Un coup de dés désespéré...
mercredi 2 décembre 2009 - 06h:21
Ben White - The Electronic Intifada
L’unilatéralisme supposé des chefs de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, apparaît plus comme un coup de dés désespéré d’un régime en voie de disparition plutôt que la première étape d’une audacieuse nouvelle voie, écrit Ben White.
- Mahmoud Abbas [à g.] et Salam Fayyad jouant à la comédie du pouvoir ...
Il y a trente ans, le ministre Ariel Sharon déclarait aux membres de la Knesset que pendant qu’ils « criaient » au sujet des colonies, « nous posons un autre raccordement de réseau, un autre kilomètre de route et nous construisons une autre maison. » Les gouvernements israéliens successifs ont repris à leur compte le point de vue du premier ministre fondateur David Ben-Gourion selon quoi la condition sine qua non « pour discuter avec les Arabes » était « d’établir un important fait accompli juif dans ce pays. »
Et pourtant aujourd’hui on parle de « l’unilatéralisme » palestinien. Cecla a commencé avec l’annonce en août par le premier ministre [nommé] de l’Autorité palestinienne [AP], Salam Fayyad, d’un plan sur deux ans pour construire un État, mais avec un crescendo durant ces dernières semaines. Le plan de Fayyad est toujours sur la table, et bien qu’il ait souligné que l’accent est mis sur le renforcement institutionnel, certains articles ont établit un lien entre cette initiative et une déclaration unilatérale d’indépendance.
Fayyad lui-même à distancé son propre plan de la « menace » qui a principalement fait la une des journaux, à la suite de déclarations de hauts responsables de l’Organisation de Libération de la Palestine [OLP] et de l’Autorité palestinienne.
C’est cette proposition présumée de la direction palestinienne de déclarer un État en Cisjordanie et dans la bande de Gaza qui provoque des remous. Le négociateur palestinien Saeb Erekat a souligné que ce qui est mis en avant n’est pas une simple déclaration unilatérale pour un Etat, mais plutôt l’idée d’aller devant le Conseil de sécurité des Nations unies pour demander la reconnaissance d’un Etat [palestinien] dans les territoires occupés.
La suggestion d’une mesure unilatérale palestinienne a été accueillie avec du mépris et réactions de colère par des responsables israéliens. Le premier ministre Benjamin Netanyahu lui-même a lancé un avertissement, disant qu’il y aurait « des mesures unilatérales du côté d’Israël » [ce qui a bien sûr peu de sens, étant donné l’unilatéralisme quotidien de l’occupation israélienne, les démolitions de maison et l’expansion des colonies]. D’autres ministres ont parlé d’arrêter de retourner à l’Autorité palestinienne les recettes fiscales palestiniennes collectées via Israël, de mettre en place plus de checkpoints en Cisjordanie et en annexant des blocs de colonies.
Le plan a également été critiqué par le Hamas, les sénateurs des États-Unis et l’Union Européenne, avec cette dernière décrivant une telle démarche pour l’indépendance comme « prématurée ». Ces réactions négatives ne semblent pas avoir déconcerté l’ex-président Mahmoud Abbas et M. Erekat, même si, compte tenu de cette opposition, il est difficile de voir comment cela pourrait s’avérer plus efficace que la symbolique proclamation d’un Etat par l’OLP en 1988.
Pourtant déclarer un Etat est une démarche qui ne peut être que « unilatérale » a-t-il été dit. Une autre étape, liée à la précédente, étape a été discutée est de se débarrasser complètement de l’Autorité palestinienne. Cela a été suggéré par certains Palestiniens depuis un certain temps maintenant [avec plus ou moins de sincérité], confirmant cette appréciation par le politologue Nathan Brown selon laquelle l’Autorité palestinienne n’est « pas une autorité ni palestinienne, » mais plutôt « un protectorat parrainé et en partie financé au niveau international, administrant des villes et villages de Palestine ».
A présent, la perspective de l’effondrement de l’Autorité palestinienne a été envisagée parmi les dirigeants palestiniens à cause de la paralysie du processus de paix. Comme la déclaration unilatérale d’un Etat, cela a été considéré par beaucoup comme une tactique d’Abbas et de son clan visant à pousser l’administration américaine à exercer une pression sur Israël. Malgré les démentis par M. Erekat et ses colllègues disant que personne n’a vraiment appelé à dissoudre l’Autorité palestinienne, il y a eu suffisament pour que certains analystes comme Dror Bar- Yosef de l’Institut Adelson, pense à l’avenir et imagine les conséquences possibles, à savoir « une nouvelle intifada et l’appel à une solution à un Etat » [« Les bases d’une troisième intifada sont déjà posées, » - The Jerusalem Post, 15 Novembre 2009].
L’idée d’abandonner purement et simplement la solution à deux-États en faveur d’une formule d’un Etat binational a aussi gagné du terrain, un certain nombre de Palestiniens quelques « de l’intérieur » la faisant apparître comme une possibilité. Saeb Erekat, par exemple, a déclaré aux journalistes au début de Novembre que « d’autres options » dont une « solution à un seul Etat » devrait être envisagées, étant donné l’impossibilité de créer un Etat palestinien dans les territoires occupés [en 1967].
La discussion de la solution à un Etat fait maintenant partie du discours dominant des commentateurs et journalistes en partie en reflet de la façon dont elle est aujourd’hui invoquée par une variété d’officiels. Le ministre israélien de la défense Ehud Barak, par exemple, parlait de comment, sans un accord de paix, il y aura « une augmentation progressive de l’exigence d’un Etat bi-national », une « menace » qu’il estime ne pas devoir être sous-estimée [« Le Fatah considère la possibilité de revenir à la guerre populaire », Ynet, 7 Novembre 2009]. Mais les dirigeants actuels de l’OLP/AP, attachés à la solution à deux États et dont les postes sont largement dépendants du soutien des sponsors internationaux du processus de paix, sont peu susceptibles d’adopter un tel changement de cap car ils devraient alors retourner à la résistance.
Bien que l’accent soit mis sur les stratégies palestinienne concernant le processus de paix, d’autres importantes évolutions « unilatérales » sont en cours. Le Washington Post a rapporté le 21 Novembre que l’OLP cherche à maintenir Mahmoud Abbas au pouvoir avec la possibilité d’un transfert des pouvoirs du Conseil législatif palestinien au profit du propre Conseil Central de l’OLP. C’est le type actuel d’ « unilatéralisme » favorisé par trop de chefs palestiniens : un geste qui est tout à fait partisan, une tactiqque antidémocratique, résultant de la volonté de garder la même minorité au leviers de commande et de marginaliser le Hamas, sous le prétexte d’éviter une soi -disant « crise constitutionnelle ».
L’unilatéralisme israélien a toujours mis l’accent sur la création de « faits accomplis sur le terrain » : les colonies, l’expropriation des terres, le mur en Cisjordanie, la colonisation de Jérusalem-Est. Il existe de nombreuses stratégies unilatérales palestiniennes ayant comme mérite : une nouvelle réflexion sur la dynamique résistance/négociations, la mobilisation des énergies créatrices de la résistance populaire sur le terrain, suite à d’importantes victoires comme la Cour internationale de Justice et son avis consultatif demandant le démantèlement du mur, l’adoption et l’extension de la campagne internationale pour le Boycott, le Désinvestissement et les Sanctions [BDS], et la dissolution de l’Autorité palestinienne tout en menant une réforme radicale de l’OLP.
Mais « l’unilatéralisme » palestinien qui fait ces nouvelles récentes est plus qu’un jeu de politique politicienne - et un jeu dangereux. Abbas pourrait être désireux de pousser la proposition de création unilatérale d’un État avec la reconnaissance du Conseil de sécurité afin de saper le propre « Plan à deux Ans de Fayya », vu ses craintes que les États-Unis aient déjà désigné M. Abbas Fayyad pour le remplacer, comme Abbas lui-même avait été « habilité » par les États-Unis à mettre à l’écart le défunt dirigeant palestinien Yasser Arafat. Certes, Abbas craint plus de contrarier les Etats-Unis que son propre peuple. C’est en effet une période de transition, mais l’unilatéralisme supposé des chefs de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, apparaît plus comme un coup de dés désespéré d’un régime en voie de disparition plutôt que la première étape d’une audacieuse nouvelle voie.
Ben White est journaliste indépendant, spécialisé sur la Palestine/Israël.
Son site : http://www.benwhite.org.uk, et son adresse : ben@benwhite.org.uk
Du même auteur :
La réalité d’un seul Etat - 16 novembre 2007
Expropriations bureaucratiques - 7 septembre 2007
24 novembre 2009 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction : Nazem