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Crainte et traumatisme dans les écoles à Gaza

dimanche 22 février 2009 - 07h:30

Alex Dziadosz - Al Jazeera.net

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Alors que les écoliers défilaient dans la cour de récréation de l’école élémentaire de Asma à Gaza City pour la première fois depuis que l’offensive israélienne débuta, ils étaient accueillis par une lugubre réminiscence de la violence qui laissa plus de 1300 Palestiniens morts et des milliers de blessés.

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Enseignants et psychologues tentent de soigner les traumatismes subis par les enfants de la bande de Gaza lors de la dernière agression israélienne - Photo : Gallo/Getty

Un trou fait par une fusée israélienne marque le mur des latrines de la cour de récréation et du sang souille le mur d’à côté.

Asma est une des plus de 600 écoles dans la bande de Gaza — la plupart d’entre elles ont été ré-ouvertes le 24 janvier — qui est aujourd’hui confrontée à un grand nombre de défis opérationnels dans l’après-guerre.

Les éducateurs à travers la bande de Gaza sont en train de réfléchir au fait de reprogrammer les examens abandonnés lorsque Israël commença à bombarder le territoire le 27 décembre.

Les professeurs doivent aussi faire face à la tâche d’enseigner dans des salles qui ont servi d’abri pour des douzaines de réfugiés.

S’occuper au traumatisme

Au premier jour de la rentrée des classes, la plupart des enfants déambulèrent dans la cour, mangeant du pain et du fromage fourni par l’école et jouant avec leurs amis.

A l’intérieur des salles de classes, des débris laissés par les grand nombre de réfugiés y cherchant asile jusqu’à il y a quelques jours encore, couvraient les planchers — une boîte de tomates, des bouteilles vides, et, dans certaines salles, des restes fracassés de planches et de chaises utilisés en tant que bois de chauffage en l’absence totale d’électricité et de gaz.

Plusieurs enseignants affirment qu’un cursus normal ne peut pas être conduit tant que les élèves n’ont pas été soigné pour le traumatisme de la mort de leurs camarades de classes et de membres de leurs familles respectives.

« Le matin, lorsque je travaillais parmi mes élèves, beaucoup d’entre eux étaient extrêmement effrayés, » dit Amirah Hamdan, une institutrice à Asma qui se charge du registre de présence matinal.

« Ils croyaient que la guerre allait recommencer alors qu’ils étaient à l’école. »

D’autres enseignants et administrateurs disent qu’ils prendraient les prochains jours pour aider les quelques 900 élèves de l’école à placer la guerre derrière eux et retourner à leurs études, mais le premier jour démontre bien qu’il sera difficile d’effacer les traces du passé.

Les écoliers de l’école Asma étaient pour la plupart ravis d’y retourner, quoique certains étaient profondément bouleversés par la violence des dernières semaines.

Nour Abdel All, âgée de 10 ans, dit qu’elle a perdu deux de ses sept frères pendant la guerre et est angoissée à l’idée d’en perdre à nouveau.

Quand elle sera en âge de travailler, dit-elle, elle voudrait enseigner les droits de l’homme, une attitude adoptée après la perte de ses frères.

Le bombardement l’a terrifiée et elle a toujours peur, particulièrement des avions de chasse israéliens.

« Je prie que Dieu les brûle tous un jour » dit-elle.

Les examens scolaires

Suha Dawoud, une surveillante à l’école Asma, dit que sa fille était une des nombreuses élèves qui passait ses épreuves annuelles lorsque les attaques israéliennes ont commencé.

« Ils [les élèves] ne sont pas dans un état d’esprit dans lequel ils peuvent se concentrer et se fixer, » dit Dawoud.

« Même l’élève le plus discipliné serait incapable de se débrouiller avec les examens scolaires après les épouvantables scènes qu’ils ont vu soit à la télévision, soit sur le terrain. »

Cependant, beaucoup d’élèves étaient peu performants même avant qu’Israël ne lance une attaque sur Gaza le 27 décembre.

Le blocus israélien a étouffé l’économie locale forçant bien des élèves à abandonner leurs études et à rechercher un emploi.

Se tourner vers l’éducation

Un grand nombre de Palestiniens considèrent l’éducation comme un des rares moyens qui leur est donné pour quitter le territoire et aspirer à de meilleures conditions vies.

Dans les dernières décennies, la Cisjordanie et la bande de Gaza ont affiché un taux d’inscription dans les établissements supérieurs plus élevé qu’au Liban et un taux d’alphabétisation plus élevé qu’en Égypte ou au Yémen.

Les territoires palestiniens et la diaspora ont produit beaucoup d’intellectuels influents tel qu’Edward Saïd, Rashid Khalidi et Mahmoud Darwish.

« Notre but est d’entretenir la roue de l’éducation, car l’éducation est tout ce que possède nos enfants. C’est leur véritable richesse, » dit Dawoud.

« Nous n’avons pas de ressources ici à Gaza. Nous n’avons ni matières premières, ni industrie. Nous n’avons rien mis à part l’éducation elle-même. »

Les éducateurs comme Dawoud sont également contre le climat d’occupation et de violence.

Des graffitis représentant des hommes masqués et armés couvrent les murs, les visages de « martyres » reflétés par les lampadaires, et des bruits de fusillades à commande numérique s’échappent des cybercafés tandis que des rangées d’enfants sont captivés par des jeux vidéos à thème militaire.

Même dans les classes de Dawoud règne le climat de violence.

Comme une sorte de thérapie, elle donne souvent aux enfants feuilles et crayons et leur demande de dessiner ce qu’ils ressentent.

« Vous serez peut-être choqués, » dit-elle.

« Du sang, des destructions, des hommes qui s’entretuent ; les armes à feu sont présentes dans leurs peintures et dessins. »

Etudiants en colère

Au lycée palestinien pour garçons, une école publique pour quelques 700 élèves à Gaza City, les administrateurs ont décidé d’annuler totalement les examens.

Ils avaient été programmés pour le 29 décembre, deux jours après le début de l’attaque israélienne.

El-Khalily, le proviseur du lycée, dit à Al-Jazeera qu’à la reprise normale des cours, les professeurs n’entamaient pas de leçons conventionnelles, mais au lieu de cela ils avaient décidé d’aider les élèves à surmonter ce qu’ils ont vu et entendu pendant la guerre.

Deux élèves du lycée ont été tués et cinq ont été grièvement blessés.

Les professeurs du lycée s’inquiètent du fait que la colère des étudiants mènerait à des violences et à des résultats en baisse dans les jours qui suivent.

« Peut-être qu’un professeur explique une leçon alors que l’élève est dans un autre état mental, » dit Nour El-Deen, un professeur d’anglais.

« Oui, son corps est avec l’instituteur, mais son esprit est ailleurs. Il pense à la mort, à la destruction. »

25 janvier 2009 - Al-Jazeera.net -
Vous pouvez consulter cet article ici :
http://english.aljazeera.net/focus/...
Traduction de l’anglais par Shazmeen Surtee


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