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Victoire juridique pour les militants du BDS

lundi 23 août 2010 - 06h:13

Dr. Hanan Chehata

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L’inculpation de quatre militants du BDS (Boycott, Désinvestissement et Sanctions) a été annulée à Londres à cause des activités de toute évidence illégales d’une firme israélienne de produits cosmétiques contre laquelle les quatre militants avaient manifesté. L’affaire a suscité quelques arguments juridiques inhabituels et probablement révolutionnaires.

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Bus londonien transformé...

Selon le droit international, les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée sont illégales. L’Union européenne, les Nations unies et la Cour internationale de justice ont toutes confirmé le caractère illégal des colonies, position reconnue par la majorité des nations dans le monde. Étant donné que la situation est bien avérée, il s’ensuit que les sociétés qui utilisent des terres illégalement occupées pour fabriquer et vendre leurs produits quels qu’ils soient, produisent et vendent des produits illégaux. Il s’ensuit aussi que quiconque achète de telles marchandises aide à financer l’ actuelle occupation illégale des terres palestiniennes. C’est ce message que les militants du BDS ont essayé de diffuser auprès du public.

Un week-end sur deux, il y a une petite manifestation devant Ahava, magasin israélien de produits cosmétiques et de beauté situé dans le quartier à la mode de Covent Garden à Londres. Il s’agit de protester contre la vente de produits de beauté fabriqués dans la colonie israélienne illégale de Mitzpe Shalem en Cisjordanie occupée avec de la boue prise dans la mer Morte près de Kaliya. L’enlèvement de cette boue se fait sans que les Palestiniens auxquels la terre appartient l’aient autorisé ou aient reçu un dédommagement.

En septembre et en décembre 2009, quatre militants sont entrés dans le magasin Ahava, se sont attachés à des barils remplis de béton et ont refusé de sortir. Les deux fois, le magasin a dû fermer pendant plusieurs heures. Les « Quatre de Ahava » ont par la suite été accusés de deux infractions pour intrusion en vertu de la section 68 et de la section 69 du code de justice criminelle et d’ordre public de 1994.

Lorsque l’affaire a été portée devant le tribunal, au premier jour de l’audience le ministère public a laissé tomber la section 68 se rapportant à une intrusion aggravée en vertu de laquelle l’infraction exige que l’accusé soit surpris en délit d’intrusion sur une terre et commettant un acte de nature à perturber ou à empêcher toute « activité légale » sur cette terre. Bien entendu, si Ahava vend des produits provenant d’une colonie illégale, le magasin ne mène alors pas une activité légale et par conséquent, l’action des militants ne perturbe pas une « activité légale ». Le ministère public se heurtait à un problème dès le début et le fait qu’il ait laissé tomber cette accusation parle de lui-même.

En outre, Ahava étiquette ses produits « fabriqué par Dead Sea Laboratories Limited, mer Morte, Israël », en infraction évidente de la loi britannique ; on considère que les entreprises commettent une infraction si leur étiquetage fournit au public une information erronée au sujet de l’origine de leurs produits (Consumer Protection from Unfair Trading Regulations 2008). En étiquetant Made in Israel des produits fabriqués dans une colonie illégale , la société enfreint les normes commerciales du Royaume-Uni. Selon les propres directives DEFRA du gouvernement britannique de 2009 « le gouvernement considère que les commerçants induiraient les consommateurs en erreur et commettraient ainsi presque certainement une infraction s’ils devaient déclarer leurs produits provenant de [territoires palestiniens occupés] (y compris ceux de la Cisjordanie) comme des « produits d’Israël... ». La raison en est que cette zone ne relève pas des frontières internationalement reconnues de l’État d’Israël ». À ce titre, si le ministère public avait décidé de poursuivre l’action contre les manifestants, il aurait abouti au règlement de ces questions juridiques également, ce que beaucoup de sociétés israéliennes ne voulaient pas risquer.

La deuxième série d’inculpations se rapportant à la section 69 ont également été abandonnées parce que la gérante de la filiale Ahava qui avait été convoquée en tant que principal témoin a refusé de se présenter au tribunal malgré l’assignation à comparaître et la menace d’une arrestation. La raison en est probablement que Ahava ne voulait pas que ses activités soient dévoilées au public si l’affaire était poursuivie.

En l’état actuel des choses, on peut compter cela comme une victoire juridique pour le mouvement BDS dans la mesure où des sociétés telles que Ahava savent que leurs activités sont indéfendables. Ce devrait être un avertissement pour ces sociétés et les autres engagées dans des activités illégales similaires qui enfreignent aussi bien le droit britannique intérieur que le droit international ; elles sont averties que si elles continuent à produire et à vendre les marchandises des colonies illégales, elles ne le feront pas sans opposition.

L’issue de cette affaire servira également à enhardir les militants protestant contre la société Ahava et d’autres comme elle. Les protestations contre Ahava ne se limitent pas aux magasins de Londres ; aux USA, CodePink (groupe US de femmes militant contre la guerre et pour la paix) a mené une campagne prometteuse contre la société. Ce groupe a fait campagne à New York, au Texas, à Washington et dans d’autres parties des USA en brandissant des bannières « Ahava est un business sale » et « Ahava cache ses crimes sous un joli visage ». Ailleurs, des groupes comme la Dutch Bathrobe Brigade (brigade néerlandaise des sorties de bain) a tenu de nombreuses protestations à Amsterdam, tandis que des militants français ont contesté juridiquement les sociétés telles que Sephora (chaîne française de produits cosmétiques) qui vendent des produits Ahava.

Chose surprenante, c’est à des individus et à des groupes BDS qu’il incombe de révéler ces faits. Quand il est tellement évident qu’il y a infraction aux lois, le gouvernement britannique et les autres ainsi que leurs agences devraient mettre leurs propres lois en application. Jusqu’à ce qu’ils le fassent, il y aura de plus en plus de personnes qui se joindront quotidiennement au mouvement BDS et chacune d’entre elles contribuera à mettre fin au commerce honteux des marchandises en provenance des colonies illégales.

18 août 2010 - Middle East Monitor - Cet article peut être consulté ici :
http://www.middleeastmonitor.org.uk...
Traduction : Anne-Marie Goossens


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