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Des Palestiniens bénéficient d’une dégradation des relations turco-israéliennes

samedi 28 mars 2009 - 06h:23

Jonathan Cook

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Une bataille juridique menée par des familles palestiniennes pour arrêter la mainmise sur leur voisinage par des colons juifs, dans Jérusalem-Est, a bénéficié d’un sérieux coup de pouce suite à la récente dégradation des relations entre Israël et la Turquie.

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Fawzia al-Khurd, grande figure aujourd’hui de la résistanec palestinienne face au racisme et au colonialisme israélien - Photo : AFP

Après l’attaque de la Bande de Gaza par l’armée israélienne en janvier dernier, les juristes des familles ont eu accès pour la première fois aux archives cadastrales ottomanes à Ankara, leur procurant ce qui, selon eux, est la preuve que les titres de propriété produits par les colons sont falsifiés.

Ce lundi, les juristes palestiniens ont présenté les documents ottomans à une Cour israélienne, qui doit évaluer leur validité au cours des prochaines semaines. Les juristes espèrent que les procédures d’expulsion de quelque 500 habitants de Sheikh Jarrah seront arrêtées.

L’accès sans précédent des familles aux archives turques constitue un tournant important, ouvrant la voie au succès des appels interjetés par d’autres Palestiniens de Jérusalem-Est et de Cisjordanie impliqués dans des batailles juridiques avec des colons et avec le gouvernement israélien en matière de propriété foncière.

L’intérêt en faveur de la situation désespérée des habitants de Sheikh Jarrah a culminé en novembre, lorsqu’un couple, Fawziya et Mohammed Khurd, fut expulsé de sa maison par un juge israélien. M. Khurd, un malade chronique, mourut quelques jours après.

Entretemps Mme Khurd, 63 ans, a entamé une protestation en vivant dans une tente sur un terrain vague près de son ancienne maison. La police israélienne a arraché sa tente à six reprises et la municipalité de Jérusalem lui a imposé une série d’amendes.

Les problèmes auxquels sont confrontés Mme Khurd et les autres habitants proviennent de déclarations en justice de l’Association Sephardi Jewry, selon lesquelles elle aurait acheté les terrains de Sheikh Jarrah au XIXe siècle. Des groupes de colons espèrent expulser tous les habitants, démolir leurs maisons et construire 200 appartements à la place.

Leur emplacement est considéré comme stratégique par les organisations de colons parce qu’il est proche de la Vieille Ville et des lieux saints palestiniens.

Chose inhabituelle, des diplomates étrangers, notamment étatsuniens, ont protesté, disant que l’expulsion des familles palestiniennes saperait la base de la solution biétatique au conflit israélo-palestinien.

Cependant l’aide du gouvernement turc a été cruciale parce que la Palestine faisait partie de l’Empire ottoman lorsque les transactions foncières sont censées avoir eu lieu.

Israël et la Turquie ont été des alliés militaires et politiques proches pendant des décennies et traditionnellement Ankara évitait de mettre leurs liens en péril en se mêlant des disputes foncières dans les territoires occupés. Mais il semble y avoir eu une volte-face de la politique gouvernementale turque, depuis une brouille entre les deux pays à propos de la récente opération israélienne à Gaza.

Recep Tayyip Erdogan, le Premier ministre turc, a accusé son homologue israélien, Ehud Olmert, de « mensonge » et de « coup de couteau dans le dos », apparemment furieux qu’Israël ait lancé son opération militaire sans l’en prévenir. Au moment de l’attaque, la Turquie oeuvrait comme médiatrice dans des négociations de paix entre Israël et la Syrie.

Quelques jours après la fin de l’attaque sur Gaza, M. Erdogan quittait abruptement une session du Forum Economique Mondial de Davos en Suisse, après avoir accusé Shimon Peres, le président israélien, notamment en ces termes : « Quand il s’agit de tuer, vous savez très bien comment faire ».

Selon les juristes travaillant pour les familles de Sheikh Jarrah, la crise des relations s’est traduite par une plus grande disponibilité d’Ankara à les aider dans leur bataille légale.

« Nous avons noté un important changement d’atmosphère lorsque nous approchons à présent les responsables turcs » dit Hatem Abu Ahmad, l’un des avocats de Mme Khurd. « Auparavant ils n’osaient pas contrarier Israël et ils nous décourageaient en s’excusant de ne pas pouvoir nous aider ».

Il dit que les avocats des familles ont finalement été invités aux archives à Ankara fin janvier, alors qu’ils avaient introduit des demandes depuis plusieurs mois auprès du Consulat de Turquie à Jérusalem et de l’Ambassade turque à Tel Aviv.

Les responsables turcs ont recherché les documents que demandaient les juristes et ont fourni des déclarations officielles attestant que les prétentions foncières des colons étaient falsifiées. Mr Abu Ahmad dit que les recherches dans les archives ottomanes n’ont pas permis de trouver le moindre titre de propriété appartenant à un groupe juif pour les terrains de Sheikh Jarrah.

« Les responsables turcs nous ont aussi dit qu’à l’avenir ils nous aideraient chaque fois que nous en aurions besoin et qu’ils sont disposés à rechercher des documents similaires relatifs à d’autres affaires » ajoute M. Abu Ahmad. « Ils nous ont même demandé s’il y avait d’autres documents que nous cherchions ».

Cela pourrait se révéler de grande importance, étant donné que la municipalité de Jérusalem menace d’entamer une nouvelle campagne de démolition de maisons à l’encontre de Palestiniens. La semaine dernière, Nabil Abu Rudeina, porte-parole du Président palestinien Mahmoud Abbas, a qualifié de « nettoyage ethnique » l’annonce de dizaines de démolitions ordonnées à Jérusalem.

Des groupes de juristes palestiniens affirment régulièrement que les colons falsifient des documents pour tenter de mettre la main sur des terres appartenant à des propriétaires privés palestiniens, mais qu’ils ont beaucoup de mal à prouver leur cas.

A la fin de l’année dernière, l’agence Associated Press dévoilait une escroquerie de colons concernant un terrain sur lequel ils ont construit l’avant-poste Migron, près de Ramallah, et où habitent plus de 40 familles juives. Les documents des colons étaient censés avoir été signés par le propriétaire palestinien, Abdel Latif Sumarin, en Californie en 2004, même si ce dernier est décédé en 1961.

Les familles de Sheikh Jarrah ont fini par vivre dans leurs maisons actuelles après avoir été obligées de fuir un territoire devenu israélien après la guerre de 1948. La Jordanie, qui contrôlait Jérusalem-Est jusqu’à l’occupation israélienne en 1967, et les Nations Unies avaient donné aux réfugiés des parcelles sur lesquelles construire des maisons.

Mme Khurd dit qu’elle allait rester dans sa tente jusqu’à ce qu’elle obtienne justice.

« Ma famille est originaire de Talbieh » dit-elle, se référant à ce qui est devenu aujourd’hui l’un des districts les plus prospères de Jérusalem-Ouest. « Je ne suis pas autorisée à retourner dans la propriété qui est légitimement la mienne, mais à ces colons on donne ma maison, qui ne leur a jamais appartenu ».

Site de Jonathan Cook : Je suis un journaliste britannique basé à Nazareth, en Israël. Mon site présente mes articles sur le Moyen-Orient qui sont publiés dans des journaux internationaux de langue anglaise et arabe et dans des publications revues spécialisées depuis 2001.

Du même auteur :

- Bataille de l’électricité avec Israël pour une petite bédouine - 24 mars 2009
- Un parc israélien, leçon de l’histoire oubliée - 16 mars 2009
- Un Djihad de l’armée israélienne ? - 7 février 2009
- Les enfants de Gaza ne peuvent plus être soignés à l’étranger - 30 janvier 2009
- Gaza sert-elle de terrain d’essai pour de nouvelles armes ? - 18 janvier 2009

25 mars 2009 Vous pouvez consulter cet article ici :
http://www.jkcook.net/Articles2/038...
Traduction de l’anglais : Marie Meert


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