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La crise des liquidités à Gaza a des conséquences humanitaires tangibles

vendredi 29 mai 2009 - 06h:54

IRIN

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GAZA-VILLE, 27 mai 2009 (IRIN) - Une crise bancaire et un manque de liquidités pénalisent les Palestiniens de la bande de Gaza : les fonctionnaires luttent pour obtenir leurs salaires, et la distribution de l’aide humanitaire est retardée. Des milliers de bénéficiaires ne reçoivent pas les prestations sociales qui leur sont dues.

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Dégâts causés aux habitations de la ville de Rafah, dans la bande de Gaza, par les frappes aériennes israéliennes, en janvier 2009

Cette semaine, Israël a autorisé l’envoi à Gaza de 50 millions de nouveaux shekels israéliens (ILS, soit l’équivalent de 12,7 millions de dollars) pour permettre la rémunération des 65 000 employés de l’Autorité palestinienne, sise à Ramallah (Cisjordanie), qui vivent à Gaza, selon le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA).

Depuis la prise de pouvoir du Hamas, à Gaza, en juin 2007, les transferts de fonds à Gaza se limitent à des envois épisodiques de 50 à 100 millions d’ILS. En raison de ces restrictions, les banques de Gaza ne disposent pas de liquidités suffisantes pour permettre aux employés de l’AP de retirer leurs salaires. Ce manque de liquidités empêche les transactions financières les plus simples et le fonctionnement des programmes humanitaires, selon OCHA. Il a également donné lieu à une thésaurisation.

« A Gaza, nos principales opérations sont financières. Nous aidons l’AP, à Ramallah, à verser les salaires et les retraites, et la Commission européenne [CE] verse des aides aux familles vulnérables sur leurs comptes bancaires, mais il n’y a pas assez d’argent liquide dans les banques pour pouvoir effectuer ces paiements », a expliqué à IRIN Christian Berger, représentant de la Commission européenne à Jérusalem.

La CE, principal bailleur des Palestiniens, contribue à hauteur de 33,4 millions de dollars au versement des salaires mensuels des employés de l’AP, soit environ la moitié de la somme totale à verser.

Elle verse également environ 250 dollars à 48 000 personnes en difficulté sociale tous les trois mois, dont environ la moitié se trouvent à Gaza. Les familles de Gaza ont reçu leur versement de mars en mai, mais la CE n’est pas certaine qu’elle disposera d’assez de liquidités pour les versements de juin.

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Le président palestinien Mahmoud Abbas, du Fatah (milieu droit) et le Premier ministre Ismail Haniya, du Hamas (milieu gauche).

« Le système bancaire de Gaza est au bord de l’effondrement car il n’y a pas assez d’argent liquide dans les caisses », a indiqué M. Berger de la CE. « Nos projets ne reçoivent pas l’argent liquide dont ils ont besoin pour fonctionner ».

Israël a consenti à autoriser l’envoi mensuel de 50 millions d’ILS, mais Gaza a besoin d’un minimum de 100 millions d’ILS par mois, selon M. Berger.

« L’argent liquide arrive [à Gaza] généralement une fois par mois, par le point de passage d’Erez, pour permettre la rémunération des employés de l’AP, à Ramallah », a déclaré à IRIN Shlomo Dror, porte-parole du ministère israélien de la Défense. « Nous autorisons l’envoi des fonds destinés aux organismes internationaux et aux agences des Nations Unies uniquement si nous savons exactement où ces fonds vont aller ; sinon, on ne peut pas être sûr que l’argent liquide envoyé à Gaza ne finira pas entre les mains du Hamas ».

Lorsque le Hamas a pris le contrôle de Gaza, les banques israéliennes ont décidé de ne pas entretenir de relations avec les banques de Gaza, le Hamas étant considéré comme une « organisation terroriste », selon M. Dror.

« Si le Hamas agit comme une organisation terroriste, nous [Israël] n’aiderons ni ne consulterons leur gouvernement », a indiqué M. Dror.

Le gouvernement du Hamas assume la responsabilité financière du système scolaire public, de la défense civile, des hôpitaux publics et des 54 centres de santé primaire de Gaza.

Le programme du PNUD compromis

« Nous sommes aussi touchés par cette question de liquidités. Le Programme des Nations Unies pour le développement [PNUD] a mis en place un système de paiement pour les non-réfugiés dont les logements ont été endommagés ou détruits au cours de la dernière opération militaire menée par Israël », a indiqué Husam Toubil, responsable de programme du PNUD, à Gaza.

« Nous avons distribué 20 millions de dollars d’aide financière et devons en distribuer 6,3 millions de plus, mais les versements sont retardés parce que les banques manquent d’argent liquide », a-t-il indiqué.

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Les infirmiers font la grève pour exiger une hausse de salaire (photo d’archives)

Ahmed Abbo, 23 ans, qui suit une formation d’infirmier, a perdu son logement à Jabaliyia Est au cours de l’offensive israélienne (27 décembre 2008 - 18 janvier 2009). Les habitants de son immeuble attendent, a-t-il indiqué, que le PNUD leur verse 5 000 dollars d’aide à la reconstruction par logement ; toutefois, les coûts de reconstruction totaux, pour les huit appartements détruits, s’élèvent à au moins 250 000 dollars.

Quelque 13 300 foyers sont inscrits sur les listes de bénéficiaires du PNUD, et environ 4 300 attendent encore de recevoir les fonds qui leur sont dus pour pouvoir trouver un autre moyen d’hébergement ou réparer leurs logements.

Ahmed Al-Sultan, 59 ans, travaillait auparavant comme man ?uvre en Israël ; sa femme Sabah et lui-même attendent de recevoir 5 000 dollars du PNUD pour pouvoir louer un appartement pour leur famille de 12, leur logement ayant été détruit, à Jabaliyia, pendant l’offensive. « Aujourd’hui, ma famille vit à Jabaliyia dans une maison qui se compose d’une seule chambre à coucher et d’une seule salle de bain », a expliqué Ahmed Al-Sultan. « J’étais censé recevoir les fonds il y a un mois, mais le versement a été retardé ».

Le programme de l’UNRWA compromis

Le même système a été mis en place pour les réfugiés de Gaza par l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA).

« L’UNRWA est en train de verser des subventions financières aux réfugiés dont les logements ont été endommagés ou détruits », a expliqué Adnan Abu-Hasna, porte-parole de l’UNRWA à Gaza. « Nous avons versé cinq millions de dollars, et nous voulons en verser 20 millions de plus, mais nous nous débattons face au manque d’argent liquide ».

L’UNRWA a également des difficultés à envoyer de l’argent liquide à Gaza pour pouvoir verser des subventions aux personnes en difficulté sociale, essentiellement pour subvenir à leurs besoins alimentaires.

Le versement des dernières subventions dues à 96 000 réfugiés inscrits sur les listes des personnes en difficulté sociale a été retardé de près de quatre mois, et 25 pour cent des 96 000 bénéficiaires n’ont encore rien perçu, selon M. Abu-Hasna.

Quelque 1 075 000 Palestiniens sont inscrits sur les listes des réfugiés de Gaza, selon l’UNRWA. Environ 1,5 million de Palestiniens vivent sur ce territoire, d’une surface de 356 kilomètres carrés.

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La zone située à l’intérieur du point de passage de Rafah, du côté palestinien. Cette porte s’ouvre sur une multitude de tunnels, qui servent à faire passer des denrées alimentaires de base, du matériel et de l’argent liquide.

Marché noir

La CE et les agences des Nations Unies qui opèrent à Gaza s’inquiètent à l’idée que la pénurie d’argent liquide puisse éroder la transparence du système bancaire palestinien et créer un marché noir dangereux.

Les tunnels creusés le long de la frontière entre l’Egypte et Gaza servent en effet à l’import d’espèces, selon les bureaux d’OCHA à Gaza.

Les marchandises importées à Gaza sont presque toutes achetées en espèces, les banques gazaouies et israéliennes n’entretenant aucun contact entre elles, selon Jihad Al-Wazir, gouverneur des Services monétaires palestiniens (SMP), sis à Ramallah. Cela donne lieu à une fixation des prix et à des transactions déréglementées, a-t-il indiqué.

Ouverture d’une nouvelle banque

La Banque nationale islamique (NIB) a ouvert il y a trois semaines, à Gaza-Ville.

« Nous travaillons uniquement à l’échelle locale. Nous n’avons pas obtenu de permis des SMP en raison du clivage politique », a expliqué Hazem Housni, manager de la banque. « Le gouvernement de Gaza a plus de 25 000 employés et les autres banques refusent de les servir ».

La NIB espère atténuer les effets de la crise des liquidités en récoltant des fonds auprès de ses clients gazaouis, et en réinvestissant ces fonds à Gaza pour les faire circuler de nouveau.

27 mai 2009 - IRIN
Photos : Free Gaza, PPO/Apollo Images, Naela Khalil et Erica Silverman/IRIN
Vous pouvez consulter cet article à :
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