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Le « brillant » plan de paix de Netanyahou

vendredi 19 juin 2009 - 06h:23

Hasan Abu Nimah et Ali Abunimah - The Electronic Intifada

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Le Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahou a proposé un plan de paix si ingénieux qu’on se demande comment personne n’y avait pensé en 60 ans de carnage.

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La colonie juive de Har Homa... La paix, selon les sionistes, c’est une Palestine saturée de colonies juives et vidée de ses Palestiniens... Photo : ActiveStills

Certains n’ont peut être pas perçu le vrai génie de ses idées présentées dans un discours à l’université Bar-Ilan le 14 juin, aussi nous sommes heureux d’offrir cette analyse.

En premier lieu, Netanyahou veut que les Palestiniens deviennent des Sionistes engagés. Ils peuvent le prouver en déclarant « Nous reconnaissons le droit du peuple juif à un Etat pour eux sur cette terre ». Comme il l’a notifié, seule l’incapacité des Arabes en général et des Palestiniens en particulier à s’engager dans le rêve sioniste a causé le conflit, mais une fois « qu’ils disent ces mots à notre peuple et à leur peuple, une voie sera ouverte à la résolution de tous les problèmes entre nos peuples ». Il est bien sûr tout naturel que Netanyahou « aspire à un tel moment ».

Mais un simple engagement du c ?ur pour le sionisme ne suffira pas. Pour que la conversion des Palestiniens ait un « sens concret », Netanyahou explique que « il faut qu’il soit bien compris que le problème des réfugiés Palestiniens sera résolu hors des frontières d’Israël ». Dit autrement, les Palestiniens doivent accepter d’aider Israël à compléter le nettoyage ethnique commencé en 1947-48, en abandonnant le droit au retour. Ce qui est logique puisque, devenus Sionistes, les Palestiniens partageraient l’ambition sioniste de vider le plus possible la Palestine des Palestiniens.

Netanyahou est assez avisé pour reconnaître que même l’auto-nettoyage ethnique des réfugiés pourrait ne pas suffire pour assurer la « paix » : il restera des millions de Palestiniens vivant mal sur leur terre natale, ou au c ?ur de ce qui était, Netanyahou dixit, la « patrie historique » des Juifs.

Pour ces Palestiniens, le plan de paix incorpore ce que Netanyahou appelle « démilitarisation », mais qu’on doit traduire correctement par reddition inconditionnelle suivie d’un désarmement. Mais le désarmement, quoique nécessaire, ne peut pourtant pas être immédiat. Quelques Palestiniens récalcitrants peuvent ne pas vouloir devenir Sionistes. Par conséquent, les nouveaux Sionistes Palestiniens devraient engager une guerre civile pour abattre ceux qui insistent à résister follement au sionisme. Ou selon les termes de Netanyahou : « L’Autorité Palestinienne devra faire régner la loi à Gaza et défaire Hamas ». (En fait, cette guerre civile dure déjà depuis plusieurs années avec les « forces de sécurité » palestiniennes soutenues par les USA et Israël, dirigées par le Ltd Général US Keith Dayton, qui augmentent leur attaques contre Hamas).

Une fois les Palestiniens antisionistes écrasés, le reste des Palestiniens - qui sont en nombre égal à celui des Juifs dans la Palestine historique - pourront vivre en bon Sionistes comme l’envisage Netanyahou. Ils ne seront pas dérangés d’être concentrés dans des ghettos et enclaves de plus en plus petits pour accommoder l’expansion continue des colonies juives, dont les habitants sont décrits par Netanyahou comme « une partie intégrante de notre peuple, une population déterminée, pionnière et sioniste ». Et en accord avec leur sionisme sincère, les Palestiniens accepteront naturellement que « Jérusalem doit rester la capitale unie d’Israël ».

Ce ne sont que les aspects palestino-israéliens du plan Netanyahou. Les éléments régionaux incorporent un soutien arabe complet au sionisme palestinien et la normalisation des liens avec Israël, et même de l’argent arabe des pays du Golfe pour payer tout ça. Pourquoi pas ? Si tout le monde devient Sioniste, tout conflit disparaît.

On aimerait bien prendre le discours de Netanyahou pour une plaisanterie. Mais c’est un indicateur important d’une dure réalité. Contrairement à certains espoirs naïfs et optimistes, Netanyahou ne représente pas seulement une frange extrémiste en Israël. A présent, la population israélienne montre (avec un petit nombre d’exceptions) un front uni en faveur d’un ultranationalisme raciste et violent alimenté par le fanatisme religieux. Les Palestiniens sont perçus au mieux comme des inférieurs à tolérer jusqu’à ce que les circonstances surviennent où ils pourront être expulsés, où mis en cage et affamés comme les 1,5 millions de détenus de la prison Gaza.

Israël est une société où un racisme virulent anti-arabe et le déni de la Nakba sont la norme, malgré qu’aucun des leaders européens et étasuniens qui font sans cesse la leçon sur la négation du judéocide n’osera admonester Netanyahou pour ses gros mensonges et ses omissions sur le nettoyage ethnique des Palestiniens.

La « vision » de Netanyahou n’a offert aucune avancée comparé au plan Allon de 1976 d’annexion de la majorité de la Cisjordanie occupée, ou aux propositions d’« autonomie » de Menahem Begin à Camp David. Le but reste le même : contrôler le maximum de terres avec le minimum de Palestiniens.

Le discours de Netanyahou devrait enterrer les illusions ressuscitées - nourries en particulier par le Président US Obama dans le discours du Caire - qu’un tel Israël peut être volontairement amené à un quelconque règlement juste. Certains, dans cette région [USA, ndt], qui ont placé leurs espoirs dans Obama - comme avant dans Bush - croient que la pression étasunienne peut maîtriser Israël. Ils indiquent les fortes paroles d’Obama appelant à un arrêt complet de la colonisation - une demande que Netanyahou défie dans son discours. Il reste à voir si Obama fera suivre ses fortes paroles d’actes.

Et même si Obama est prêt à mettre une pression sans précédent sur Israël, il lui faudrait probablement épuiser une bonne part de son capital politique rien que pour qu’Israël gèle les colonies, sans parler d’une avancée sur des dizaines de questions plus importantes.

Et malgré l’idée répandue d’un clash en gestation entre l’administration Obama et le gouvernement israélien (qui peut céder sur des questions mineures), quand il s’agit de questions d’importance ils sont d’accord sur bien plus qu’ils ne se séparent. Obama a déjà déclaré que « tout accord avec le peuple palestinien doit préserver l’identité d’Israël comme Etat juif », et il a affirmé que « Jérusalem restera [sic] la capitale d’Israël et doit restée unifiée ». Quant aux réfugiés Palestiniens, il a dit « le droit au retour [en Israël] n’est pas une option, au sens littéral ».

Sur tout le brouhaha sur les colonies, Obama n’a questionné que leur expansion, pas leur existence permanente. Jusqu’à ce que l’administration Obama se dissocie des positions des administrations Clinton et Bush, on doit croire qu’il est d’accord avec elles et avec Israël sur la conservation permanente, dans toute solution avec deux Etats, des grands blocs de colonies qui encerclent Jérusalem et divisent la Cisjordanie en ghettos. Ni Obama, ni Netanyahou n’ont mentionné le mur israélien illégal de Cisjordanie, ce qui suggère qu’il n’y a de désaccord ni sur son parcours, ni sur son existence. Et maintenant, les deux sont d’accord pour que ce qui restera de lambeaux soit appelé « Etat palestinien ». Il ne faut pas s’étonner que l’administration Obama ait fêté le discours de Netanyahou comme « un grand pas en avant ».

Ce qui est particulièrement consternant sur la position avancée par Obama au Caire - et répétée constamment depuis par son envoyé spécial au Moyen-Orient George Mitchell - c’est que les USA se sont engagés pour « l’aspiration palestinienne légitime à la dignité, aux possibilités et à un Etat à eux ». Cette formule est faite pour avoir l’air pleine de sens, mais ces mots de campagne, vagues et attrape-tout sont vides de toute référence aux droits inaliénables des Palestiniens. Ils ont été choisis par des plumitifs étasuniens et des experts en relations publiques, pas par les Palestiniens. Les formules d’Obama impliquent que toute autre aspiration palestinienne est par essence illégitime.

Où, dans la loi internationale ou les résolutions de l’ONU, les Palestiniens peuvent t-ils trouver des définitions à « dignité » ou « possibilité » ? De tels mots guimauve réduisent faussement toute l’histoire palestinienne à de vagues sentiments et un « état » au lieu d’une lutte pour la libération, la justice, l’égalité, le retour et la restauration des droits usurpés. Après tout, il n’est guère difficile d’imaginer un état qui garde pour toujours les Palestiniens dépossédés, sans défense et sous la menace de plus d’expulsions et de massacres par un Etat raciste et expansionniste, Israël.

Dans l’Histoire, ce ne sont jamais les dirigeants qui ont défini les droits, mais le peuple qui s’est battu pour eux. Ce n’est pas une mince réalisation que pendant un siècle les Palestiniens ont résisté et survécus aux efforts sionistes de détruire physiquement leurs communautés et de les effacer des pages de l’Histoire. Tant que les palestiniens continueront à résister dans chaque domaine par tous les moyens légitimes, construisant une vraie solidarité internationale, leurs droits ne pourront jamais s’éteindre. C’est sur la base d’une telle force palestinienne indépendante, pas sur les promesses illusoires d’une grande puissance ou les faveurs d’un occupant usurpateur, que la justice et la paix peuvent être atteintes.

* Hasan Abu Nimah est l’ancien représentant permanent de la Jordanie aux Nations Unies.

* Cofondateur de The Electronic Intifada, Ali Abunimah a écrit “One Country : A Bold Proposal to End the Israeli-Palestinian Impasse” (Metropolitan Books, 2006).

Une version de cet article est parue dans The Jordan Times et est reproduite avec la permission des auteurs.

17 juin 2009 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduit et transmis par JPB


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