GAZA VILLE - A moins que des mesures d’urgence ne soient prises, les réserves d’eau destinée à la consommation humaine dans la Bande de Gaza seront épuisées dans cinq à 10 ans, d’après la Société de gestion de l’approvisionnement en eau des municipalités côtières (CMWU) et les agences des Nations Unies travaillant sur place.
- Environ 10 000 habitants de Gaza n’ont pas de robinets, ni à l’intérieur ni à l’extérieur de leur maison, et 60 pour cent de la population - soit environ un million de personnes - n’ont pas d’accès continu à l’eau potable (photo d’archives)
Seulement cinq à 10 pour cent des eaux souterraines - la principale source d’eau destinée à l’usage humain (domestique, agricole et industriel) à Gaza - constituent des réserves d’eau potable, d’après la CMWU.
« D’ici 2014, le niveau de l’aquifère ne nous permettra plus de disposer d’eau adaptée à l’usage humain », a averti Majed Ghannam, ingénieur de la CMWU. « Tous les ans, dans l’aquifère, les volumes d’eau extraits sont supérieurs aux volumes injectés [via les précipitations et les écoulements souterrains latéraux/verticaux] »
La mauvaise qualité des eaux souterraines est due à une extraction excessive de l’eau présente dans l’aquifère, qui a conduit à l’intrusion d’eau de mer dans ce dernier, et donc à la salinisation des eaux souterraines de Gaza. Une grande partie de ces réserves sont impropres à l’usage humain. L’eau courante disponible à Gaza est connue pour être très salée et non potable.
D’après un rapport de la Banque Mondiale (en anglais) paru en avril dernier, on peut également attribuer la mauvaise qualité des eaux souterraines à la pollution liée à l’infiltration des eaux usées et des engrais agricoles.
Changement climatique, croissance démographique
Des relations entre le déclin des réserves d’eau destinée à l’usage humain et le changement climatique ont en outre été établies. La baisse des précipitations a en effet contribué à affecter le taux de recharge de l’aquifère.
D’autres facteurs ont été identifiés, tels que la forte croissance démographique et l’expansion urbaine de plus en plus importante, qui limitent l’espace disponible pour l’infiltration des eaux de pluies.
Gaza est l’une des régions les plus densément peuplées du monde : 1,6 million de Palestiniens y vivent, sur une surface de 365 kilomètres carrés. D’après les estimations de la CMWU, la population devrait augmenter de 85 pour cent pour atteindre près de trois millions d’habitants d’ici 2025.
A défaut de disposer de ressources en eau fiables, les habitants ont creusé des puits privés - dont un grand nombre sans licence -, qui ont contribué à la dégradation de l’aquifère, d’après la Banque mondiale.
L’autorité palestinienne de l’Eau (PWA), qui définit les politiques de l’eau dans les territoires occupés, a été suspendue à Gaza, car il s’agit d’une institution de l’Autorité palestinienne (AP) de Cisjordanie. Le gouvernement du Hamas à Gaza a très peu de contacts avec l’AP, et aucun contact avec les autorités israéliennes.
L’aquifère littoral de Gaza s’étend de Haïfa dans le nord au désert du Sinaï dans le sud, et du mont Hébron dans l’est à la Méditerranée à l’ouest (au niveau de la côte de Gaza).
Israël accusé d’intercepter l’eau
- Un étang de stabilisation à proximité d’une station de pompage à Beit Lahiyah, à Gaza
« Contrairement à la Cisjordanie, Gaza est ?en aval’ de la partie de l’aquifère située au-dessous d’Israël, ce qui implique que les écoulements souterrains latéraux partent d’Israël pour rejoindre l’aquifère de Gaza », a indiqué M. Ghannam.
« Les eaux souterraines présentes sous Gaza sont limitées par des puits d’interception [environ 27 puits] construits par Israël sur son territoire, le long de la frontière politique orientale de Gaza, siphonnant les réserves d’eau de l’aquifère avant qu’elles n’arrivent jusqu’à Gaza ».
D’après l’Autorité israélienne de l’Eau, l’aquifère d’Israël n’a aucun impact sur Gaza, et Israël n’empêche pas l’écoulement des eaux de surface ou des eaux souterraines vers l’aquifère de Gaza.
Blocus
D’après la Banque mondiale, depuis 2005, les réserves en eau de Gaza sont en outre affectées par les restrictions d’accès à l’électricité, aux carburants et aux pièces détachées.
L’équipement et les matériaux nécessaires à la construction, à la maintenance et à l’exploitation des installations d’assainissement et d’approvisionnement en eau sont interdits d’entrée sur le territoire en raison du blocus imposé par Israël depuis juin 2007, date à laquelle le Hamas a pris le pouvoir à Gaza.
Israël affirme que pour des raisons de sécurité, l’importation de certains matériaux ne peut pas être autorisée à Gaza.
Selon le rapport de la Banque mondiale, les installations de traitement des eaux usées, qui assurent des services partiels et irréguliers, nécessitent des réparations urgentes. La plus grande partie des eaux usées est déversée, sans avoir été traitée, dans les étangs de stabilisation ou dans la mer, ou s’infiltre dans le sol, jusqu’à atteindre l’aquifère.
Les foyers qui ne sont pas reliés aux réseaux de traitement des eaux usées ont recours à des fosses septiques qui ne sont pas vidangées correctement, en raison de la crise économique et du manque de matériaux.
« Cinquante pour cent des foyers de Gaza utilisent des fosses septiques pour leurs eaux usées », a indiqué M. Ghannam. « Les matériaux utilisés pour isoler les parois des fosses septiques ne sont pas disponibles en raison de la fermeture des frontières ».
Les conditions hydrauliques et sanitaires ont continué à se dégrader en raison des dégâts matériels importants provoqués par l’offensive d’Israël, qui s’est achevée le 18 janvier au bout de 23 jours d’affrontements.
Environ 10 000 habitants de Gaza n’ont pas de robinets, ni à l’intérieur ni à l’extérieur de leur maison, et 60 pour cent de la population - soit environ un million de personnes - n’ont pas d’accès continu à l’eau potable, d’après Maher Najjar, directeur adjoint de la CMWU.
Gaza dispose d’un plan-cadre pour l’eau et l’assainissement, mais, en raison du blocus israélien, moins de deux pour cent des mesures prévues ont été mises en place. Même des projets humanitaires de petite envergure ont dû être abandonnés par manque de matériaux, d’après le rapport de la Banque mondiale.
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15 septembre 2009 - IRIN
Photos : Iyad El Baba/UNICEF-oPt et Erica Silverman/IRIN
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