TENTE DE PRENDRE LES DEVANTS

Entre la publication des "journaux de guerre" afghans et celle des "journaux de guerre irakiens", l’armée américaine a fait évoluer sa stratégie. Prise de court par le premier volet de rapports, elle a cette fois-ci pris les devants, alors que des rumeurs faisaient état depuis une quinzaine de jours de la publication prochaine des rapports irakiens. En fin de semaine dernière, le Pentagone a publié pour la première fois une estimation du nombre de victimes civiles de la guerre en Irak, sur une période qui n’est pas tout à fait celle couverte par les documents de WikiLeaks : plus de 63 000 morts civils entre janvier 2004 et août 2008, soit la période la plus meurtrière de l’occupation de l’Irak. Un chiffre que l’état-major s’était jusqu’ici toujours refusé à communiquer, expliquant qu’il ne tenait pas de comptabilité des morts civils.

Lundi 18 octobre, le Pentagone a publié un simple sommaire de ses rapports irakiens, ne retenant que le titre, la date et la localisation des incidents. Il a par ailleurs annoncé avoir entamé une étude des informations contenues dans les rapports irakiens, afin d’évaluer l’impact de leur publication, la semaine dernière.

TÉLÉGRAMMES DIPLOMATIQUES

Si la publication en série de documents confidentiels met le Pentagone dans une situation difficile, WikiLeaks et son médiatique porte-parole et fondateur, Julian Assange, connaissent également plusieurs difficultés. M. Assange, journaliste australien qui vivait aux Etats-Unis, s’est vu refuser cette semaine un permis de séjour en Suède, où il souhaitait s’installer pour bénéficier de la très protectrice législation suédoise sur la confidentialité des sources des journalistes. M. Assange est toujours sous le coup d’une enquête pour viol dans le pays, où une jeune femme l’accuse de l’avoir contrainte à avoir une relation sexuelle sans préservatif, ce que le porte-parole de WikiLeaks dément.

Au sein même de WikiLeaks, Julian Assange fait aussi l’objet de contestations. Fin septembre, le porte-parole du site pour l’Allemagne, Daniel Schmitt, a annoncé qu’il quittait l’organisation, dénonçant une "dérive autocratique" du co-fondateur du site. Wikileaks affirme de son côté que M. Schmitt avait été suspendu pour un mois de l’organisation, après une dispute avec M. Assange sur la stratégie du site, parce qu’il est soupçonné d’avoir communiqué à la presse des informations sur le fonctionnement de WikiLeaks et les dissensions internes.

Dans le bras de fer qui se joue entre WikiLeaks et le Pentagone, la publication des rapports irakiens n’est cependant qu’une étape. Le site pourrait détenir un autre trésor de guerre : 260 000 télégrammes diplomatiques échangés par les ambassades américaines au Moyen-Orient, que Bradley Manning s’était vanté d’avoir dérobés avant son arrestation. WikiLeaks n’a pas confirmé détenir ces documents.

Le site a lui aussi tenté de prendre les devants contre toute action de la part des Etats-Unis contre ses membres ou son infrastructure informatique. Le 30 juillet, il a discrètement mis en ligne un fichier de 1,4 giga-octet, baptisé "assurance.zip", et protégé par un système de chiffrement extrêmement puissant. Interrogé sur son contenu, Julian Assange s’est contenté de réponde qu’il "valait mieux qu’[il] ne fasse pas de commentaires sur ce fichier. On pourrait facilement imaginer une situation comme la nôtre, où il vaudrait mieux s’assurer que des documents historiques importants ne disparaissent pas."

23.10.10

Source : http://www.lemonde.fr/proche-orient...


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.