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La guerre a plongé Gaza dans l’obscurité totale

samedi 24 janvier 2009 - 07h:55

Juan Miguel Muñoz

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Les habitants déambulent entre les ruines dans l’attente de l’aide humanitaire.

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Palestine, une pensée qui survit à toutes les tentatives génocidaires israéliennes - Jebalya - Photo : AP

L’éclairage dans la ville égyptienne de Rafah est faible, certes. Mais traverser la frontière entre le pays arabe et Gaza relève d’un parcours dans les ténèbres. Le système électrique a été détruit par les tirs israéliens. Hier soir, depuis le passage de Rafah , la bande de Gaza était un trou plus noir que jamais.

Les uniformes des policiers du Gouvernement de la bande de Gaza sont noirs. Dans la frontière de Rafah, ce sont ces agents, fonctionnaires de l’Exécutif islamiste, qui reçoivent les étrangers qui arrivent d’Egypte. Ils sourient. C’est difficile de comprendre comment ils peuvent encore avoir envie de plaisanter après le châtiment subi, après la panique dont a souffert le million et demi d’habitants durant ces 23 jours de bombardement de l’armée israélienne. Sans parler de toute la reconstruction à venir !

On voit très peu de lumières le long des 35 kilomètres qui séparent la ville de Rafah, dans le sud de la bande, de la capitale. Des ombres surgissant au coin des rues surprennent. Ce sont des gens qui n’ont rien d’autre à faire chez eux que de dormir.

Des centaines de milliers de personnes ne peuvent ni regarder la télévision, ni naviguer sur internet, ni se laver avec l’eau que l’on pompe à l’aide du courant, ni conserver leurs aliments, ni utiliser leurs lave-linge, pas plus que les étudiants peuvent réviser leurs examens de fin de semestre. « Dans les hôpitaux, des enfants arrivent avec des blessures graves parce que de nombreuses familles utilisent des lampes à kérosène qui causent des accidents » commente Mohamed, un voisin de Gaza.

C’est à peine si l’on peut observer la destruction provoquée par l’énorme violence employée par les militaires israéliens qui ont abandonné le terrain palestinien hier après 18 jours d’invasion terrestre. On arrive juste à percevoir quelques lignes de la route de Saladin, aujourd’hui réduite à des tas de gravats, et quelques passages étroits frayés dans les maisons les plus proches lorsque le conducteur arrête le véhicule un moment. « On verra demain » dit-il.

L’obscurité serait la plus totale s’il n’y avait pas les automobiles et les camions qui transportent l’aide humanitaire (une goutte d’eau dans le vaste océan de la reconstruction) , circulent et éclairent de leurs puissants phares.

« Dans certains quartiers de la ville de Gaza, il y a des foyers qui vivent depuis 20 jours sans lumière ni eau », affirme Mohamed. Et ce, dans un périmètre de plus de 45 kilomètres. Depuis la voie de Saladin, il suffit d’un coup d’ ?il vers l’est de la zone de Jan Younes pour se rendre compte que des villages entiers vivent dans l’obscurité la plus absolue.

La seule chose que l’on distingue ce sont des reflets au loin. Ce sont ceux des kibboutz israéliens et des communautés agricoles et d’élevage qui bordent la bande de Gaza.

C’est paradoxal. Car la seule centrale électrique, détruite en Juin 2006, après la capture du soldat israélien Gilad Shalit, s’est remise à fonctionner.
Certes, il y a du combustible. Mais, à présent le problème est tout autre. Les bombardements de l’aviation et l’artillerie israéliennes ont détruit la majorité des transformateurs et des réseaux électriques qui alimentent les villes et villages des réfugiés. En ce qui concerne les réseaux électriques, il s’agit d’un problème supplémentaire car avant la guerre, on les utilisait afin de distribuer le courant et pallier ainsi à la pénurie. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus compliqué.

Nous nous approchons de la ville de Gaza. A l’est de la ville, on distingue les quartiers de Zeitoun et Sheyaieh, deux des zones les plus endommagées par les tirs israéliens.

Ils comptent sur Gaza pour que les blindés et l’infanterie mettent en place une tactique afin d’éviter que les explosifs restés sous terre par les milices islamistes ( les Brigades Azzedin el Kassam, du Hamas, et les Brigades el Quds, du Djihad islamique) ne les surprennent. Les fouilles laissaient apparaître des maisons. Les tanks avançaient dans les salons des habitations. Sans le danger de se heurter aux explosifs préparés par les miliciens. « Il y a des habitants qui ne retrouvent même plus les rues où se situaient leur maison. Ce ne sont plus que des décombres », affirme Mohamed.

Il ne reste plus grand chose du peu d’orangers qui avaient résisté aux attaques antérieures, pas plus que de ces oliviers, ou de ces poulaillers.

Tout est tellement sombre que l’on doit même expliquer à l’étranger où était le « Sérail » [bâtiment abritant les responsables de l’occupation britannique], levé par les Britanniques au début des 30 années de son mandat entre 1918 et 1948.

Le siège du Parlement palestinien de Gaza est également en ruines. Le commissariat, à quelques centaines de mètres, est aussi réduit à un tas de ciment et de ferraille. Ce sont les seuls blocs que l’on pouvait observer. Peut être parce que les seuls réverbères qui illuminent la bande sont dans l’avenue de Omar el Mokhtar, qui se termine au bord de la mer Méditerranée. C’est le seul endroit où l’obscurité est relative, car un groupe de commerçants dispose de générateurs électriques qui produisent un ronronnement constant.

C’est un des appareils les plus demandés à Gaza. Ces machines, typiques de la bande depuis que la centrale a été détruite, on les acheminait uniquement par le biais des tunnels de Raffah. Mais, cette voie qui a alimenté le territoire palestinien en armes et marchandises pendant des années a été étouffée à base de projectiles d’une puissance hors du commun. Et les sapeurs se sont vite remis à l’ ?uvre.

A Rafah, côté égyptien, hier, on continuait de proposer d’entrer à Gaza par voie terrestre. On utilise encore certains des 1500 tunnels qui traversaient la frontière avec l’Egypte. Quelques unes des centaines de tentes qui ne cachaient qu’à moitié les tunnels demeurent intactes face à des bâtiments qui ne sont aujourd’hui plus que des squelettes.

Du même auteur :

- Le Fatah se transforme en perte collatérale - 22 janvier 2009
- « Nous vous attendons à chaque coin de rue et dans chaque maison » - 7 janvier 2009
- Tous contre le Hamas - 5 janvier 2009
- Le Likoud de Netanyahu se transforme en parti d’extrême droite - 27 décembre 2008

22 janvier 2009 - El Païs - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.elpais.com/articulo/inte...
Traduction de l’espagnol : Assia B.


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